Il aura fallu d’un banal mot prononcé ou attribué, allez savoir, pour que la guerre des mots soit enclenchée par voie de presse interposée entre Mohamed Laïb et Mahfoud Kerbadj. L’un accuse, l’autre dément ; l’un dit, l’autre nie, et voici qu’un simple malentendu est venu jeter un coup de grisou sur une amitié entre deux présidents née il y a plus de vingt ans. Confinés dans l’incompréhension, les deux présidents ont été réunis par Le Buteur dans ce face-à-face qui fait dire à chacun ses vérités, dans l’espoir prononcé de faire dissiper les malentendus.
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Kerbadj : «Mon amitié avec Laïb date de vingt ans, ce n’est pas un banal match qui va la gâcher»
M. Kerbadj, cette histoire de tribunes a pris des proportions inattendues qui risquent de nuire aux relations entre les deux clubs. Vous avez fait des déclarations, Laïb aussi. Le débat est-il à ce point impossible ?
Je dois d’abord dire que je n’ai jamais manqué de respect à l’USMH ni aux gens d’El Harrach. S’il y a quelqu’un qui devrait se plaindre, c’est moi. C’est plutôt Laïb qui m’a manqué de respect.
Lui dit ne jamais avoir prononcé ces déclarations ?
Quoi qu’il en soit, Laïb a toujours été un ami et le restera encore malgré tout ce qui a été rapporté ces derniers jours. J’ai toujours dit que nos amis d’El Harrach seront reçus dans la tribune nord du stade. Il n’a jamais été question d’employer le mot Poulailler. Mon éducation ne me permet pas de souhaiter la bienvenue à mes voisins dans le Poulailler comme cela a été rapporté çà et là. C’est un nom qui a été vulgarisé par les supporters. Je n’ai rien inventé. On l’appelle comme ça depuis 62.
Qu’est-ce qui s’est passé au juste ? Pourquoi les choses sont-elles arrivées là où elles en sont aujourd’hui ?
Les choses ne seraient jamais arrivées là si Laïb ne s’était pas attaqué gratuitement à ma personne. J’ai dit à tous les gens qui m’ont appelé d’El Harrach de patienter jusqu’à la réunion de jeudi avec l’espoir de trouver un compromis qui arrangerait tout le monde. On projetait d’octroyer une deuxième tribune à El Harrach. Mustapha Doumi, l’ex-président du Comité de supporters, peut en témoigner.
Mais Laïb affirme que vous n’avez pas pris la peine de répondre à ses appels pour s’expliquer…
Je vous jure que je n’ai reçu aucun appel émanant de Laïb. Ce n’est pas de mes habitudes de ne pas répondre aux gens au téléphone, alors là, les gens que j’apprécie ! Preuve en est, j’ai parlé à Doumi et d’autres personnes d’El Harrach.
Toutes les équipes avaient pour habitude de recevoir la deuxième tribune, pourquoi ce changement soudain ?
Cette décision n’a jamais été prise par rapport au Mouloudia ou le CRB comme pourraient le croire certains. C’est une décision que nous avons prise la saison dernière. On s’était entendus avec les membres du bureau de recevoir les supporters de l’équipe adverse dans la tribune nord. Sans plus et de mettre à la disposition de nos supporters les autres tribunes.
On a l’impression que vous comptiez au départ octroyer la deuxième tribune aux supporters de l’USMH et que vous aviez changé d’avis après les déclarations attribuées à Laïb à votre sujet…
Tout à fait. C’est comme ça que je voulais procéder au départ. J’étais persuadé qu’on allait trouver un compromis lors de la réunion de jeudi. Seulement, Laïb s’était précipité. Il s’était attaqué à ma personne gratuitement. Cela m’a conforté dans la décision prise la saison passée, c’est-à-dire octroyer la tribune nord à tous nos adversaires.
Vous voulez dire le Poulailler ?
Je préférerai l’appeler la tribune nord. Cette appellation a suscité beaucoup d’équivoque.
Il y a toujours ce pressentiment que Laïb vous a appelé et que vous avez préféré ne pas lui répondre par souci de ne pas vous mettre dans une situation embarrassante…
Je vous jure que non ! Je n’ai pas reçu d’appel de lui. Peut-être qu’il m’a appelé d’un autre numéro qui m’était étranger et encore cela m’étonnerait fort dès lors que j’avais répondu à tous les appels, y compris ceux que je ne reconnaissais pas.
Cette situation ne risque-t-elle pas de gripper les relations entre vos deux clubs ?
Jamais ! D’autant plus que vous venez de m’apprendre que Laïb a démenti avoir dit de moi que je n’avais pas l’étoffe de présider un club du standing du CRB. A mon tour, je dirai que Laïb restera mon ami et que rien ne pourrait changer ça. Cela fait plus de 21 ans qu’on se connaît. Nous avons travaillé ensemble en dehors du football et ce n’est pas un banal match qui va tout remettre en cause.
Pourquoi l’USMH n’a pas été conviée à la réunion tenue ce matin (hier, ndlr) à l’APC de Hussein Dey ?
Je ne le sais pas. Sincèrement, j’ignore pourquoi El Harrach n’a pas été convié à cette réunion. Ce n’est pas moi qui adresse les invitations ni la direction du CRB. Il faut voir avec qui de droit.
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Laïb : « Je n’ai jamais déclaré que Kerbadj n’avait pas de personnalité»
M. Laïb, vous avez été l’auteur de déclarations incendiaires à l’égard de votre homologue du CRB, Mahfoud Kerbadj, que vous avez traité de président sans personnalité, trop incompétent pour diriger un club du standing du CRB. Confirmez-vous vos dires ?
J’ai, en effet, répondu à l’invitation d’un quotidien. Je me suis exprimé sur le derby de samedi, mais à aucun moment, je n’ai proféré de déclarations incendiaires, comme vous dites, qui pourraient porter atteinte à l’intégrité de mon ami Mahfoud (Kerbadj, ndlr). Je n’ai jamais pensé une chose pareille de lui. Alors-là, le dire… mon respect pour lui ne me le permettra jamais. Et puis, je ne peux apporter un jugement sur un président ou son club pour la simple raison que je ne m’occupe que de ce qui me regarde. Or, ce qui se passe au CRB ne me regarde ni de près ni de loin.
Peut-on connaître alors la teneur exacte de vos déclarations ?
J’ai juste dit que j’ai été étonné par les déclarations de Kerbadj, qui avait annoncé dans la presse qu’il allait réserver le Poulailler à nos supporters. J’ai dit qu’il ne nous a pas respecté. J’ai dit aussi que je m’attendais à ce qu’on nous octroie la deuxième tribune, comme c’est le cas à chaque fois que nous jouons au 20-Août.
Ça vous a exaspéré ?
Oui, beaucoup. Je n’ai pas du tout aimé lorsqu’il a dit que les supporters d’El Harrach devront supporter leur équipe depuis le Poulailler. Je trouve que c’est un manque de respect pour nos supporters et le club tout court. Nous ne sommes pas des poules pour qu’on nous enferme dans le poulailler. Déjà, cette tribune est trop petite pour contenir tous nos supporters, et puis c’est un manque de respect que d’utiliser le mot Poulailler. J’ai été déçu.
Par le fait qu’il n’ait pas répondu à vos appels téléphoniques, n’est-ce pas ?
Tout à fait. Je l’ai appelé à maintes reprises avec mon téléphone personnel, mais il n’a pas daigné me répondre. J’ai été étonné qu’il ne m’ait pas rappelé au nom de cette longue amitié qui nous unit. Je ne m’attendais pas à ça de lui.
Ce n’est pas ce qu’il dit…
Et qu’est-ce qu’il dit ?
Qu’il n’a jamais reçu vos appels…
Je vous jure que je l’ai appelé, et mes collaborateurs peuvent en témoigner. On était ensemble dans mon bureau lorsque je l’ai appelé une dizaine de fois sans qu’il ait daigné me répondre. Je l’ai appelé de mon numéro personnel, qui figure dans son répertoire, il ne peut pas le nier dès lors que je l’ai appelé plusieurs fois auparavant. Il n’a pas respecté cette amitié qui nous unissait dès lors qu’il n’a pas daigné répondre à mes appels. Il n’avait qu’à me dire : «Ya si Mohamed, je ne pourrais pas vous octroyer la deuxième tribune, au revoir et merci !» On aurait clos le sujet tout en respectant notre amitié. On aurait fait de même au match retour en vertu du principe de réciprocité. Ainsi, notre amitié n’aurait été jamais écornée. Il aurait dû me le dire dans le blanc des yeux. Au lieu de cela, il s’est dérobé. C’est ça, en fait, que je n’ai pas apprécié.
Supposons que Kerbadj aurait répondu à vos appels et refusé d’accéder à votre demande, vous seriez toujours amis ?
Absolument. On restera amis loin du football, sans plus, car dorénavant, on ne s’entendra plus sur rien. Je leur rendrai la pareille au retour. Ils n’auront pas la deuxième tribune et advienne que pourra. J’ai lu récemment ses déclarations sur son votre journal où il disait qu’il respectait beaucoup les gens d’El Harrach, un quartier où il avait fait ses études et où il fait encore son marché. Moi, je dis qu’il n’a pas du tout respecté tous ces gens-là par ses déclarations. Il aurait dû laisser le match se jouer sur le terrain et que le meilleur l’emporte !
Vous ne pensez pas que cette histoire risque de mettre à mal les relations entre les deux clubs ?
C’est ce que je crains, justement. Ce serait malheureux qu’une histoire de tribunes nuise aux relations entre nos deux clubs. C’est pour ça que je continue à dire qu’il aurait dû me répondre au téléphone pour régler ça avant que ça n’aille plus loin. J’espère qu’il en assumera les conséquences.
Il dit que l’invitation à la réunion lui a été parvenue de la mairie de Hussein Dey et que ce n’est pas lui qui les envoie…
L’APC ne peut lui adresser à lui seul une invitation et nous ignorer nous. Le match se jouera entre deux équipes. L’APC ne peut pas nous ignorer. C’est du n’importe quoi !
Lui tiendrez-vous rancune ?
Non, mais je veux qu’il sache que son comportement m’a déçu.
Le CRB aura-t-il la deuxième tribune au retour ?
Non !