L’actuelle saison 2010/2011 arrive presque à son terme, puisqu’il ne reste plus que quatre journées, en plus des rencontres de mise à jour, avant le tomber de rideau du premier championnat d’Algérie professionnel, lancé par les instances footballistiques nationales. Quelle bilan et quelle évaluation peut-on faire de l’actuelle saison ?
Qu’y a-t-il eu de nouveau ? Quel a été le niveau de la compétition proprement dite ? Y a-t-il eu des changements dans le sens du développement du football algérien et celui du niveau des équipes et des joueurs ? Les moyens ont-ils suivis ? Le projet du professionnalisme inscrit sur papier est-il adaptable à la réalité du terrain telle que vécue par les clubs ? Va-t-on dans la bonne direction ? Autant de questions, et il y en a beaucoup d’autres, auxquelles nous avons jugé utile d’essayer de trouver quelques réponses, notamment liées au niveau du championnat cette saison. Nous avons pour cela joint, trois techniciens avérés, qui nous ont donné chacun son opinion sur le sujet. Il s’agit de Djamel Menad, Hocine Yahi et Younès Ifticène.
Menad : « Il reste beaucoup de chemin à parcourir »
Pour l’ancien baroudeur des Verts et ex-driver de la JSMB : « C’est une bonne chose que d’avoir lancé le premier championnat professionnelle en Algérie. Il fallait bien un début. Seulement, pour pouvoir parler du vrai professionnalisme, il y a beaucoup de choses qui doivent être mises en place, et cela sur tous les plans. Que ce soit du côté des instances politiques et sportives du pays ou de celui des dirigeants de club. Un club est professionnel, lorsqu’il dispose de structures fiables, dignes de ce nom, d’un organigramme clair, net et précis, de moyens humains et matériels, avec les infrastructures nécessaires. L’aspect financier est aussi primordial. Tout cela, n’est pas encore très au point dans notre football et dans nos clubs. Il faudra impérativement trouver les mécanismes qui conduisent à la mise en place effective d’un professionnalisme digne de ce nom.
Là aussi, je tiens à dire qu’on ne peut être un vrai professionnel sans l’acquisition du savoir-faire et de la mentalité qui doivent impérativement être associés à toute mise en place d’un système dit de football professionnel. En Algérie, il y a encore énormément de choses à mettre en place. Pour ce qui est du niveau du championnat de la ligue 1 Pro, je dirai qu’à mon sens, il est d’un niveau moyen dans l’ensemble, quoi que j’estime qu’en début de saison, il y a eu des matches d’un très bon niveau, y compris parmi ceux livrés par mon ex-équipe, la JSMB. Nous avons vu sur le terrain de belles choses et nous avons assisté à des oppositions de bonne facture. Mais, par la suite le niveau a baissé. Il y a eu comme une baisse de régime de la part de la plupart des équipes. Je pense que cela est dû certainement, au manque de moyens, aux problèmes financiers que rencontrent la majorité des clubs et à d’autres insuffisances, quelles soient liées à l’aspect technique ou autres, comme l’instabilité au niveau des staffs techniques, etc. Je pense qu’on peut faire beaucoup mieux. Il faudra multiplier les rencontres avec les principaux acteurs de la balle ronde nationale, pour sortir avec un sérieux projet, qui soit pratique et qui réponde surtout à la réalité du terrain. Voilà, ce que je peux dire d’une manière générale à ce propos. »
Yahi : « On peut faire beaucoup mieux »
Pour Hocine Yahi : « Le professionnalisme exige un minimum de moyens. Et justement, c’est ce minimum-là qui fait généralement défaut chez la plupart de nos clubs, qui souffrent du manque d’infrastructures dignes de ce nom et de moyens financiers, qui puissent leur permettre d’aspirer à se professionnaliser progressivement et d’une manière sérieuse.
Il ne suffit pas de se dire professionnel pour l’être réellement. C’est toute une structure à mettre en place, allant de la décision politique, en y mettant surtout les moyens, à l’action des instances footballistiques nationales et à la mobilisation de dirigeants de club, dignes de ce nom, qui ont les capacités et le savoir-faire nécessaire dans le football, pour professionnaliser leurs équipes, dans les faits palpables, non pas seulement dans les slogans creux. On parle de professionnalisme alors que beaucoup agissent et font preuve d’amateurisme. Je pense qu’on est encore loin du vrai professionnalisme que se soit en matière de moyens, de mentalité, de vision des choses, d’organisation, et tout le reste. Il n’y a rien qu’à voir de quelle manière sont gérés la majorité de nos clubs pour s’en apercevoir. Sur le plan technique, le niveau est, de mon point de vue, assez moyen. Je pense que nous pouvons faire beaucoup mieux, si l’on associe les principaux acteurs du football national auxquels nous pouvons associer des spécialistes en la matière, même étrangers soient-ils, sachant qu’ils ont beaucoup d’avance sur nous dans le domaine du professionnalisme. Pour réussir dans cette entreprise, il faut un tout et ce tout là, doit être défini par des connaisseurs de la question. Se mettre sur les bons rails, voilà ce qu’il nous faut. »
Ifticène : « Il faudra réfléchir à d’autres actions à mener »
De son côté le coach blidéen, Younès Ifticène, abonde dans le même sens, en apportant son point de vue : « Vous savez, il est bien beau de parler de professionnalisme de notre football, d’ailleurs, qui ne veut pas y aspirer ? Seulement, pour réussir dans cette entreprise, il faut essayer de chercher à résoudre les vrais problèmes et questions auquel notre football est confronté.
Notamment en termes de moyens, d’infrastructures et de projets, qui soient surtout réalisables. Nous devons veiller aussi à la formation de base de nos joueurs, en leur inculquant une vraie mentalité de professionnels et en appliquant sur le plan purement footballistique un programme qui leur permette d’avoir une bonne base sur le triple plan physique, technique et tactique. Faire émerger les meilleurs, bien s’en occuper et les faire travailler surtout. Car, là où je suis passé, j’ai constaté que la plupart des joueurs ne travaillent pas assez et cela explique quelque part, le niveau moyen de notre championnat. Nos clubs doivent aussi être dirigés par des dirigeants dignes de ce nom, ce qui souvent fait défaut pour beaucoup d’entre eux, avec tout le respect que je dois à leurs responsables. On doit revoir la politique au sein des clubs, car on s’aperçoit que la plupart ont perdu leur culture propre.
Il n’y a plus chez les joueurs l’amour des couleurs. C’est bien de recruter de bons éléments, mais on doit revenir à la formation, comme à l’époque, où chaque équipe disposait d’un noyau dur constitué par ses propres enfants, qui se fondent dans les traditions et la culture du club depuis les jeunes catégories et qui n’ont pour objectif que d’atteindre la catégorie senior du club qui les a formés.
C’est très important et cela aide aussi beaucoup à l’amélioration du niveau de notre football. Malgré tous les problèmes, que nous rencontrons, je dirai que nous avons assisté cette saison à de beaux matches, notamment, lors de la première phase du championnat. Je pense qu’on peut toujours faire mieux, si l’on considère que la réflexion ne doit jamais s’arrêter. Je tiens à souligner qu’il y a aussi un sérieux travail de sensibilisation à mener en direction des supporters, qui doivent faire preuve de sportivité en toutes circonstances, car rien qu’à voir le nombre de rencontres qui se sont déroulées à huis clos, on peut dire que cela demeure très inquiétant. Le huis clos pénalise le football, les équipes et les bons supporters, d’autant plus qu’il n’a rien réglé.
Il faudra réfléchir à d’autres actions à mener et d’autres solutions à préconiser pour endiguer la violence qui sévit dans nos stades. » Ceci n’est qu’un aperçu de technicien sur l’actuelle saison “Une” de l’ère du lancement de la Ligue 1 Professionnelle. La FAF et chaque club fera son propre bilan sur la question et sur les actions à entreprendre à l’avenir, pour le bien-être du football national, pour qu’il puisse enfin répondre aux attentes du large public algérien, qui est réputé être un passionné de ballon et qui respire football.
Mohamed-Amine Azzouz