Et si on parlait bilan ?

Et si on parlait bilan ?

La décision du pouvoir en place de “civiliser” le système politique en le libérant de la tutelle historique du DRS, héritier du Malg, n’est ni plus ni moins que la consécration du principe énoncé par Abane Ramdane au Congrès de la Soummam, à savoir le primat du politique sur le militaire. Revanche éclatante, post mortem, de la tête pensante de la Révolution algérienne, plus de 60 ans après son exécution tragique à Tétouan.

N’est-ce pas cette dimension de l’homme visionnaire qui aurait dû être mise aujourd’hui en valeur, en hommage à son intuition politique, à l’occasion de la célébration de l’anniversaire du déclenchement de la Révolution ? Et non des attaques périodiques et récurrentes contre sa mémoire, comme si son cadavre hantait toujours les auteurs de ces attaques. Car ces attaques contre Abane, au-delà du fait qu’elles témoignent, malheureusement, d’une inguérissable haine de ses adversaires et leurs héritiers à son égard, ont pour conséquence d’attiser les rancœurs et les ressentiments entre les Algériens qui sont, de nos jours, plus que jamais en besoin d’unité dans un monde où les repères sont brouillés. Il est vrai que le devoir de mémoire impose la nécessité de faire la lumière sur “les casseroles” de la Révolution, l’amnésie étant par définition mauvaise conseillère. Il y a eu, et c’est indéniable, pendant les sept ans de guerre, des liquidations physiques de dirigeants, des règlements de compte, des massacres massifs, des guerres de clans, le “wilayisme”, des luttes idéologiques… C’est qu’il n’y a pas de révolution propre. Mais il s’agit aujourd’hui de regarder ces drames en face, mais avec la distance requise pour en cerner les ressorts profonds. Malheureusement, ces derniers temps, l’histoire de la Révolution est devenue un champ de batailles politiciennes  pour solder de vieux comptes entre responsables encore en vie, mais visiblement en perte de lucidité. En lieu et place de ces combats de coqs qui viennent empoisonner davantage le climat politique actuel, n’est-il pas plus sage pour les incurables adversaires d’Abane Ramdane d’appeler, au contraire, à un droit d’inventaire pour savoir où on en est, 61 ans après le déclenchement de la Révolution, de la proclamation de Novembre et de la Charte de la Soummam ? C’est une façon responsable de contribuer à l’écriture du roman national.