Bien que le chef de l’Etat ait promulgué les lois organiques, les discussions autour des réformes politiques engagées par l’Algérie continuent de susciter le débat.
Ces réformes ne cessent de faire l’objet de critiques, même par ceux qui sont connus pour leurs applaudissements à tout ce qui vient d’en haut. Farouk Ksentini qui fait partie de cette catégorie estime que les lois organiques promulguées dans le cadre des réformes politiques «sont trop frileuses et par conséquent, elles doivent être améliorées».
Intervenant à l’émission «100% politique» de la Radio algérienne internationale, le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’homme (CNCPPDH), a considéré que «les lois sur les réformes politiques restent insuffisantes», affirmant qu’elles pouvaient être améliorées à l’avenir.
Ksentini a estimé nécessaire d’impliquer davantage les parties concernées dans l’élaboration des textes de loi relatifs aux réformes politiques, notamment le code de l’information. Selon lui, la loi organique relative à l’information n’apporte pas la satisfaction «voulue». Il a noté, à ce sujet, que «les journalistes n’ont pas été suffisamment consultés» estimant, à ce propos, que pour promulguer un «bon» texte de loi, il est impératif de consulter les premiers concernés par ce texte.
«Je constate que ce texte est frileux», a-t-il dit, soutenant toutefois qu’il «est préférable de ne pas insulter l’avenir et d’avoir le courage d’oeuvrer à son amélioration ». Ksentini a également émis un avis similaire au sujet de la loi sur les associations, un texte qu’il a aussi qualifié de «frileux». Il a estimé, à ce propos, qu’il est nécessaire d’avoir «le courage d’ouvrir la porte au lieu de la laisser entrouverte».
Pour Ksentini «une démocratie se mesure au nombre d’associations actives dans la société civile », car, a-t-il expliqué, ce sont ces dernières qui agissent sur le terrain et qui dénoncent les anomalies et les disfonctionnements.
LES REPENTIS ET L’ACTIVITÉ POLITIQUE
S’agissant des dispositions de la loi organique sur les partis politiques relatives à l’interdiction de l’activité politique des personnes directement impliquées dans la tragédie nationale, le président de la CNCPPDH a souligné qu’il s’agit d’une disposition explicite dans la Charte pour la paix et la réconciliation nationale.
Il a toutefois souligné qu’il est nécessaire de trancher définitivement la question du retour à l’activité politique des personnes impliquées dans la tragédie nationale, du fait que cette disposition «est antinomique » avec le code pénal qui limite l’interdiction d’exercice des droits civils et civiques à une personne à 10 ans. L’invité de la radio rappelle précisément que la Charte pour la paix et la réconciliation nationale ne comporte aucune disposition délimitant dans le temps la durée de cette interdiction.
M. Ksentini a plaidé en conséquence pour la levée de cette contradiction entre le Code pénal et la Charte. Par ailleurs, maître Ksentini a laissé entendre que certains repentis pourraient adhérer à des partis politiques. «S’il y a des repentis qui veulent adhérer à un parti ou souhaitent retrouver l’activité politique, la question doit être examinée au cas par cas», dit-il.
«LES EX-INTERNÉS DU SUD NE SONT COUPABLES DE RIEN»
Interrogé sur le sort des exinternés du Sud, il a estimé que ces personnes «ne sont coupables de rien» et qu’elles avaient subi un préjudice. Pour ce qui est des familles des disparus, Ksentini qui a réaffirmé que près de 95 % des ces familles ont été indemnisées, a reconnu qu’une fraction qui «n’est pas importante de ces familles refuse cette indemnisation ».
«C’est leur droit», a-t-il déclaré à ce propos, soulignant cependant que la CNCPPDH «ne peut pas faire plus de par les limites de son statut d’institution d’influence et non de décision». Le responsable de la CNCPPDH a ajouté que dans le cas des disparus , «l’Etat a pris en charge cette question sur le plan juridique, en les ralliant aux victimes de la tragédie nationale, et sur le plan humanitaire en les indemnisant».
«PAS DE DIVORCE POUR CEUX QUI NE DISPOSENT PAS DE LOGEMENT » !
Farouk Ksentini a relevé certaines «imperfections» dans le code de la famille. L’orateur a relevé qu’à l’état actuel du Code de la famille, une femme divorcée risque de se retrouver sans abri si son ex-mari ne dispose pas de logement et compte tenu de l’insuffisance de la pension qu’il doit lui verser et qui s’élève à 6 000 DA seulement.
Pour pallier ces défauts et pour mieux protéger la femme, Ksentini a proposé à «ne considérer comme recevables que les demandes de divorce émanant de maris qui prouvent au préalable et formellement qu’ils disposent d’un logement». L’intervenant a reconnu l’existence «de forces considérables de la régression», en Algérie. Il n’empêche qu’«il existe en Algérie aussi une société civile ainsi qu’une force importante, considérable et appréciable, capable de protéger et d’améliorer le Code de la famille», dit-il.
S. N. M.