«Nous devons avoir une volonté politique deux fois plus forte pour donner aux enfants de harkis la priorité à laquelle ils ont droit. Quand on a beaucoup plus souffert que les autres, quand on cumule plus de handicaps que les autres, la République doit vous donner davantage.» Cette phrase est du président français, Nicolas Sarkozy. Elle est récente et concerne une catégorie d’Algériens devenus par la suite Français parce qu’ils avaient «choisi leur camp» durant la guerre de Libération nationale. Et pour les irradiés algériens des essais nucléaires français? Que fait l’Etat français pour les reconnaître et les indemniser? Ne souffrent-ils pas eux aussi des effets radioactifs, encore plus dangereux que la souffrance endurée par les milliers d’enfants de harkis? Pour quelques milliers d’entre eux, ils vivent avec cette «bêtise humaine» en silence depuis plus de 40 ans.
Et pendant ce temps, la France officielle qui n’a pour l’instant pas demandé officiellement des excuses solennelles pour les expérimentations nucléaires sur des civils algériens, se fend en «rectificatif» dans deux journaux algériens pour préciser que le décret d’application concernant les victimes des essais nucléaires «ne comportera pas d’indication de seuil d’exposition aux irradiations». Le cabinet du secrétaire d’Etat à la Défense et aux Anciens combattants précise qu’une «erreur est intervenue dans la transmission de l’entretien de M.Jean-Marie Bockel aux quotidiens Liberté et El Watan». En clair, toutes les victimes algériennes, et elles sont estimées à peu près à plus de 27.000, seront un jour régularisées de la même manière et auront le même taux de rémunération. Celui ou ceux qui ont été totalement irradiés percevront-ils la même indemnité financière que celui ou ceux qui ont été les moins exposés?
Le seuil de contamination ne sera donc pas pris en compte lors de l’évaluation du handicap et sur le taux d’indemnisation. Et c’est le ministre français, M.J.M.Bockel qui tient à le préciser discrètement. Le comble de l’aberration ! Et toujours selon El Khabar qui cite une source française, les autorités françaises auraient fixé à 500 le chiffre des personnes sur les 27.000 le nombre d’Algériens victimes des essais nucléaires effectués dans le Sud algérien qui seront indemnisés. Comment et pourquoi les autorités françaises ont-elles arbitrairement fixé ce chiffre du moment qu’aucune enquête officielle n’a été réalisée? Sur quelles bases juridiques ou médicales a-t-on sélectionné ces 500 personnes? Selon le quotidien, ces personnes sont considérées «comme étant en contact direct ou indirect avec les essais».
Un haut responsable français, travaillant sur le dossier de l’indemnisation des victimes des essais nucléaires dans le Sud algérien, a indiqué au même journal que l’indemnisation des victimes algériennes concernées par les essais effectués à Adrar et Tamanrasset, «se fera après étude, au cas par cas, et en fonction du travail de la commission mixte d’experts algéro-français». Selon toujours cette source citée par le quotidien arabophone, le dossier prendrait «un temps considérable avant que les victimes ne perçoivent leurs indemnités» et concernerait les 27.000 victimes, entre «militaires et civils», ainsi que les experts qui ont mené ces essais et ayant appartenu au commissariat français de l’énergie atomique et ayant été en contact direct ou indirect avec les essais. Le projet de loi a été annoncé par le ministre de la Défense, M.Hervé Morin, en novembre dernier, et inscrit à l’ordre du jour du Parlement en 2009.
Ce texte, qui concerne la totalité des victimes des essais nucléaires français, sans discrimination aucune, «n’exclut pas la question des populations algériennes», avait déclaré le Premier ministre français, François Fillon lors d’un précédent entretien à El Watan. Il a ensuite ajouté que «même si je ne peux vous en confirmer définitivement l’issue, s’agissant d’un projet de loi qui doit être examiné et voté en termes identiques par les deux chambres du Parlement. Mais mon sentiment est que la question de l’indemnisation des Algériens sera rapidement traitée. Comme M.Morin, ministre de la Défense, l’a indiqué, le principe d’un droit à l’indemnisation des victimes qui ont été exposées lors des essais est désormais posé. Nous devons reconnaître aujourd’hui les victimes, toutes les victimes. L’Etat français a reconnu que les essais nucléaires effectués dans le Sahara algérien entre 1960 et 1963 avaient eu une incidence sur la santé des militaires et des populations civiles. Nous avons arrêté une liste de maladies liées aux effets de la radioactivité. Si le texte est voté, nous accorderons des indemnisations».