Six ans après la “révolution du Jasmin”, qui a coupé la tête au régime de Zine al-Abbidine Ben Ali début 2011, les Tunisiens ne lâchent pas du lest face aux nouvelles autorités dirigées par le président Béji Caïd Essebsi. La crise socioéconomique, engendrée par l’instabilité sécuritaire, continue en effet d’agiter de nombreux secteurs, notamment ceux relevant du public, où des mouvements de grèves cycliques sont observés partout dans ce pays voisin.
Hier, plusieurs secteurs ont été paralysés par une grève générale, dont ceux de la santé, des impôts et de l’énergie. Les cadres et le personnel paramédical de la santé ont observé une grève générale d’une journée, au lendemain de l’échec d’une réunion des représentants de leur syndicat (Union générale des travailleurs tunisiens, UGTT) avec le ministère de tutelle.
En dehors des services des urgences, tous les établissements de santé (cliniques et hôpitaux) ont été touchés par cette grève. Les fonctionnaires des recettes des finances (impôts) ont entamé hier, eux aussi, une grève de trois jours après l’échec également d’une rencontre entre les représentants de leur syndicat, affilié à l’UGTT, avec le ministère des Finances autour de leurs revendications socioprofessionnelles et leurs conditions de travail.
Dans le désert de Tataouine, les travailleurs du secteur pétrolier ont fait grève hier pour dénoncer la politique menée par l’entreprise Winstar, pour la gestion de la situation de leurs collègues menacés de licenciement, ont rapporté les médias tunisiens qui avaient déjà fait état de blocages des routes menant au site pétrolier dans la région et des rassemblements organisés ces derniers jours par la population locale.
Les habitants de Tataouine sont suivis aussi par ceux de Kef dans leur contestation, obligeant le gouvernement de Youssef Chahed à dépêcher vainement des émissaires pour calmer une situation qui peut provoquer le pire dans cette région sud du pays, quasiment oubliée par les autorités centrales à Tunis, y compris du temps du régime déchu de Ben Ali. les associations et les organisations de la société civile ont d’ailleurs réinvestis la rue hier, entre midi et treize heures, à Kef, où une grandiose marche populaire a été organisée pour exiger un plan de développement équitable entre les différentes villes tunisiennes.
la crise économique, entraînée par la fermeture de nombreuses usines dans la région, a sonné l’alerte au sein de la population qui s’inquiète de plus en plus du chômage endémique, qui touche surtout les jeunes. Dans le port de Radès, les agents des Douanes ont organisé un sit-in pour contester la non-application de l’accord conclu, le 20 septembre 2016, entre leur syndicat et leur direction. Les revendications des douaniers sont également du même ordre que leurs collègues de la santé ou des finances.
Outre la contrainte de la dette contractée auprès du Fonds monétaire international, le gouvernement tunisien ne dispose pas d’une véritable marge de manœuvre pour calmer la colère sociale, et encore moins d’un plan de sortie de crise pour la relance de son économie. La relance du tourisme, secteur névralgique, se fait de manière timide, mais la persistance du risque terroriste peut le replonger une nouvelle fois dans la crise.