Exclusif : Djamel Ould Abbès , secrétaire général du parti majoritaire , à l’expression : “Le FLN vous surprendra le 19 mars prochain”

Exclusif : Djamel Ould Abbès , secrétaire général du parti majoritaire , à l’expression : “Le FLN vous surprendra le 19 mars prochain”

Victorieux, mais pas dédaigneux. Chez le FLN le plaisir du triomphe électoral se savoure discrètement. «Je pense à tous ceux qui ont participé et n’ont pas gagné, je me mets à leur place» confie d’un ton serein le secrétaire général du parti majoritaire. Faisant le bilan de cette consultation électorale qui a donné le FLN très largement majoritaire, Ould Abbès rassure que son parti travaillera main dans la main avec son allié naturel le RND, mais se projette aussi dans les échéances à venir affirmant que son parti réserve de nombreuses surprises lors de la réunion du Comité central le 19 mars prochain.

L’Expression: Comment réagit le FLN en sa qualité de parti majoritaire à la décision du président américain Donald Trump de reconnaître unilatéralement El Qods comme capitale d’Israël?

Djamel Ould Abbès: Nos relations avec les Palestiniens ne datent pas d’aujourd’hui. L’Algérie recevait tous les responsables politiques de toutes les tendances. Le Fatah, l’OLP, aussi bien Georges Habbache du Fplp, Nayef Hawatma du Fdplp, Abou Al Abbasse, Abou Djihad…L’Algérie a abrité la Déclaration de la naissance de l’Etat de Palestine. Nos relations sont particulières. La formule du défunt président Boumediene «Dhalima awe Madhlouma» est restée dans l’Histoire. Abdelaziz Bouteflika qui était ministre des Affaires étrangères a eu la prouesse en septembre 1974 alors qu’il présidait l’Assemblée générale de l’ONU, de faire intervenir Yasser Arafat à la tribune des Nations unies. C’est pour vous dire que l’Algérie, et surtout le FLN, a des liens organiques avec la Palestine.

Au FLN, nous faisons parfaitement la différence entre le peuple américain et le président Donald Trump. Mais au nom du FLN, je dis que Trump a commis un attentat terroriste contre les 1,980 milliard de musulmans. Je dis bien un attentat terroriste contre l’Islam et je pèse mes mots. C’est une agression, une provocation contre les musulmans. Bien évidemment, il ne l’a pas fait de son propre chef. C’est le lobby sioniste qui, aux USA gère et oriente à sa guise la politique étrangère des Etats-Unis. Les sionistes ont investi deux secteurs clés dans la vie du monde: la communication et les finances. Ils savent intervenir car ils ont l’Aipac très influente au Congrès. Les juifs sont 6 millions à vivre aux USA parmi les 350 millions d’Américains et ils ont 18% de représentants au Congrès.

Ce qui donne une réelle idée de l’influence de l’Aipac. Concernant Trump, c’est facile pour eux, sa fille est mariée à un sioniste qui l’a reconvertie au judaïsme. Moi j’ai étudié en Allemagne, à Leipzig, pas loin de Buchenwald où existe le sinistre camp de concentration et j’ai vu de mes propres yeux ce qu’ a été la souffrance. Ce que fait actuellement Netanyahu et l’entité sioniste est une vengeance aveugle et maladive de ce qu’ont subis leur ancêtres. Ils oublient toutes ces souffrances. Cela étant, il y a des juifs, pas sionistes en Israël et en France qui sont conscients de ces dérapages et qui condamnent cette politique, je cite par exemple Edgar Morin, il y a Amos Oze, l’écrivain. Cette provocation risque d’avoir des conséquences imprévisibles. Ce qu’on a vécu avec Al Qaïda, Daesh, Boko Haram, peut se surmultiplier et il y aura toujours des fanatiques qui créeront le chaos. Trump est-il conscient ou pas? Je laisse aux Américains le soin de le juger. La position du FLN historique est très claire: c’est le lobby sioniste qui a assassiné Nasser, Boumediene, Abou Djihad, Abou Iyad, Boudia l’Algérien en juin 1973, Arafat est derrière ces démarches. Je ne dis pas que je suis optimiste, mais je dirais qu’ils ont remis la question palestinienne à l’ordre du jour qui connaissait un certain endormissement.

Le président français Emmanuel Macron a effectué mercredi dernier une visite d’amitié en Algérie. Comment appréciez-vous en tant que FLN cette visite du chef de l’Etat français?

Sur le plan étatique, c’est la visite d’un président étranger qui vient rendre visite au président de la République algérienne démocratique et populaire. Ce chef d’Etat appartient à une ex-puissance occupante, mais on ne va pas en rester là. Nous avons 3,5 millions d’Algériens en France qui y séjournent depuis la Première Guerre mondiale, l’Algérie est à une heure d’avion de la France, il y a la Mare nostrum, la mer Méditerranée, qui nous unit, il y a ces 132 ans de colonisation, il y a cette histoire. Il y a aussi des liens économiques très utiles et positifs. Mais en tant que FLN nous avons le devoir de ne pas occulter la question mémorielle.

Le jour de l’arrivée du président français, mercredi matin, j’ai honoré un des derniers membres du Comité des 22, en la personne de Abdelkader Lamoudi. C’est un signal fort pour lutter contre la culture de l’oubli qui se fait actuellement graduellement. J’ai reçu il y a près d’un mois l’ambassadeur de France en Algérie et on a parlé de la mémoire et surtout parlé des archives. Pour le FLN, la question des archives est primordiale. Certains posent la question sur la repentance: vous croyez qu’en disant on s’excuse ils vont effacer les crimes du 8 Mai 1945? Ils vont effacer les enfumades du Dahra et du Titteri? Ils vont effacer la torture? Ils vont effacer les bombardements au napalm des centaines de villages en Kabylie et des Aurès?

La réponse est pour moi une question secondaire. Le président Macron a eu des réactions positives concernant le colonialisme. En tant que responsable d’un parti qui a justement combattu le colonialisme, j’ai pris acte du fait qu’il dit qu’il n’a pas changé de position depuis qu’il a été élu. C’est une première et j’espère qu’il va aller dans le bon sens.

Revenons aux résultats des dernières locales. Le FLN triomphe, mais tranquillement, sans arrogance. Quelle interprétation, quel sens donnez-vous à ces résultats?

Je suis à la tête du FLN depuis une année et demie. J’ai hérité d’un parti complètement sclérosé par les années de gestion de Belkhadem qui en a fait une zaouïa rurale du Moyen âge. L’héritage est trop lourd sur le plan structurel, organique et des mentalités. J’appartiens au FLN ancienne génération qui avait des repères, des valeurs et des constantes qu’on respectait. J’ai opté pour un discours futuriste qui s’adresse aux nouvelles générations, ensuite un discours rassembleur et d’espoir et surtout un contact direct avec la base militante. Ce travail qui n’était pas facile à réaliser a eu de résultats partiellement positifs pour les législatives du 4 mai dernier, on a continué à travailler. Ce que j’ai constaté sur le terrain c’est le contact direct avec les populations, être à leur écoute, enregistrer leurs doléances ne pas faire de promesses creuses, répondre avec de l’espoir, parler leur langage, être près d’eux est payant.

Le discours a été écouté non seulement par les militants, mais aussi par les populations. Le score qu’on a obtenu est éloquent et c’est le résultat de ce travail en profondeur avec les citoyens et le changement de génération.

Il se manifeste comment ce changement de génération?

On a présenté de nouvelles figures. Voyez les statistiques sur la composante de nos candidats: 65% des candidats sont des universitaires, 70% des candidats sont âgés entre 25 et 40 ans avec un petit pourcentage pour les moudjahidine. Cette composition des listes électorales a été accueillie favorablement dans 90% des cas et bien évidemment il y a quelques exceptions. J’ai introduit également dans le discours un élément dont le feedback m’émeut et me touche. Quand on parle de la légitimité historique aux citoyens, quand vous leur parlez de Abane, de Benboulaïd de Krim, Amrouche Lotfi, Hassiba Benbouali, Zabana. En leur rappelant tous ces souvenirs, la population a bien réagi.

Vous êtes largement vainqueur, mais sur le terrain vous devez quand même composer avec le RND qui est après le FLN, la deuxième béquille du système?

Un point à clarifier: Ouyahia est mon ami depuis 1993 quand il est arrivé aux affaires. Je l’apprécie et on s’apprécie mutuellement. Les élections sont une compétition on ne va pas y aller avec des pincettes. Quand vous jouez au football, il arrive que vous faites un petit croche-pied, jouez des coudes, des épaules, mais l’essentiel est de ne pas être agressif. Vous avez suivi la campagne électorale, je n’ai agressé personne. Je me suis fait un point d’honneur de respecter les autres et surtout le RND qui est mon allié naturel. On a travaillé et nous travaillerons ensemble pour concrétiser le programme du président de la République. Donc avec le RND le travail continuera de la même façon, nos relations personnelles avec le secrétaire général du RND n’ont pas changé. Pour les élections c’est le peuple qui a tranché.

Des voix se sont élevées pour dire que l’administration a largement penché en faveur du FLN. Ils sous-entendent en filigrane qu’il y a eu fraude en faveur du FLN.

(rire)… Ce mot fraude, il y a une dame à la tête d’un parti qui est la première à crier à la fraude. Je la connais depuis 30 ans et on dirait qu’elle est née en criant fraude.. fraude…fraude.. Avant même le déroulement des élections on parlait déjà de fraude. Notre concurrent direct est le RND dont le SG est le Premier ministre.

L’administration est sous le contrôle et la responsabilité directe du Premier ministre, comment cette même administration va-t-elle frauder au profit du FLN? Certes, il y a quelques petites imperfections comme partout dans le monde, mais parler d’une fraude massive je rejette cela de la façon la plus ferme. L’administration a joué un rôle très positif dans l’équité et la transparence. La preuve est que nous avons présenté des recours et récupéré de nombreuses APC. Et nous approchons les 700 communes.

On vous attendait de pied ferme au tournant. Mais avec de pareils résultats aux élections locales vos détracteurs ont-ils rangé sabres et gourdins? La situation de crise va-t-elle s’estomper au FLN?

Depuis 2004, les contestations ne se sont pas arrêtées. Moi j’ai créé une dynamique, j’ai renforcé le BP avec d’anciens ministres. Cette dynamique va se poursuivre.

A partir de cette semaine, il y a les cinq commissions permanentes qui vont se réunir demain mardi et mercredi : commission des cadres, commission politique, commission de prospective, commission de discipline, commission des finances. Ces commissions vont présenter un rapport pour préparer la réunion du Comité central qui aura lieu le 19 mars, jour de la Victoire. Les textes seront présentés à la base pour qu’ils soient discutés et amendés et on arrivera à la réunion du CC avec une copie consensuelle et des prévisions sur les deux prochaines années au plan politique, économique, organique et organisationnel.

Cette réunion du Comité central aurat-elle un cachet spécial? Va-t-il y avoir des annonces nouvelles des décisions particulières ou préparez-vous des annonces particulières?

La réunion du Comité central connaîtra des annonces aussi bien au plan politique quorganique. Le FLN vous réserve de grandes surprises le 19 mars prochain. En attendant, je vous annonce que dès la semaine prochaine je vais me déplacer à l’intérieur du pays pour revoir les citoyens, d’abord pour les remercier de nous avoir fait confiance et aussi sérier de plus près les questions urgentes des citoyens, que nous allons présenter au gouvernement en tant que FLN.

Les besoins pressants des citoyens dans les communes comme la santé, l’éducation, le transport et le logement. Cela d’une part, d’autre part nous nous préparons pour une année charnière au plan politique. Nous allons présenter au Comité central les revendications légitimes et urgentes des citoyens que nous allons présenter au gouvernement qui applique le programme du président de la République qui est également le nôtre. Il y a des lacunes des déficits auxquels il faut pallier dès maintenant pour arriver à la fin du mandat du président avec un parachèvement de son programme.

On annonce un remaniement ministériel dans les tout prochains jours et dans ce cas, le FLN souhaite-t-il plus de postes ministériels?

Le remaniement gouvernemental est une prérogative exclusive du président de la République. Cela étant dit, je vous livre ma propre analyse: on ne change pas de gouvernements selon les humeurs et les échéances électorales. Il y a une équipe qui travaille, sur un programme adopté il y a un mois. Il y a un nouveau Premier ministre, il faut lui donner la possibilité de s’imposer sur le terrain par le travail.