Farouk Ksentini pour l’abolition de la peine capitale mais soutient son maintien dans des cas précis

Farouk Ksentini pour l’abolition de la peine capitale mais soutient son maintien dans des cas précis

Le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l’homme (CNCPPDH), Me Farouk Ksentini, a appelé, dimanche à Alger, à l’abolition de la peine de mort en Algérie, tout en plaidant pour son maintien dans des cas précis tels les meurtres et les enlèvements d’enfants.

Au cours d’une conférence consacrée à la peine de mort, Me Ksentini a fait remarquer que bien que l »Algérie n’a pas appliqué cette peine depuis 1993, les tribunaux ont continué à la prononcer, affirmant que la Commission qu’il préside propose son abolition en Algérie tout en la maintenant dans des cas précis comme les meurtres ou les enlèvements d’enfants.

Me Ksentini a rappelé également dans sa conférence que la législation algérienne a prévu l’application de la peine de mort dans 18 cas, soulignant que sa commission proposait des peines alternatives à la peine de mort comme la prison à vie.

« Les tribunaux criminels implantés à travers le pays prononcent 140 à 150 peines de mort par an sans pour autant les appliquer », a-t-il indiqué.

Il a critiqué ce qu’il a estimé être de la « précipitation » de la part de certains tribunaux dans l’examen de dossiers qui aboutissent à la prononciation de la peine de mort, idem dans certains cas pour l’expertise psychiatrique que fait subir l’instance judiciaire aux auteurs de crimes. Toutefois Me Ksentini a souligné que l’abolition de la peine de mort nécessitait un large débat entre tous les acteurs de la société algérienne affirmant que tous les points de vue devaient être respectés, aussi bien des opposants que des partisans de l’abolition.

De son coté, Me Miloud Brahimi défenseur des droits de l’homme a rappelé que l’Algérie était le premier pays à demander l’abolition de la peine de mort à travers une proposition présentée en 1964 par Ali Haroun devant l’Assemblée populaire nationale (APN) et une autre proposition de la moudjahida Dhrif Zohra présentée à l’ancien président de la République, Ahmed Benbella.

Tout en qualifiant d’ »honorable » le gel de son application, Me Brahimi s’est prononcé pour l’abolition de cette peine à l’instar de plusieurs pays tels que la Turquie ou le Sénégal. « L’Algérie qui a opté pour la réconciliation nationale après une décennie tragique acceptera certainement l’abolition de cette peine », a-t-il souligné.

Intervenant à son tour, le président de la Ligue algérienne des droits de l’homme (LADH) Boudjemaa Ghechir a affirmé que « l’aspect religieux de l’abolition de la peine de mort est un grand défi pour la société algérienne » indiquant que « l’application de la loi du talion dans les crimes de sang n’est ni du ressort de l’Etat, ni de celui de la société mais relève des ayants-droit des victimes comme le prescrit la Charia islamique ».

Pour sa part, le directeur des recherches et de la communication au sein de l’organisation internationale de la réforme pénale Heithem Chebli a déclaré que « la protection des sociétés et leur sécurité ne se définissait pas par la mort du criminel, et plus particulièrement quand c’est au nom de la Justice », ajoutant que « l’application de la peine de mort en guise de vengeance n’est pas pour réaliser la Justice idéale à laquelle aspire aujourd’hui l’humanité tout entière ».

Le vice-président de l’Alliance mondiale contre la peine de mort, Raphael Chenweil, a souligné quant à lui que « la lutte pour l’abolition de la peine de mort à l’échelle internationale doit être le souci majeur des défenseurs des droits de l’homme, des politiciens et des hommes de lettres.

L’intervenant, par ailleurs directeur général de l’organisation française « Tous contre la peine de mort », a souligné que « la guillotine ou la peine capitale » était un instrument de terreur et de violence utilisé par le colonisateur français en Algérie personne ne peut le nier ».