Malades mentaux, SDF, mendiants…sillonnent les rues d’Alger, ainsi que beaucoup d’autres villes du pays, sans gîte ni couvert, en ce début d’hiver glacial, devant l’oeil nonchalant des pouvoirs publics.
Ponts, cages d’escaliers, caves, mosquées…tels sont les endroits fréquentés par les sans abris ; ou à défaut, devant les bars pour titiller les compassions des saoulards. Les entrées des restaurants sont également prisées.
Les propriétaires des bistrots, ceux ayant le coeur sur la main, leur jettent de temps à autre les restes des clients, sinon ils se contentent d’un croûton de pain. Depuis des années, cette frange dénuée de la société, brave les dangers de la vie, entre maladie et pauvreté, pour pouvoir tenir la tête hors de l’eau.
Mais ce n’est pas pari réussi, vu la rudesse des hivers ces dernières années. Les bâches ne suffisent plus pour empêcher la pluie de pénétrer les fibres des couvertures, et les restes de nourriture ramassés sur les décharges publiques ne seront plus en mesure de répondre à l’apport journalier nécessaire pour le corps. La dernière vague de froid qu’a connue le pays depuis plus d’un mois en est la preuve.
La rue de la Liberté à Alger pullule de SDF. En empruntant ce chemin, les passants se font interceptés pour faire don d’une pièce. » Je n’ai pas mangé depuis trois jours « , nous jette un homme d’une quarantaine d’années. Chacun a son histoire, aussi différente les unes que les autres.
Le quarantenaire, nommé Samir, dit être victime de ses soeurs qu’il qualifie de » sorcières « . » Il y a peu de temps, j’étais marié et j’avais un toit sous la tête. Mais, mes soeurs ont mené la vie dure à ma femme, alors j’ai dû la défendre. C’était l’erreur fatale. Mon épouse est chez ses parents et moi, je me retrouve à la rue.
Car la maison est au nom d’une de mes soeurs », nous raconte-t-il, retenant difficilement ses larmes. La rue Didouche abrite des dizaines de sans abris, parmi eux une jeune fille d’à peine 25 ans, avec une histoire aussi affligeante que la première. Cette dernière, s’est faite répudiée par ses parents après avoir commis l’irréparable.
Depuis, elle n’a que ses larmes pour se réchauffer. « Je préfère encore mourir que de retourner chez moi « , nous confiat- elle en sanglotant. De coutume, la Direction des actions sociales (DAS) passe ramasser ces démunis dès l’entame de la saison hivernale, cette année, leurs interventions se font rares.
La dernière vraie action en faveur des SDF remonte à la fin du mois de Ramadan. Par ailleurs, certains sans abris préfèrent élire domicile dehors qu’occuper les espaces mis à leur disposition. A croire qu’ils préfèrent la maladie, la faim et le froid aux conditions que leur offrent ces centres. Se plaignant d’être battus par les malades mentaux ou déplorant l’étroitesse des lieux.
Mais ce choix coûte la vie à un bon nombre d’entre eux, particulièrement en hiver. A cet égard, il est à noter qu’un soixantenaire a été retrouvé mort la semaine écoulée, dans une chambre que lui ont cédée certaines âmes charitables, à Hassi Messaoud.
Le défunt est mort par hypothermie, d’après une source concordante. Un autre trentenaire a été retrouvé avant-hier au bas côté d’une rue, en plein centre-ville de Sidi Bel Abbès. La cause de la mort est la même que le vieil homme. Le laisser-aller des autorités compétentes fauchent non seulement la vie à un bon nombre de sans abris, mais porte aussi atteinte à la beauté des grandes villes du pays, sensées attirer les touristes.
Car, ces miséreux laissent leurs effets jonchés à même les trottoirs pendant qu’ils cherchent leur nourriture. Nos tentatives d’entrer en contact avec le ministère de la Solidarité durant la journée d’hier, se sont avérées vaines, malgré notre insistance.
K.S