Intrigant, incompréhensible le silence de Hocine Aït Ahmed. Alors que son parti, le FFS, est confronté à une crise interne sans précédent, le leader historique du parti d’opposition préfère répondre par… le silence.
Pourtant, les contestataires de la direction actuelle, des ténors du parti, ne cessent de l’inviter à prendre position sur ce qui se passe au FFS. Est-ce une manière de mettre en quarantaine les détracteurs de la direction actuelle ? Pas si sûr. Aït Ahmed est certainement en train de prendre la température au sein du parti et évaluer le bien-fondé de la démarche des frondeurs. Aït Ahmed ne réagit pas vite. Il prendra le temps qu’il faudra pour se prononcer. Ainsi, depuis sa dernière sortie, appelant à sanctionner les «tentatives internes de déstabilisation du parti» durant les dernières législatives, le président du FFS, Hocine Aït Ahmed, n’a fait aucune déclaration. Même ses traditionnels messages, analysant la situation politique et économique du pays, ont disparu. Ses orientations sont mises en exécution. Des cadres du parti ont été sanctionnés. La fronde s’est élargie aussi. Les sanctions semblent faire lever un véritable vent de révolte dans la maison du plus vieux parti d’opposition algérien. La réunion des contestataires jeudi dernier dans la wilaya de Tizi-Ouzou était une véritable démonstration de force. La crise n’est pas passagère. Elle prend de l’ampleur, puisque la cause de Karim Tabou et ses camarades trouve d’autres sympathisants. D’anciens cadres du FFS, à l’image de Djamel Zenati (ex-directeur de campagne d’Aït Ahmed à la présidentielle de 1999, Samir Bouakouir, Mustapha Bouhadef, Karim Tabbou, Djoudi Mammeri et Ali Kerboua, se sont retrouvés à Tizi Ouzou, en présence de nombreux élus et militants, contestataires face à la direction du parti. En tout, ils viennent de neuf wilayas. Les contestataires ont exprimé «leur détermination à poursuivre la mobilisation pour la sauvegarde du FFS, son unité et sa cohésion, et la réaffirmation claire de sa ligne politique originelle», indique un communiqué rendu public vendredi. Ces cadres et militants, qui ont appelé à un grand meeting populaire le 12 juillet prochain à Tizi Ouzou, dénoncent «l’arrogance et le sectarisme d’une direction, instrumentalisée par certains cercles du pouvoir, plus prompts à prononcer des ‘’fetwas staliniennes’’ et à établir des listes noires de triste mémoire qu’à répondre aux appels au rassemblement et à l’ouverture d’un vrai débat démocratique». Selon les contestataires, «l’impasse politique, consécutive au coup de force du 10 mai, est totale». «Aucun signe, aucun acte, ne laisse supposer une volonté d’engager le pays dans une transition démocratique. Notre pays demeure l’otage d’une mafia politico-financière qui a fait main basse sur les richesses du pays, les dilapidant dans une impunité totale, hypothéquant ainsi l’avenir de générations entières», écrivent-ils. Après avoir assisté à la réunion, l’ex-Premier secrétaire du FFS, Karim Tabbou, s’est retiré pour protester contre la présence des «frondeurs de 2006» qui ont mené, selon lui, un travail de sape au sein du parti. «Nous avons convenu de travailler sur la base de la lettre adressée par les cadres et les militants à Hocine Aït Ahmed. Je ne veux pas que l’action soit une bataille organique pour le contrôle de l’appareil. Je ne suis pas dans une logique de règlement de comptes, mais je reste engagé pour rendre au FFS sa ligne politique originelle», a déclaré Karim Tabbou. Malgré les appels incessants des contestataires, Aït Ahmed préfère entretenir le silence. Que pensent-ils du bras de fer qui oppose les deux partis ? Reviendra-t-il, lui qui s’est installé en Suisse, pour régler ce conflit ? Autant de questions qui attendent des réponses et qui bouleversent la base militante.
Par Mehdi Ait Mouloud