Farouk Ksentini : Des rapporteurs de l’ONU à Alger : pourquoi ?

Farouk Ksentini : Des rapporteurs de l’ONU à Alger : pourquoi ?

Le gouvernement vient de lancer des invitations à différentes commissions chargées des droits de l’Homme en Italie, en Espagne, en France et au Royaume-Uni pour venir en Algérie et faire des investigations.

Des rapporteurs spéciaux seront également sollicités pour enquêter sur l’évolution de la liberté de la presse, la violence contre les femmes, le doit à l’éducation, à la santé, au logement et à l’eau. Ils seront à Alger en septembre.

La prochaine rentrée sociale, qui s’annonce déjà “bruyante”, sera marquée par la présence de rapporteurs étrangers spéciaux qui enquêteraient sur l’évolution des droits de l’Homme en Algérie dans divers domaines. C’est du moins ce qu’a annoncé Me Farouk Ksentini, lors d’une rencontre jeudi au Forum d’El-Moudjahid.

Ces rapporteurs ont été sollicités par les autorités pour enquêter sur l’évolution de la liberté de la presse, le droit à un logement convenable, le droit à l’éducation, à l’eau et à l’assainissement, à la santé mentale et physique.

“La décision des autorités algériennes d’ouvrir la porte aux rapporteurs pour établir un audit sur les droits de l’Homme est un décision extrêmement importante”, a dit Ksentini. Et d’ajouter que des invitations ont été lancées, d’autre part, par son institution à des commissions chargées des droits de l’Homme à Rome, à Madrid, à Paris et à Londres… pour la même mission.

Une mission durant laquelle “nous les accompagnerons pour leur faciliter le travail”. Questions : qu’en est-il des autres ONG dont Alger avait refusé la venue à une certaine époque ? Pourquoi ces invitations en ce moment bien précis ?

Me Ksentini répond : “Les ONG n’ont pas été autorisées à venir en Algérie. J’espère que leur interdiction sera levée dans le futur, car nous n’avons rien à cacher.” Revenant sur les raisons qui avaient poussé Alger à leur refuser les visas d’entrée, il y a quelques années, le conférencier plaidera le fait que “l’Algérie a rompu avec les ONG car elles ont pris position pour le terrorisme en soutenant que l’Algérie combat la démocratie et la société civile au moment où le pays faisait face à une montée du terrorisme. C’est à partir de cette confusion qu’elles ont lancé le slogan de “qui tue qui ?” et ont terni l’image du pays. Cette position est

inadmissible. Je leur avais demandé de s’excuser officiellement mais elles ne l’ont pas fait et ce n’est pas normal.” L’orateur rappellera qu’“il a fallu attendre le 11 septembre 2001 pour que les ONG revoient leur jugement et découvrent qu’il n’est pas facile de combattre le terrorisme”.

Bilan partiel positif des droits de l’Homme

Abordant la situation actuelle des droits de l’homme, Me Ksentini dira que le bilan “partiel, objectif et sérieux” établi par sa commission fait état de “l’évolution substantielle de la situation.

C’est de mieux en mieux. Nous ne sommes pas au top mais nous ne sommes pas au bas du tableau. Nous sommes au milieu”. Pour le conférencier, “les choses vont lentement car nous n’avons pas encore acquis la culture des droits de l’homme en raison du colonialisme”. C’est ce qui explique le fait que “des insuffisances persistent. Mais nous continuons notre combat”.

Parmi ces insuffisances, le président de la Commission nationale des droits de l’homme citera : l’abus de l’administration et la bureaucratie. Enfin pour Me Ksentini, “le véritable défenseur des droits de l’homme est l’état. Plus l’état est fort, plus les droits de l’homme sont protégés”.

Justice : “Elle doit évoluer par la qualité et non par les chiffres”

Par ailleurs, interrogé sur le bilan de la réforme de la justice, Me Ksentini estime que “des efforts sont faits mais il y a toujours des dysfonctionnements. Le recours abusif à la détention préventive que nous avons toujours dénoncé s’est quelque peu amélioré mais pas comme il se doit”.

Il est vrai, reconnaît le conférencier, que les choses sont en train de se faire. Il citera l’amélioration des conditions d’incarcération par la construction de 13 nouvelles prisons et le renforcement de la formation des magistrats.

Selon l’orateur, le secteur de “la justice doit évoluer par la qualité et non par les chiffres”. à signaler enfin que l’hôte du forum a révélé que la Commission nationale des droits de l’homme compte se déplacer dans les écoles et établissements scolaires pour voir dans quelles conditions sont scolarisés les enfants.