Espoirs et inquiétudes des législatives de 2012,La République face à ses démons

Espoirs et inquiétudes des législatives de 2012,La République face à ses démons

L’Alliance verte, fraîchement scellée, est composée du MSP, d’En Nadha et d’El Islah

«Les autorités algériennes ne veulent rééditer ni l’expérience amère des années 1990 ni l’aventurisme tunisien. Elles veulent un soft changement», insistent des sources proches du cercle présidentiel.

Après des années de sang, de douleurs et de larmes durant la tragédie nationale, avons-nous encore le droit à l’erreur? Evitons, à tout prix, de jouer avec le sort de l’Algérie. Les citoyens, les dirigeants du pays, les états-majors des partis et même les chancelleries étrangères, tous s’interrogent sur la couleur de la future Assemblée algérienne et sur la composante de la «dream team» qui formera le nouveau gouvernement. L’Alliance verte, fraîchement scellée et composée du MSP, d’En Nadha et d’El Islah, se trouve au centre de ces interrogations. Dans une confession à L’Expression, l’un des principaux inspirateurs et animateurs de cette alliance, soutient que ce conglomérat qui se propose de canaliser un vote islamiste, attendu en hausse lors des prochaines élections, «est loin d’être de l’aventurisme politique». «La sélection des candidats pour les législatives s’est faite sur des critères stricts de compétences et d’expérience politique. Par ailleurs, ces candidats sont loin d’être des aventuriers mais des républicains imprégnés de nationalisme», confie cette source ajoutant que l’Alliance ambitionne de capter «au moins 30% des suffrages, c’est-à-dire près de 120 sièges sur les 420 qui composeront la prochaine assemblée».

Ainsi, cette Alliance intégrera le rite du passage électoral et entamera la vie politique à la manière du PJD au Maroc et d’Ennadha en Tunisie. En effet, les ingrédients sont réunis et une bataille rude s’annonce déjà entre le FLN, à un degré moindre, le RND, auxquels il faut rajouter le FFS et ensuite les nouveaux partis. On a beau épiloguer et rassurer sur l’issue de ces législatives, l’inquiétude demeure avant le spasme final du 10 mai. La déferlante islamiste fait peur. Mais existe-t-elle réellement? Elle fait d’autant plus peur que la cartographie politique est décousue à quelques semaines du test législatif.

Le FLN arrivera-t-il à garder les 136 sièges qu’il a gagnés lors de la dernière législative? Fera-t-il un score meilleur? Rien n’est sûr. Le vieux parti présenté comme un rempart contre la déferlante islamiste est devenu un champ de bataille où l’on n’a pas encore fait le décompte des cadavres lorsque l’on sait qu’entre les redresseurs et Belkhadem, rien ne va plus.

Le soft changement

En dépit des multiples rencon-tres, les deux responsables, Belkhadem pour la direction du parti et Salah Goudjil pour les redresseurs, n’ont pas pu aplanir leurs différends, à croire que cette situation de statu quo arrange les deux parties. Au sein de la direction, on est plus capté par les privilèges qu’offrent les postes que par l’amorce d’un véritable changement. Le RND, quant à lui, semble miné par des dissensions internes induites par la confection des listes électorales. De nombreux militants quittent le navire RND où ils s’estiment lésés pour aller grossir les rangs des nouvelles formations, dont celles de Benbaïbèche, de Belaïd Abdelaziz et de Amara Benyounès. Enfin, sans oublier le FFS, un revenant sur la scène politique, et à qui les observateurs prévoient une percée lors du prochain scrutin avec une trentaine de sièges.

Abdallah Djaballah, lui, a refusé de rejoindre l’Alliance, notre source soutient que le parti de ce dernier «est loin de constituer une majorité», notamment à l’est du pays. «Abdallah Djaballah est perçu même dans son entourage immédiat comme étant un dictateur», affirme la même source.

Voilà donc qui dessine la véritable ossature sur laquelle sera bâtie la composante de la future assemblée: une relative majorité de l’alliance verte, secondée par le FLN, le RND et le FFS. L’idée centrale réside dans l’espoir que ce nouveau Parlement puisse refléter les réelles aspirations du peuple. «Il sera le premier véritable parlement algérien élu de manière démocratique et transparente», affirment des sources proches de l’entourage présidentiel.

La fin du règne Benbouzid

Les mêmes sources confient également que le nouveau gouvernement qui sera «constitué, au plus tard, vers la mi-juin» sera un melting-pot formé de modernistes, de conservateurs et d’islamistes. C’est ce gouvernement qui se chargera de la révision de la Constitution qui est d’ailleurs perçue comme une véritable Constituante.

L’enjeu de la bataille est immense. Cet attelage balaie les craintes qu’inspire l’Alliance verte soupçonnée d’avoir un agenda caché. «L’instauration de la Charia est loin de constituer la préoccupation de la nouvelle assemblée et du futur gouvernement», rassure-t-on encore du côté de l’encourage présidentiel.

«Les autorités algériennes ne veulent rééditer ni l’expérience amère des années 1990 ni l’aventurisme tunisien. Elles veulent un soft changement», insistent ces sources qui laissent supposer qu’il est question de revoir de fond en comble le fonctionnement de cette assemblée. «Il est même question de revoir à la baisse les indemnités du député qui avoisine les 30 millions de centimes pour ne garder que le salaire originel du corps dont il est issu. Ce dernier percevra uniquement des indemnités, ou ce qu’on appelle les défraiements. De même que l’on ne tolérera plus l’absentéisme du député.» Toujours dans cet esprit de confidence, nos sources révèlent que «deux mots raisonnent dans l’entourage présidentiel: le changement et la jeunesse». «Il y a une réelle volonté politique d’enclencher ce changement, de faire appel à de nouvelles têtes, à de nouvelles compétences jeunes et à des technocrates qui incarnent la composante sociale du pays», susurrent avec beaucoup de conviction nos sources.

Pour conforter cette démarche, le chef de l’Etat a été amené à monter au créneau à plusieurs reprises appelant les citoyens à se rendre massivement aux urnes le 10 mai prochain. M.Bouteflika veut jeter les bases d’un Etat solide, et en finir avec cette éternelle transition et précarité sociale. Les bouleversements politiques de 2011 ont pris forme de différentes manières dans les pays du Maghreb.

Après une décennie ouverte avec les attentats de septembre 2001 à New York, ces événements dans le monde ouvrent un nouveau cycle historique marqué par l’espoir en le changement, la mise au premier plan d’aspirations démocratiques. L’Algérie n’est pas en marge de l’histoire. Elle veut tourner la page pour instaurer un nouvel ordre. Le président Bouteflika a décidé de faire tomber les vieilles peaux. Tous les has been vont passer à la trappe. On croit savoir par exemple, que le nouveau gouvernement sera remanié à près de 90%. «Seuls 6 à 8 ministres seront reconduits dans le nouveau gouvernement.»

On apprend d’ores et déjà que c’est la fin du règne du ministre de l’Education nationale qui a battu tous les records de longévité avec 21 ans à la tête du secteur.

M.Benbouzid se prépare déjà à son nouveau poste d’ambassadeur auquel il a été affecté, à en croire nos sources.

De même qu’il n’est pas exclu qu’un Premier ministre «BCBG» issu de l’Alliance verte soit nommé à la tête du gouvernement mais avec un peu plus de prérogatives. «C’est Amar Ghoul, l’actuel ministre des Travaux publics, qui serait pressenti à ce poste», rapportent encore nos sources qui insistent sur le fait que M.Bouteflika aspire à donner une réelle crédibilité aux réformes qu’il a lancées. «Parce que l’Algérie ne peut pas rester en marge de ce mouvement qui anime les sociétés arabes. Elle doit changer à sa manière et à son rythme», nous confient encore nos sources.