Face au risque d’effondrement, des solutions urgentes doivent ĂȘtre mises en Ɠuvre Vieux bĂąti : ces demeures de… la mort !

Face au risque d’effondrement, des solutions urgentes doivent ĂȘtre mises en Ɠuvre Vieux bĂąti : ces demeures de… la mort !
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Les experts s’accordent Ă  dire que le fait que l’épicentre du sĂ©isme de magnitude de 5,6 de vendredi dernier soit situĂ© en mer, Ă  19 km au large de Bologhine, a sauvĂ© ces vulnĂ©rables maisons contre tout effondrement ou du moins
 a retardĂ© leur Ă©boulement !

De par le monde, d’innombrables pathologies emportent avec elles des vies humaines, les accidents de la route fauchent des millions de personnes, sĂ©ismes et inondations causent des centaines de victimes et les guerres continuent de faire des milliers de morts. En AlgĂ©rie, c’est le vieux bĂąti et l’habitat prĂ©caire qui occupent une des places prĂ©pondĂ©rantes dans le classement macabre des causes Ă  l’origine de centaines de dĂ©cĂšs, dĂ©plorĂ©s chaque annĂ©e Ă  travers le territoire national.

Bab El-Oued, La Casbah, Belouizdad, Hassiba
 Ă  Alger, Gambetta et El-Hamri Ă  Oran, Constantine, Annaba
 autant de quartiers, de rues et de ruelles, théùtre de scĂšnes funestes aux images dĂ©chirantes, bouleversantes, montrant des familles entiĂšres ensevelies sous les dĂ©combres d’une habitation suite Ă  un effondrement fatidique. Ces citĂ©s anciennes, oĂč il faisait jadis bon vivre, ont atteint aujourd’hui un seuil de dĂ©gradation et de vĂ©tustĂ© intolĂ©rable. Ces demeures de
 la mort ravissent, tous les ans, au moindre Ă©croulement, des dizaines de leurs occupants. Les locataires vivent avec cette hantise de se retrouver eux-mĂȘmes ou de dĂ©couvrir leurs voisins, un jour, sous les gravats de leurs immeubles qui menacent ruine.

La sonnette d’alarme tirĂ©e, l’alerte donnĂ©e, le SOS lancĂ©, les pouvoirs publics avisĂ©s
 mais en vain. Les rĂ©sidents en appellent au Bon Dieu, dans ces maisons hantĂ©es qui exhalent l’odeur de la peur, celle de la mort ! Une pluie battante ou une secousse tellurique de faible intensitĂ© ou simples travaux d’amĂ©nagement et d’extension inopportuns suffisent pour voir tout un immeuble disparaĂźtre et emporter avec lui ses propriĂ©taires.

Les spĂ©cialistes s’accordent Ă  dire que le fait que l’épicentre du sĂ©isme de magnitude de 5,6 de vendredi dernier soit situĂ© en mer, Ă  19 km au large de Bologhine, a sauvĂ© ces vulnĂ©rables maisons contre tout effondrement ou du moins
 a retardĂ© leur Ă©boulement ! Car, faut-il le prĂ©ciser, la prĂ©caritĂ© de ces habitations a atteint une proportion alarmante ! Le danger guette leurs occupants au quotidien
 De maniĂšre cyclique, l’on enregistre rĂ©guliĂšrement des immeubles qui tombent tel un chĂąteau de cartes et causent des dĂ©cĂšs devant le regard impuissant des locataires.

Chaque jour, en hiver notamment, l’on annonce un dĂ©cĂšs de plus
 un dĂ©cĂšs de trop ! Des experts trĂšs au fait de ce qui se dĂ©cide dans ce domaine ont fignolĂ© des Ă©tudes, Ă©tabli un constat et suggĂ©rĂ© des solutions Ă  cette Ă©pineuse problĂ©matique. Leurs recommandations, en revanche, sont restĂ©es lettre morte. Le parc immobilier dont dispose le pays est estimĂ©, selon les statistiques avancĂ©es par ces professionnels, Ă  5 millions de logements dont 1,5 millions d’unitĂ©s qui menacent ruine Ă  travers le territoire national. Tout ce parc diminue inexorablement Ă  cause des catastrophes naturelles dont le sĂ©isme et les “agressions” de l’homme. La main du locataire, lui-mĂȘme, il faut le reconnaĂźtre, n’est pas innocente.

Les amĂ©nagements, pourtant interdits par la loi, qui sont opĂ©rĂ©s y sont pour beaucoup dans ce dĂ©sastre. Ce qui fragilise davantage ces immeubles. La vulnĂ©rabilitĂ© du vieux bĂąti s’accroĂźt ainsi car, il n’est non seulement pas entretenu, mais en plus subit des modifications, des adaptations dĂ©cidĂ©es de maniĂšre unilatĂ©rale par les occupants. Les bĂątiments suivent un processus de dĂ©gradation physique permanent Ă  cause de leur usage abusif et sous l’effet de l’environnement extĂ©rieur, surtout les paramĂštres climatiques tels que le soleil, la pluie, la chaleur, le froid


Revenir au systùme universel de gestion des immeubles à travers le syndic ou l’administrateur

Il est important de comprendre qu’il ne suffit pas de construire du neuf, mais d’en assurer rĂ©guliĂšrement l’entretien et la maintenance, affirme Abdelhamid Boudaoud, expert architecte. Pour lui, tout logement ou Ă©quipement a une durĂ©e de vie et il est sujet pĂ©riodiquement Ă  une usure qu’il y a lieu d’entretenir dans le cadre d’un programme concret de suivi et rĂ©habilitation. D’oĂč la nĂ©cessitĂ©, propose-t-il, de doter chaque bĂątiment d’un carnet de santĂ©. Plusieurs bĂątisses rĂ©alisĂ©es dans les annĂ©es 1970 et 1980 ont vieilli par manque d’entretien.

Des vies humaines sont menacĂ©es Ă  cause du risque, Ă  tout moment, d’affaissement des bĂątisses. M. Boudaoud juge opportun de revenir au systĂšme universel de gestion de ces immeubles fondĂ© sur des bases liĂ©es Ă  la conciergerie, le syndic ou l’administrateur. Que tous ces mĂ©tiers soient rĂ©habilitĂ©s pour une meilleure gĂ©rance de ces espaces. D’autres statisticiens indiquent que sur les 6,7 millions de logements recensĂ©s, 17% sont des immeubles collectifs, 55% des constructions individuelles qui ouvrent droit Ă  des aides pour leur confortement, 20% des constructions traditionnelles de type Casbah et 8% englobent l’habitat prĂ©caire recensĂ© essentiellement au Sud et les bidonvilles.

Des chiffres qui Ă©manent d’un rapport finalisĂ© par le ministĂšre de tutelle en 2008 rĂ©vĂšlent qu’en 1966, l’AlgĂ©rie a hĂ©ritĂ© de 1,9 million de logements. Le parc avoisine de nos jours les 7 millions d’unitĂ©s. Par consĂ©quent, moins de 40% des logements ne dĂ©passent pas 40 annĂ©es d’ñge. L’État a dĂ©gagĂ©, il y a plus de 6 ans, une enveloppe qui avoisine les 860 millions de dinars, pour Ă©tablir un diagnostic de ces anciennes habitations, notamment dans les grandes villes du pays, Ă  savoir Alger, Oran, Annaba et Constantine.

À Alger, 70 000 logements sont concernĂ©s par ces Ă©tudes d’évaluation, soit avant leur dĂ©molition, soit avant leur confortement. Une autre Ă©tude rĂ©alisĂ©e il y a quelques annĂ©es montre que le parc immobilier, notamment celui situĂ© au nord du pays, reste vulnĂ©rable.

Il est devenu, au fil des annĂ©es, vĂ©tuste et trop fragile. Un patrimoine de prĂšs de 2 millions de logements nĂ©cessite une rĂ©habilitation en urgence. Sur un ensemble de 4 millions d’appartements, 50% sont vieux et demandent une prise en charge par une restauration immĂ©diate. Si les 35% du parc construits avant 1948 et les 20% entre 1949 et 1977 sont vĂ©tustes, il n’en demeure pas moins que ceux Ă©difiĂ©s entre 1969 et 1987 sont dans un Ă©tat de dĂ©gradation critique. Ce vieillissement prĂ©maturĂ© a Ă©tĂ© provoquĂ© par l’abandon dont ont fait l’objet ces habitations.

L’absence d’administrateurs de biens depuis des dĂ©cennies a engendrĂ© des problĂšmes d’entretien dus Ă  la surexploitation des immeubles, au taux d’occupation par logement (TOL) Ă©levĂ© et aux insuffisances dans la gestion et la maintenance du parc immobilier. Plus de 1 530 immeubles recensĂ©s avant mai 2003 Ă  Alger nĂ©cessitaient une intervention. Si le vieux bĂąti est entretenu, il ne constituera pas un danger pour les populations. La daĂŻra de Sidi-M’hamed reprĂ©sente le patrimoine le plus vĂ©tuste au plan national. Son parc n’a pas subi d’entretien depuis 1962.

D’autres observateurs indiquent qu’à la suite des inondations de 2001 et du sĂ©isme de BoumerdĂšs en 2003, plus de 80% des immeubles recensĂ©s qui ont plus de 50 ans d’ñge menacent ruine. Sur les 57 communes que compte Alger, 8 disposent d’immeubles qui prĂ©sentent un grand danger pour les habitants. On peut citer La Casbah, dont la vĂ©tustĂ© des bĂątisses est plus perceptible, Bab El-Oued, El-Madania, Sidi-M’hamed, Belouizdad, Hussein-Dey et El-Harrach.

2 millions de logements nécessitent une rénovation en urgence

Selon un diagnostic du CTC, les bĂątisses sont classĂ©es par niveaux : la classe I reprĂ©sente 15% des bĂątisses menacĂ©es ; la classe II celles qui sont en dĂ©gradation critique, soit 52% des bĂątisses menacĂ©es ; La classe III reprĂ©sente 30% ; et enfin la classe IV 1% seulement. Le parc immobilier dans la wilaya d’Alger souffre d’une vĂ©tustĂ© prĂ©occupante. Les logements qui ont Ă©tĂ© rĂ©ceptionnĂ©s vers la fin des annĂ©es 1980 sont Ă©galement soumis Ă  cet alĂ©a du fait de la non-conformitĂ© de leur rĂ©alisation par rapport aux normes techniques prĂ©vues par le RĂšglement parasismique algĂ©rien de 2003 (RPA 2003).

Il devient, de ce fait, impĂ©ratif d’inciter les autoritĂ©s locales et les OPGI Ă  rĂ©habiliter une partie de ce patrimoine immobilier vĂ©tuste en parallĂšle avec des nouveaux programmes de logements. Les pouvoirs publics sont tenus de se pencher ainsi de maniĂšre efficace sur ce sujet nĂ©vralgique que constitue la maintenance des immeubles, notamment au niveau des grandes villes. Dans ce contexte, une nouvelle stratĂ©gie doit ĂȘtre adoptĂ©e pour qu’à l’avenir, la rĂ©alisation de logements neufs ou des Ă©quipements se fasse de pair avec la rĂ©habilitation des vieilles bĂątisses.

L’entretien pĂ©riodique de ces immeubles consiste Ă  veiller au bon fonctionnement des conduites d’eau, de gaz et d’électricitĂ©, l’état de l’étanchĂ©itĂ© des terrasses, la peinture et le revĂȘtement. Et l’absence de ces actions est pour une grande part responsable de la vĂ©tustĂ© de ces bĂątiments. Ceux situĂ©s sur la bande du littoral qui subissent la corrosion des embruns marins sont les plus ciblĂ©s. “Il est important de comprendre qu’il ne suffit pas de construire du neuf, mais d’en assurer rĂ©guliĂšrement l’entretien et la maintenance. Car tout logement ou Ă©quipement a une durĂ©e de vie et est sujet pĂ©riodiquement Ă  une usure qu’il y a lieu d’entretenir dans le cadre d’un programme concret de suivi et rĂ©habilitation”, avait soulignĂ©, en 2011, le CollĂšge national des experts architectes (CNEA) dans son Livre blanc.

Le CNEA, qui a Ă©tabli un constat peu reluisant du vieux bĂąti dans notre pays, propose l’Ă©tablissement d’une sorte de carnet de santĂ© du bĂątiment. Cet outil permettra, selon M. Boudaoud, prĂ©sident du CNEA, un meilleur entretien et un suivi idoine de ces immeubles. Pour cet expert, il est possible de prolonger davantage la durĂ©e de vie d’un bĂątiment dont la moyenne d’existence est de 50 annĂ©es. “La durĂ©e d’occupation et d’habitabilitĂ© d’un bĂątiment dĂ©pend de son entretien”, prĂ©cisera M. Boudaoud. Pour faire face Ă  la problĂ©matique du vieux bĂąti, le CNEA suggĂšre, au prĂ©alable, un recensement par les communes de tout leur patrimoine. Ensuite, il est utile, affirme-t-il, d’analyser les dĂ©faillances techniques du bĂąti et Ă©valuer les coĂ»ts.

ApprĂ©cier la qualitĂ© esthĂ©tique des bĂątiments et Ă©valuer l’usage actuel du logement est l’autre action que nĂ©cessite cette dĂ©marche de rĂ©habilitation. “RĂ©habiliter un immeuble ancien est une opĂ©ration complexe qui exige compĂ©tence, dextĂ©ritĂ© de la part des diffĂ©rents intervenants”, reconnaĂźt le prĂ©sident du CollĂšge. Toutes ces actions passent impĂ©rativement par une Ă©tude minutieuse qui prend en considĂ©ration tous les aspects pour Ă©tablir un diagnostic complet de la situation du cadre du bĂąti Ă  rĂ©habiliter.

Ce dernier doit ĂȘtre non seulement recensĂ©, mais aussi classĂ© par types, Ă  savoir la catĂ©gorie Ă  rĂ©habiliter, Ă  rĂ©nover et Ă  conforter, y compris celui Ă  dĂ©molir. Un tel objectif vise Ă  ressusciter l’Ăąme des quartiers et des immeubles. Ce qui, par consĂ©quent, attĂ©nuera un tant soit peu la pression sur la demande de logements neufs en offrant aux citoyens des immeubles anciens solides et un cadre de vie meilleur. La rĂ©habilitation incitera Ă©galement les habitants Ă  un usage meilleur des immeubles et leur donnera l’opportunitĂ© de rĂ©flĂ©chir Ă  l’accession Ă  la propriĂ©tĂ©.

AprĂšs avoir dressĂ© ce bilan, le CNEA propose aux responsables concernĂ©s la crĂ©ation d’un fonds national d’amĂ©lioration de l’habitat et le lancement d’un programme d’urgence de rĂ©habilitation du vieux bĂąti et de restructuration des anciens quartiers parallĂšlement aux constructions nouvelles projetĂ©es. La mise en place d’une assise juridique exigeant des propriĂ©taires du bĂąti une expertise technique, la rĂ©installation de concierges, d’administrateurs de biens, la spĂ©cialisation des entreprises dans les domaines de confortement, de rĂ©habilitation
 sont autant de recommandations Ă©mises par cette organisation et qui devraient constituer la politique nationale pour la prise en charge du vieux bĂąti.

Une enveloppe de 10 milliards de dinars a Ă©tĂ© dĂ©bloquĂ©e par l’État en 2012 pour la restauration, la rĂ©habilitation ou la dĂ©molition du vieux bĂąti dans les grandes villes d’AlgĂ©rie, notamment Alger, Oran, Constantine, Skikda et Annaba. Alger, oĂč prĂšs de 67 000 habitations nĂ©cessitent des travaux de rĂ©habilitation, de rĂ©novation ou de dĂ©molition, bĂ©nĂ©ficiait de la plus grosse enveloppe avec pas moins de 5 milliards de dinars dĂ©gagĂ©s et des travaux dĂ©jĂ  entamĂ©s. Oran recevait, quant Ă  elle, 2,5 milliards de dinars de budget allouĂ©. Les travaux dans les villes de Constantine, Annaba et Skikda ont Ă©tĂ© engagĂ©s, il y a deux ans, avec un budget de 1,5 milliards de dinars pour chacune des villes citĂ©es.

Les contraintes d’une rĂ©habilitation

Pour une telle opĂ©ration d’envergure, il est indispensable d’impliquer des entreprises et des bureaux d’études spĂ©cialisĂ©s. Cela nĂ©cessite Ă©galement l’adhĂ©sion de la population parce que l’entretien, la maintenance et la rĂ©habilitation du bĂąti, qui sont des actions permanentes, relĂšvent de la responsabilitĂ© des propriĂ©taires et des habitants. Un programme national de rĂ©habilitation du vieux bĂąti est inconcevable sans la participation de l’État et des propriĂ©taires.

Tous les techniciens sont unanimes Ă  dire que la rĂ©habilitation a besoin de nouvelles mesures rĂ©glementaires visant Ă  mettre les logements anciens aux nouvelles normes de confort, de sĂ©curitĂ© et surtout de respect de l’environnement pour avoir un cadre de vie harmonieux. Ce chantier restera ouvert longtemps de par la consistance du parc concernĂ©. C’est le moment ou jamais de contribuer Ă  l’amĂ©lioration du parc immobilier vĂ©tuste. D’oĂč l’opportunitĂ© de crĂ©er une Agence nationale de l’amĂ©lioration de l’habitat et dĂ©cider de rattraper le retard et de commencer les travaux dans les 1 541 communes du pays. Des normes de conformitĂ© des logements existant frappĂ©s par une vĂ©tustĂ© trop avancĂ©e doivent ĂȘtre ainsi mises en place.

Quant Ă  l’habitat indigne, son sort ne peut ĂȘtre que la dĂ©molition. AmĂ©liorer et entretenir un parc immobilier vĂ©tuste est trĂšs complexe, affirment les spĂ©cialistes, en raison de la diversitĂ© des Ăąges, des modes constructifs (diffĂ©rentes typologies) des immeubles et des solutions techniques Ă  mettre en Ɠuvre et surtout diffĂ©rents interlocuteurs c’est-Ă -dire maĂźtres d’ouvrage. Le coĂ»t des travaux Ă©tant trop Ă©levĂ©, est ce que les propriĂ©taires des immeubles apporteront leur contribution quand on sait que la location des logements ne dĂ©passe pas les 300 DA/mois ? Pis, l’ñge du parc de logements sociaux varie entre 30 et 100 ans.

À cela, il y a lieu d’ajouter les difficultĂ©s que rencontrent les OPGI, Ă  savoir le niveau trop bas des loyers, les dĂ©ficits et le recouvrement Ă©norme Ă  actualiser. Le problĂšme qui se pose aussi dans ces immeubles, c’est que 60% des occupants sont des copropriĂ©taires et 40% des locataires. Ce qui complique davantage l’action de restauration. Dans d’autres cas, les vĂ©ritables propriĂ©taires sont dĂ©cĂ©dĂ©s ou des Ă©trangers qui ont regagnĂ© leur pays d’origine.

D’oĂč le laisser-aller dont font l’objet ces bĂątisses. La rĂ©habilitation et la rĂ©alisation devront donc aller de paire dans le cadre d’une nouvelle orientation et stratĂ©gie incluant impĂ©rativement la maintenance. Les pouvoirs publics doivent de ce fait encourager les entreprises Ă  s’orienter vers la rĂ©habilitation. Des programmes spĂ©cifiques doivent ĂȘtre intĂ©grĂ©s pour permettre la formation des jeunes artisans pour des tĂąches de rĂ©habilitation. Les architectes doivent ĂȘtre, quant Ă  eux, responsabilisĂ©s pour garantir cette nouvelle orientation en proposant des Ă©tudes spĂ©cifiques suivant les matĂ©riaux de la rĂ©gion.

Les Ă©coles d’architectes auront, elles-aussi Ă  former des architectes spĂ©cialisĂ©s dans ce domaine. Sur un autre registre, le parc de logements trĂšs vĂ©tuste, est un terrain privilĂ©gie pour l’investissement. Le carnet de santĂ© qui sera rĂ©servĂ© Ă  chaque immeuble doit ĂȘtre intĂ©grĂ© dans le code civil ou ils seront dĂ©crites toutes ces obligations. Il est Ă  noter que le patrimoine immobilier vĂ©tuste est Ă©valuĂ© Ă  3,5 millions d’unitĂ©s Ă  travers le territoire national, tandis qu’à Alger, tout le parc est ciblĂ© par la vĂ©tustĂ© Ă  raison de 30 voire 40%. Une difficultĂ©, et non des moindres, peut, toutefois, contraindre le bon dĂ©roulement de cette opĂ©ration de rĂ©habilitation.

Il s’agit de l’absence d’entreprises qualifiĂ©es dans la restauration du vieux bĂąti. DĂ©faut d’entreprises, manque d’entretien et de conscience civique
autant de contraintes qui caractĂ©risent le fond du problĂšme du vieux bĂąti en AlgĂ©rie. En dĂ©pit d’une volontĂ© politique pour mener une vĂ©ritable campagne (de rĂ©habilitation) pour laquelle 10 milliards DA ont Ă©tĂ© dĂ©bloquĂ©s l’annĂ©e derniĂšre par l’État dans les grandes villes telles qu’Alger, Oran, Constantine, Skikda et Annaba, cette action d’envergure a enregistrĂ© un retard flagrant. Les travaux n’ont dĂ©marrĂ© qu’il y a Ă  peine quelques semaines, Ă  l’Ouest du pays surtout. Un retard essentiellement dĂ» Ă  l’inexistence d’entreprises et de bureaux d’études spĂ©cialisĂ©s dans la rĂ©novation, l’entretien et la rĂ©habilitation d’anciennes bĂątisses.

Et c’est pour cela que l’État a fait appel Ă  des sociĂ©tĂ©s italiennes, françaises, espagnoles et portugaises qui, elles, dĂ©tiennent le savoir-faire en la matiĂšre. La wilaya d’Alger a engagĂ© un vaste programme de rĂ©habilitation de son vieux bĂąti dont une importante enveloppe financiĂšre a Ă©tĂ© dĂ©gagĂ©e. À la citĂ© Oumekhlouf Mahmoud de Bourouba, construite dans les annĂ©es 1980, pour ne citer que cet exemple, la rĂ©habilitation notamment extĂ©rieure a concernĂ© 1 010 logements qui a coĂ»tĂ© une enveloppe globale de 122,9 millions de DA avec un dĂ©lai de rĂ©alisation de six mois. Cette action s’inscrit dans le vaste programme pris en charge par la direction de l’amĂ©nagement et de la restructuration

des quartiers (Darq) qui porte sur la réfection de 565 immeubles soit 11 049 logements répartis en 38 sites situés dans 21 communes de la wilaya. Les premiÚres circonscriptions administratives dont les travaux de réhabilitation sont actuellement en cours sont celles de Bachdjarrah, Baraki, Bourouba, Bouzaréah et Hydra.

Alger-Centre : restauration de 557 immeubles

Plusieurs projets sont en phase d’étude ou de lancement dans d’autres localitĂ©s de la capitale. LancĂ© en juin 2013 pour un dĂ©lai de 22 mois, le chantier suit un rythme de rĂ©alisation apprĂ©ciable, selon ses initiateurs. Dix grands boulevards du centre historique de la capitale connaissent ou sont appelĂ©s Ă  subir des travaux de rĂ©amĂ©nagement. On parle des boulevards Zighout Youcef, Krim Belkacem, Frantz Fanon, Didouche Mourad, Mohamed V, Larbi Ben M’hidi, Hassiba Ben Bouali, Colonel Amirouche, Asselah Hocine et la rue Docteur SaĂądane.

Ce sont des immeubles datant de l’époque coloniale et d’anciennes bĂątisses qui n’ont pas Ă©tĂ© restaurĂ©s depuis et qui risquent l’effondrement Ă  tout moment. Par ailleurs, l’on Ă©voque Ă  la wilaya un programme pour la rĂ©habilitation, en cinq phases, de 55 302 logements identifiĂ©s par l’étude de diagnostic technique et socioĂ©conomique rĂ©alisĂ© en 2006 et qui a portĂ© sur un parc de 13 690 immeubles (78 445 logements) rĂ©partis sur les 14 communes du centre-ville.

Les travaux de rĂ©novation en cours de rĂ©alisation Ă  Alger-Centre touchent prĂšs de 7 200 logements. La premiĂšre phase de ce programme porte sur la remise Ă  niveau de 11 810 unitĂ©s situĂ©es dans les immeubles des communes d’Alger-Centre, Sidi M’hamed et El-Mouradia. Une importante enveloppe financiĂšre de 5 milliards de DA a Ă©tĂ© consacrĂ©e pour la rĂ©habilitation de 7 200 logements. Le problĂšme du vieux bĂąti est pris en charge non seulement par les services de la wilaya, mais Ă©galement par l’APC d’Alger-Centre. La commune a lancĂ© une premiĂšre tranche des travaux de remise en Ă©tat qui vont concerner des dizaines d’immeubles vĂ©tustes. Cette restauration va prolonger leur durĂ©e de vie de plusieurs annĂ©es encore.

L’APC a dĂ©gagĂ© une enveloppe de 100 milliards de centimes. Des rajouts financiers seront effectuĂ©s au fur et Ă  mesure. Ces travaux concerneront tous les immeubles qui se trouvent aux alentours de la rue Tanger, et porteront principalement sur la restauration des balcons et des planchers. La liste des immeubles qui vont bĂ©nĂ©ficier de ces travaux a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©e suite aux dolĂ©ances des citoyens qui y habitent. Tous les bĂątiments qui se trouvent dans cette zone sont vĂ©tustes. Les planchers des appartements s’usent avec le temps. Quant aux escaliers, ils reprĂ©sentent un danger avĂ©rĂ© pour les rĂ©sidants. Les murs des bĂątiments sont marquĂ©s par des fissures qui laissent entrevoir l’intĂ©rieur des appartements.

Les balcons ne tiennent qu’à une petite barre de fer ! Il arrive souvent que des parties tombent sur les toits des voitures ou sur les passants. La chute des balcons est aggravĂ©e par les intempĂ©ries. “À chaque chute de pluie, nous nous attendons au pire. Les logements sont devenus tellement fragiles qu’ils risquent de s’effondrer Ă  la moindre chute de pluie aussi brĂšve soit-elle”, dĂ©plore les habitants de ces quartiers. À l’intĂ©rieur des appartements, regrettent-ils, le plancher s’incline et s’affaiblit progressivement mais dangereusement sous le poids du mobilier et peut cĂ©der Ă  tout moment.

Outre l’APC d’Alger-Centre, presque toutes les communes de la capitale sont concernĂ©es par ce problĂšme, notamment celle d’El-Harrach oĂč 90% des immeubles que compte le centre-ville ont plus de 150 ans d’ñge. L’autre quartier qui a subi les affres du tremblement de terre du vendredi dernier n’est autre que la Casbah d’Alger. Le plan de sauvegarde de la citadelle prĂ©voit la protection de quelque 400 maisons qui menacent ruine, pourtant toujours occupĂ©es par plus de 50 000 habitants. La premiĂšre phase de l’élaboration du plan permanent de sauvegarde de la Casbah d’Alger a Ă©tĂ© achevĂ©e.

LancĂ© en 2007, ce plan se veut un instrument juridique, Ă©laborĂ© par une Ă©quipe de 25 experts de diffĂ©rentes spĂ©cialitĂ©s. Il s’agit d’une Ă©tude approfondie de ce quartier Ă  laquelle se sont attelĂ©s des sociologues, des Ă©conomistes, des architectes, des urbanistes, des historiens, des archĂ©ologues
 Ces spĂ©cialistes ont Ă©tabli un diagnostic du patrimoine et ont pu dĂ©tecter son mal. À partir de ce constat, ils agiront de sorte Ă  ce qu’ils puissent sauvegarder ces habitations. Pour l’exĂ©cution de cette opĂ©ration, l’État a dĂ©bloquĂ©, il y a trois ans, une enveloppe de 600 millions de DA.

Des opĂ©rations seront ainsi entreprises pour gĂ©rer les canalisations d’eau, combler les parcelles vides, lutter contre les constructions illicites et interdire l’utilisation du bĂ©ton et de l’aluminium. Environ 394 maisons ont d’ores et dĂ©jĂ  subi une action de renforcement et de confortement, en attendant leur restauration dĂ©finitive.

B. K.