Arrivée à la tête du secteur le plus important du gouvernement le 5 mai dernier, Mme Nouria Benghebrit a pour le moment, réussi son examen de passage dans le gouvernement.
Le 5 juillet dernier, Fête de l’indépendance et de la jeunesse, la ministre avait bouclé ses deux mois à la tête de l’Education nationale. Et pourtant, dès son arrivée dans ce secteur très convoité, elle est victime d’une campagne médiatique acharnée qui va jusqu’à viser directement ses origines familiales et religieuses. Les initiateurs de cette campagne n’ont même pas pris la peine de faire des recherches pour justifier ces attaques.
Ses adversaires idéologiques et politiques ont démontré leur inculture et leur ignorance en l’accusant simplement d’être juive, alors qu’il fallait juste regarder le film Les Hommes libres du Marocain Ismaël Ferroukhi, pour comprendre que le frère de son grand-père Si Kaddour Benghebrit, était recteur de la mosquée de Paris, et qu’il avait sauvé, au nom de l’humanité, une centaine de juifs, dont celle du chanteur algérien Salim Hilali, en leur faisant octroyer par le personnel administratif de la mosquée des certificats d’identité musulmane, qui leur permirent d’échapper à l’arrestation et à la déportation.
Au nom de la rumeur et de l’invective, on a tenté de faire tomber une ministre cultivée et érudite, fraîchement installée à l’éducation pour changer les choses. Son deuxième tort, c’était d’être francophone et de ne pas descendre de cette école fondamentale qui a fait de nos enfants des mauvais arabisants et de piètres francophones. Son tort surtout d’être une femme émancipée, qui parle la langue de Voltaire et qui ne connaît pas la langue d’Al Moutanabi. Durant plus d’un mois, la ministre n’a pas répondu par «éducation» aux multiples attaques des baâsistes et à leurs relais médiatiques. Soutenue par le président Bouteflika et son Premier ministre, Abdelmalek Sellal,
Mme Benghebrit a contre-attaqué au bon moment, en s’exprimant dans la langue de Ben Badis sur plusieurs télévisions, s’expliquant sur toutes ces questions sans pour autant attaquer ou invectiver personne. Une campagne incompréhensible pour les milliers de pères de familles dont les enfants ont été victimes de l’échec d’une politique de l’éducation combinée par une lutte syndicale décomposée, qui a toujours relégué l’intérêt de l’étudiant en bas de page. Un secteur de l’éducation rongé par un système sclérosé, une politique défaillante et une bureaucratie rampante.
Une bureaucratie raillée qui a obligé un chercheur algérien à vendre son invention de valise solaire aux Allemands, faute d’intention des responsables algériens.
Un secteur auquel il fallait une femme de combat, d’intelligence et de défi pour réussir cette révolution éducative qui fait bouger les peuples et les nations. Le ministère de l’Education doit commencer à faire sa «débenbouzidation» pour arriver à un niveau honorable. Nos écoles qui étaient jadis les fleurons du Maghreb, nos universités, les perles d’Afrique, sont devenues au bout de 20 ans du système Benbouzid, une école à la traîne et une université à l’agonie. Bien sûr, cette situation n’incombe pas au seul ministre Benbouzid, mais également à la situation politique, sociale et économique.
La décennie noire est passée aussi par là et l’éducation a payé un lourd tribut en résistant. Une période où des écoles primaires ont été soufflées, des étudiantes sans voile assassinées, l’enseignement du français banni, une rentrée scolaire menacée. On n’oubliera jamais ce drame à Sfisef près de Sidi Bel Abbès, où 12 enseignantes, sont atrocement assassinées, le 27 septembre 1997, par les forces du mal et de l’obscurantisme. En voulant effacer le système éducatif de la puissance coloniale, l’Algérie a fait plusieurs bonds en arrière. Notre pays qui était le deuxième pays francophone dans le monde après la France avec près de 16 millions de lecteurs a fortement régressé. Aucune donnée fiable concerne l’utilisation de la langue arabe classique en Algérie.
L’Algérie et son système éducatif ont besoin d’un nouveau souffle, d’une nouvelle mentalité pour rehausser le pays en bonne position. L’éducation est la colonne vertébrale de tout développement d’un pays. Les modèles de la Grande-Bretagne, le Canada, la Chine ou encore la Corée du Sud, voire le Japon sont des exemples à suivre: améliorer notre niveau d’enseignement. Des pays qui ont commencé par la base: l’école pour développer leurs instituts et leurs universités. Ces dernières années, l’Université algérienne a encore reculé elle est seulement 27eme au niveau africain. Un système éducatif et universitaire qui oblige de nombreux Algériens à émigrer vers d’autres cieux, provoquant une désolante fuite des cerveaux.
En France, par exemple, sur les 18.000 médecins étrangers, 22% sont Algériens, soit 1,4% des médecins en France. Aujourd’hui nous n’avons pas besoin de quantité d’étudiants ou d’infrastructures, nous avons besoin de qualité des études et une bonne prise en charge des compétences humaines. Il est clair que Benghebrit n’est pas dans le gouvernement pour rester 20 ans, mais elle besoin d’un temps nécessaire pour réformer la politique du secteur et remettre le système éducatif algérien sur la droite ligne du tableau. Et pour cela, elle a besoin du soutien de toutes les forces vives de ce pays.