Pour arracher cette interview à Sofiane Feghouli, il nous a fallu patienter longtemps. Non pas parce que le joueur et son conseiller ont voulu snober les journalistes, mais parce que Sofiane est d’abord peu bavard, comme il nous l’a précisé lors de notre rencontre, mais aussi et surtout, en raison de son envie de parler sur le terrain ! «C’est ma marque de fabrique», nous a-t-il dit. Et puis, Feghouli fait partie de ces joueurs qui n’avancent jamais au gré des opportunités. «Une sélection en Equipe nationale, c’est un honneur à mériter», précise-t-il, pour expliquer son arrivée «tardive» chez les Verts. Mais franchement, a-t-on le droit de dire cela à un jeune de 21 ans ? Forcément non, même si les gens ont tendance à exiger toujours plus des génies de son espèce.
«Je voulais être sûr d’apporter un plus à l’Equipe nationale»
En fait, la réponse exacte du timing choisi pour honorer sa première sélection chez les Verts, Feghouli nous la donne sans détour. «Je voulais être sûr d’apporter un plus à l’EN.» Il est vrai que Feghouli n’avait encore rien prouvé au plus haut niveau pour endosser une telle responsabilité. Aujourd’hui, il croit humblement être prêt pour l’aventure de son rêve de gamin pour ressembler à ses idoles algériennes que sont les Belloumi et Madjer, mais surtout Djamel Belmadi qui le rendait si fier d’être Algérien, quand il était la vedette de l’Olympique de Marseille. C’est pour cela qu’il a décidé d’attendre d’assurer d’abord une place de titulaire avec un club majeur du football européen, avant de commencer à s’exprimer dans les médias de son pays. Au final, cet honneur est revenu au Buteur et El Heddaf qui ont été choisis pour recueillir les premières déclarations de Sofiane Feghouli en tant qu’international algérien. Une confiance renouvelée, après avoir été choisis pour ses premières déclarations faites sur l’Algérie en avril 2008, à Grenoble.
Avec un tee-shirt de Muhammad Ali
Rendez-vous a été donc pris à Valence pour un reportage et une interview qui prendront une après-midi entière, jusqu’à la tombée de la nuit. C’était au lendemain du match de Ligue des champions entre le FC Valence et le Bayer Leverkusen. La coutume chez les Feghouli, c’est de recevoir, à l’algérienne, un compatriote qui vient du bled. C’est une habitude que Sofiane a tenu à perpétuer. C’est donc chez lui, dans une résidence luxueuse, qu’il nous a reçus chaleureusement. Et dès qu’il s’est présenté devant nous, notre regard s’est figé sur un tee-shirt floqué de la photo du légendaire boxeur Muhammad Ali : un gagneur, de surcroît musulman. «S’il n’était pas tout cela, je n’aurais jamais acheté ce tee-shirt», nous dit Feghouli pour valoriser un peu plus son modèle. Après une séance photos et quelques questions posées au bord de la belle piscine de la résidence, nous voilà à Paterna, le centre d’entraînement du FC Valence, pour finir une mission délicate, mais ô combien importante. Celle de vous présenter l’un des meilleurs joueurs algériens du moment. Une interview que vous aurez le loisir d’apprécier aujourd’hui et le lendemain de l’Aïd Al Adha.
Bismillah avant chaque réponse
Tout au long de notre discussion avec Sofiane Feghouli, une chose nous a marqués : le joueur de Valence invoquait Allah à chaque fois qu’on redémarrait l’interview (qui a pris un peu plus d’une heure de temps), toutes ses réponses étaient précédées par un très touchant «Bismilllah», si silencieux qu’on avait beaucoup de peine à le percevoir. Sa maman, que nous avions rencontrée avant lui, nous avait dit vrai : «Sofiane est quelqu’un de très pieux». Ainsi, et malgré son statut de joueur professionnel évoluant au sein d’un des meilleurs clubs d’Espagne et d’Europe, Feghouli n’a jamais oublié d’où il venait et qui il était. Cette humilité, vous allez la découvrir tout au long de cette interview. Et pour l’avoir approché de près, on peut vous assurer que l’Algérie a gagné non seulement un grand joueur, mais aussi un personnage très attachant. C’est cela l’autre marque de fabrique de Feghouli. Celle des génies naissants de son espèce.
Pour commencer, pourriez-vous nous parler un peu de vos attaches familiales en Algérie ?
Eh bien, mon père est originaire de Tiaret et ma mère de Ghazaouet. J’en garde de très bons souvenirs, quand j’y allais pour les vacances. C’était toujours très agréable d’aller voir la famille et le pays. Mais avec le temps, je n’ai pas eu la chance d’y retourner souvent, pour une raison ou une autre. Surtout quand on entame une carrière de footballeur professionnel, ça devient très difficile. Sinon, j’ai toujours été en contact avec le pays et ce qui s’y passe.
Quels sont les contacts que vous avez eus avec le football algérien, avant le Mondial ?
Si vous voulez, je n’ai pas eu de contact direct personnellement, mais c’est par le biais de mon conseiller. Je crois que c’est le président de la fédération qui était en contact avec lui. Mais à ce moment-là, j’avais un gros problème au genou. J’étais donc convalescent et je ne me sentais vraiment pas prêt à prendre une telle décision. J’avais envie de progresser avant de pouvoir prétendre à un tel honneur.
Peu de joueurs auraient refusé de jouer un Mondial. Cela ne vous a-t-il pas tenté ?
Il y avait d’abord cette blessure que je viens d’évoquer, mais aussi le fait que je n’ai rien fait pour mériter un tel honneur. Vous savez, j’ai beaucoup de fierté d’être un Algérien et j’ai aussi énormément de respect pour la sélection d’Algérie. Je ne pouvais pas arriver comme ça, à la dernière minute, et prétendre à une place au Mondial. J’aurais mieux apprécié d’aller au Mondial, si j’avais pris part, avec tout le monde, aux éliminatoires. Ce sont ceux qui ont arraché la qualification qui méritaient d’y aller, pas moi qui ai suivi les matchs à la télévision. Dans la vie, il faut travailler pour mériter d’être récompensé.
Si l’on comprend bien, vous n’avez pas voulu venir après la guerre, quoi ?
Bien que le mot guerre soit inapproprié, puisqu’il ne s’agit que de football en fin de compte, mais c’est un peu cela, oui. Je ne voulais pas prendre la place d’un joueur qui s’était battu des mois durant pour arracher la qualification. Cela m’aurait beaucoup gêné, à vrai dire, de voir un joueur qui avait fait tout le boulot à ma place. Moi, j’aime commencer une aventure de ce genre depuis le début et s’il y a victoire au final, je savourerai avec le groupe comme il se doit.
Cela a toujours une meilleure saveur…
Oui, c’est sûr ! On savoure mieux quand on s’est donnés depuis le début avec tout le groupe.
Même si le pays avait besoin des meilleurs joueurs pour représenter dignement les couleurs de l’Algérie ?
Absolument ! L’Algérie devait réunir toutes ses forces vives pour cela. Je comprends parfaitement ce que vous dites. On a besoin des meilleurs joueurs pour jouer un tournoi aussi important que le Mondial. Mais moi, en plus, j’étais blessé. Je veux dire surtout que je voulais respecter les joueurs qui avaient pris part aux éliminatoires. Mais c’est vrai que pour jouer une Coupe du monde, il fallait prendre les meilleurs joueurs algériens du moment et c’est ce qu’a fait le coach, je suppose.
Aujourd’hui, peut-on dire que vous vous sentez plus fort ?
Oui, en effet. Je crois que j’ai assez bien progressé par rapport à l’année dernière. Je joue dans un club important de la Liga et le coach me fait de plus en plus confiance. Je me sens bien physiquement et donc, je pense pouvoir me joindre au projet de la sélection nationale et donner, avec mes coéquipiers, un nouveau souffle en prévision des prochaines échéances qui nous attendent.
Beaucoup de supporters algériens pensaient que vous hésitiez entre l’Algérie et la France. Vous jouiez pour les Espoirs français et vous évitiez de parler de l’Algérie. C’était quoi ce petit jeu et c’est quoi la bonne version, en fait ?
Ce n’était pas un jeu, non, ce n’est pas ça. C’est juste que moi, je suis du genre à ne pas trop m’exprimer publiquement dans les médias. Je préfère parler sur le terrain. C’est un peu ma marque de fabrique. Je ne renie pas que c’est la France qui m’a formé et donné la possibilité de devenir un footballeur professionnel. J’ai pris part aux sélections de jeunes et c’était pour moi, quelque part, très valorisant de jouer avec les meilleurs joueurs du pays d’adoption. Cela m’a beaucoup fait progresser de me frotter au niveau international en jeunes. J’ai fait toutes mes classes en France et je peux dire que je serai toujours reconnaissant envers ceux qui m’ont aidé à réussir. Maintenant, comme il fallait faire un choix sportif en sélection, mon cœur a choisi l’Algérie. En fait, c’était naturel pour moi d’opter pour l’Algérie, car depuis que j’étais tout petit, je savais que c’est dans cette sélection que j’allais jouer. C’est sûr qu’on préfère le taire, car c’est quelque chose de très intime. C’est un rêve de petit et en plus, avant de pouvoir prétendre à jouer pour une sélection nationale, il faudrait d’abord avoir le niveau et mériter un tel honneur.
Vous rêviez toujours de jouer pour l’Algérie, comme nous l’a dit votre maman ?
Moi, depuis que j’étais petit, l’Algérie a toujours été quelque chose de fort dans ma tête et mon cœur. C’est quelque chose qui ne s’explique pas. C’est dans le sang, c’est tout. Très tôt donc, je savais que si je réussissais dans le haut niveau, j’opterais pour la sélection algérienne. C’est un choix que j’ai fait depuis pas mal de temps, ça c’est sûr et certain. C’est un choix du cœur que j’ai fait en mon âme et conscience et personne ne m’a influencé dans cette décision.
Votre conseiller nous a parlé d’une anecdote que vous avez vécue avec l’Equipe d’Algérie des années 80. Pourriez-vous nous en dire plus ?
Oui, avec mon frère Nabil, on regardait un jour la chaîne ESPN Classic Sports qui diffuse beaucoup de matchs anciens. Un jour, on est tombés sur un match de l’Equipe d’Algérie au Mondial 82 et je peux vous assurer que j’étais très surpris par son niveau. C’étaient des joueurs très techniques qui m’avaient épaté par le niveau qu’ils avaient affiché. Et puis, à l’époque où j’avais vu ce match, il y avait aussi Djamel Belmadi qui évoluait à l’O. Marseille. Il faisait partie des «vedettes» de l’équipe d’Algérie et j’étais un grand fan de Djamel Belmadi. Très jeune donc, j’ai été épris par le beau jeu et la technique des joueurs algériens.
Vous vous disiez quoi au juste, c’est à eux que je voudrais ressembler plus tard ?
Oui, j’étais très fier de voir des Algériens comme moi jouer aussi technique et atteindre un tel niveau de jeu. Je me disais que ce sont des joueurs comme eux qui ont marqué le football algérien et j’espérais qu’un jour, j’en ferai de même avec ma génération.
Vous étiez fan de quel joueur essentiellement ?
Moi, à mon époque, c’était Djamel Belmadi. Il jouait dans le club que j’aimais, l’O. Marseille, mais aussi parce qu’il était un Algérien comme moi.
Vous savez ce qu’il devient aujourd’hui ?
Oui, je continue à suivre son beau parcours. Il est entraîneur au Qatar et il a même gagné le titre la saison dernière.
Savez-vous que deux joueurs algériens sont passés avant vous à Valence ?
Oui, je le sais. Il s’agit de Rabah Madjer et Moussa Saïb. Au club, on m’a dit beaucoup de bonnes choses d’eux, notamment Madjer. C’est le médecin du club qui m’en parle le plus. Il m’a dit que Madjer et Saïb faisaient partie des meilleurs joueurs qui ont joué à Valence. C’est vous dire le grand bien qu’ils en pensent ici.
C’est un peu pesant pour vous en tant qu’Algérien ?
Non, pas du tout. Vous savez, moi, je fais mon parcours à ma manière, sans penser à me comparer à d’autres joueurs. J’essaie de jouer comme je sais le faire et d’écrire mon histoire avec mes propres moyens.
C’est une fierté d’être le 3e Algérien à faire vibrer le stade Mestalla ?
Oui, c’est clair que c’est une fierté. C’est un stade magique avec des supporteurs magnifiques. Ici, ce n’est que du bonheur de jouer dans un tel club.
Parlez-nous des souvenirs que vous gardez de vos débuts chez les pros ?
Mon premier match chez les pros, c’était à Reims, en Ligue 2 avec Grenoble. J’avais 17 ans. Il y avait ma famille, les amis et mon conseiller qui étaient venus me voir ce jour-là. J’étais très fier. C’était un rêve qui se réalisait, quelque chose de très fort. J’avais joué une quinzaine de minutes et cela suffisait à mon bonheur. En plus, on avait gagné. J’étais satisfait de mon entrée. C’est un moment que je n’oublierai jamais.
A quoi pense un jeune quand le coach de l’équipe première l’appelle et lui dit : «Prépare-toi à jouer avec nous» ?
En fait, ça ne s’est pas passé de cette manière pour moi. Je m’entraînais avec les pros depuis un moment déjà et j’avais été convoqué à deux matchs avant, mais sans jouer. Au stade de Reims, je m’échauffais et je ne sais pas comment, mais j’étais persuadé que j’allais faire mon entrée dans ce match. Tout était réuni pour que je puisse faire mes débuts lors de ce fameux match. Il y avait ma famille et mes proches en plus. J’avais le cœur qui battait très fort et quand je suis rentré, c’était avec beaucoup, beaucoup d’émotions.
Vous partagez les meilleurs moments avec votre maman qui est très proche de vous…
Exactement ! Ma maman, c’est ce que j’ai de plus cher au monde. Je lui dois tout ! Mon éducation et ce que je suis aujourd’hui. C’est pour cela que je partage tous les moments de bonheur avec ma mère.
Et votre premier match avec le FC Valence ?
Mon premier match à Valence, c’était contre le Sporting de Gijon. Ma première entrée en jeu était aussi un moment très fort. J’en garde également un très bon souvenir. J’espère réussir ici.
Hier (entretien réalisé au lendemain du match de Ligue des champions contre Leverkusen, 3-1 pour Valence, ndlr), quand votre coach Unai Emery vous a fait remplacer, tout le stade s’est mis à siffler son choix. Qu’est-ce que ça vous a fait à ce moment précis ?
Ecoutez, ici à Valence, on a un public très spécial qui demande à son équipe, non seulement de gagner ses matchs, mais aussi de bien jouer. Quand le coach fait des choix tactiques, il a le droit de choisir les joueurs qu’il veut. Voilà, le public a sifflé et je ne sais même pas pourquoi il l’a fait. Moi, je ne veux pas rentrer dans ce genre de détails.
Qu’est-ce que ça vous fait d’être titulaire à 21 ans dans un grand club comme le FC Valence ? Est-ce une libération psychologique, une confirmation que vous avez les deux pieds dans le haut niveau ou que vous avez évacué de manière définitive certains doutes par rapport à un passé récent ?
D’abord, moi, j’ai toujours cru en mes capacités. C’est quelque chose de très important. Si aujourd’hui, à 21 ans, je suis au FC Valence, c’est que je le mérite. J’ai beaucoup travaillé pour être ici. Après, le FC Valence est un très, très grand club qui m’offre tous les moyens pour progresser. Les supporteurs, on n’a pas à les présenter, le coach est l’un des meilleurs de la Liga, c’est pour moi du top niveau, je suis donc vraiment heureux d’être à Valence et j’espère que j’y serai pour un long moment.
C’est l’année de la confirmation et du grand envol pour vous, cette année ?
Pour le moment, je peux dire que ça se passe bien ; j’ai du temps de jeu, j’ai enchaîné les titularisations, voilà, à moi de ne pas lâcher et de continuer à progresser. Espérons que cela durera inch’Allah.
C’est ce que vous souhaite toute l’Algérie aussi. Avant de signer à Valence, vous aviez d’autres propositions et pas des moindres, puisque l’Inter de Milan et Manchester City vous voulaient aussi. Pourquoi le choix du FC Valence ?
Il faut savoir que j’ai été blessé durant pratiquement une année avant cela. J’avais eu des problèmes avec mon genou, je revenais et Valence m’avait toujours suivi et me montrait un réel intérêt. C’est surtout cela que j’ai apprécié. De plus, j’ai été reçu de fort belle manière par Fernando Gomes qui était le directeur sportif et le recruteur de l’époque et qui est directeur sportif actuellement. J’ai donc senti un réel intérêt, en plus d’un vrai projet sportif. C’est pour cela que je n’ai pas hésité à signer au FC Valence. J’avais donné ma parole à Valence et à partir de là, je me suis concentré à fond sur cela. Dès que j’ai terminé ma saison avec Grenoble, je suis venu ici et je ne regrette pas mon choix.
A Valence, vous avez aussi la possibilité de jouer chaque saison la Ligue des champions, mais aussi de très grands matchs toute la saison en Liga. C’est aussi cela qui vous attire ici, non ?
Ecoutez, ce que je vis est un pur bonheur. Je fais tout pour que ça ne s’arrête pas. Jouer la Liga, affronter Barcelone, l’Atletico de Madrid, la Ligue des champions et j’en passe… En plus, le jeu qui est pratiqué à Valence et en Espagne me convient parfaitement. Franchement, je me régale ici. Je n’ai pas à me plaindre. Sincèrement, j’ai tout pour m’éclater ici.
Quand vous vous apprêtez à affronter le Barça des Messi, Xavi, Iniesta et toutes les autres stars, vous vous dites quoi avant le match ?
Avant, c’est vrai que j’avais cette idée. Je me disais que si un jour, je jouerais contre Barcelone ou Madrid, comment j’allais réagir ? Mais vous savez, quand vous êtes joueur et que l’opportunité se présente de jouer contre ces équipes et ces joueurs, vous voyez les choses différemment, parce que là, vous devenez acteur. Vous êtes footballeur, donc vous vous préparez et vous évacuez de votre tête ces choses qui peuvent impressionner. Vous êtes compétiteurs, donc vous ne pensez qu’à faire mieux que l’adversaire, quel que soit son nom ou son statut. Vous ne pensez qu’à gagner. On joue pour gagner, sans focaliser sur les joueurs qu’on a en face. Bien sûr que la motivation est supérieure quand il s’agit de jouer le Barça, le Real Madrid ou un adversaire en Ligue des champions. Il faut le reconnaître. Mais voilà, je ne focalise pas sur les noms qu’il y a en face. Ce n’est qu’après le match qu’on y pense parfois…
Eh bien, après le match contre le Barça, ne nous dites pas que vous n’en parlez pas avec vos potes au téléphone, non ?
(Il sourit). Je ne sais pas si je réalise vraiment, mais c’est peut-être parce que je suis quelqu’un qui n’exprime pas trop ses sentiments. Je suis plutôt introverti. Vu qu’on joue tous les trois jours, je crois que le fait de rester concentré tout le temps m’empêche de réaliser ce qui m’arrive vraiment. Vous savez, je préfère faire autant que ces joueurs.
A Valence, vous jouez tantôt à droite, tantôt à gauche. A quel poste vous sentez-vous le plus à l’aise ?
Paradoxalement, j’ai été formé à Grenoble comme milieu de terrain, meneur de jeu dans l’axe. Quand je jouais en jeunes, j’ai toujours joué en numéro 8, mais une fois passé professionnel, j’ai toujours joué sur les côtés, que ce soit à Grenoble ou actuellement à Valence. En fait, je peux m’adapter facilement à plusieurs postes. Je me considère comme un joueur polyvalent. Je peux jouer dans l’axe en soutien des attaquants ou sur les côtés. Je n’ai vraiment pas de problème à ce niveau.
Avec l’équipe d’Algérie, à quel poste souhaiteriez-vous évoluer ?
Que ce soit en club ou avec l’Equipe nationale, c’est au coach de décider où il souhaite me faire jouer. Si le coach me le demande, je pourrai même jouer comme arrière latéral.
Là, on sent tout de suite les propos du joueur professionnel qui ne discute jamais les choix du coach…
(Il rigole). Non, non, c’est vrai, je vous assure que c’est vrai. Je jouerai là où le coach me le demandera. Il n’y a aucun souci, c’est certain.
En Liga espagnole, vous croisez des Algériens, à l’instar de Yebda, Cadamuro et Lacen. Comment ça se passe entre vous ? Qui va vers l’autre le premier, du moment que vous ne vous connaissiez pas forcément ?
Eh bien, j’ai déjà joué contre Hassan Yebda face à Granada et on s’est salué naturellement. On s’est demandés comment ça se passait chez l’un et l’autre et on s’est souhaité bonne chance. Malheureusement, on n’a pas eu beaucoup de temps pour échanger. Mais je me suis tout de suite rendu compte que Yebda est quelqu’un d’abordable et de respectueux. C’est une impression très positive qu’il m’a laissée. C’est très important qu’on soit solidaires entre Algériens, même si on ne se connaît pas encore bien. J’ai plus joué contre Medhi Lacen en fait, et c’est avec lui que j’ai eu plus de temps de discuter. C’est quelqu’un de très gentil et il m’a dit que ça allait super bien se passer pour moi en Equipe nationale et qu’on allait très bien m’accueillir.
Vous avez échangé vos maillots ?
Oui, j’ai échangé mon maillot avec Medhi.
Il y a aussi un troisième Algérien, Cadamuro-Bentaïba qui joue à la Real Sociedad. Vous le connaissez ?
Oui, je sais qu’il y a un Algérien qui évolue à la Real Sociedad, mais que je n’ai pas encore croisé sur les terrains.
Si on vous demandait de dire un mot sur le jeu de Yebda et celui de Lacen, vous diriez quoi ?
Je vais commencer par Medhi. Lui, c’est un joueur qui joue énormément juste, si je puis dire. Il a une très belle qualité de passe. Il voit très bien le jeu. C’est quelqu’un de combatif. Hassan, pour sa part, a le même style de jeu que Medhi, avec une envie constante de se projeter rapidement vers l’avant. C’est un vrai battant qui se met au service de l’équipe. C’est un joueur qui mouille le maillot, comme on dit.
C’est une chance d’avoir des joueurs comme eux en sélection nationale, non ?
C’est sûr ! Et puis, moi aussi je suis quelqu’un comme ça. J’aime bien mouiller le maillot, j’ai cette rage de vaincre, je ne me laisse pas faire… Je veux tout le temps gagner. Je pense qu’on se ressemble sur ce point.
C’est tout simplement le tempérament du footballeur algérien…
Oui, tout à fait. (Il sourit).
Vous vous apprêtez à vivre un moment important dans votre carrière internationale, en répondant à la convocation de Vahid Halilhodžić. Comment vivez-vous cela ?
Je vais être bientôt international algérien, je découvre. C’est quelque chose de fort. J’y pense, j’y pense, je reconnais que j’y pense souvent. Je suis impatient de faire mes débuts et j’espère que ça va bien se passer inch’Allah.
Comment vous préparez-vous pour les matchs ?
De manière basique. Je fais ma petite sieste, je me prépare mentalement, je ne me mets pas trop la pression, je me dis que je vais jouer comme je sais le faire, et voilà. Je donne le meilleur de moi-même pour ne pas avoir à le regretter après le match.
Vous allez jouer votre premier match avec les Verts contre la Tunisie, qu’est-ce que vous disent vos amis tunisiens à propos de ce match ?
(Il rigole). Ils me disent : «On te souhaite bonne chance pour le match suivant, mais pas contre la Tunisie !»
Vous allez faire partie d’un nouveau groupe, forcément vous allez passer par l’inévitable bizutage. Qu’est-ce que vous allez chanter à vos coéquipiers ?
(Il rigole). Je sais que je vais y passer, c’est sûr. Mais je n’ai pas encore réfléchi à ça. C’est vrai qu’en France aussi, on fait ça, contrairement à l’Espagne où le nouvel arrivé doit payer à manger à tout le monde. Je vais réfléchir sérieusement à ce que je vais dire. Ce sera soit une chanson ou un discours (il sourit).
Vos potes, vos frères, ils vous disent quoi à propos de cette première sélection avec l’Equipe d’Algérie ?
Ils sont très fiers de moi. Vous savez, ma famille et mes amis, pour eux, ce n’est que du bonheur de me voir jouer à la télévision. Que dire alors de ma première avec l’Equipe nationale !
Et vous, que vous dites-vous quand vous regardez vos matchs à la télévision ?
En fait, je ne me regarde pas comme un spectateur. Je me revois et je cherche plutôt à détecter mes lacunes pour pouvoir m’améliorer.
Lors de vos derniers matchs, par exemple, qu’aviez-vous noté comme lacunes ?
En fait, ici, nous avons la chance de pouvoir beaucoup parler avec l’entraîneur. C’est lui qui nous dit ce qu’on a à corriger, en aparté, et il nous dit ce qu’on doit améliorer. Il me dit ce qu’il attend de moi et après, sur le terrain, on essaie de changer les choses en mieux.
Sur quels points axez-vous votre entraînement pour progresser personnellement et que faites-vous au juste ?
(à suivre…)