Pratiquement tous les maires qui sont passés par Hassi messaoud ont été emprisonnés. La commune la plus riche du pays est une commune difficile à gérer. Bensaci Mohamed Yacine, maire actuelle de la ville nous parle de la situation de blocage dans laquelle elle se trouve, pourtant en vertu de la loi, depuis près de dix ans.
L’éconews : parlez-nous des projets de développement et de vos priorités pour la commune de Hassi Messaoud.
Bensaci Mohamed Yacine: vous savez, un mois ne me suffirait pas pour tout vous dire au sujet de Hassi Messaoud. Nous sommes un nouveau conseil élu et dont le mandat s’achève en 2017. Ma première priorité est de travailler de concert avec les élus de ce même conseil et de créer une véritable cohésion quel que soit les tendances des parties représentés. L’APC a connu avant de grands conflits et la plupart des maires qui ont occupé le siège que j’occupe aujourd’hui ont été emprisonnés, en raison de l’absence de stabilité des différents conseils et des conflits entre élus. Au bout de trois mois, nous sommes parvenus à créer cette cohésion.
Hassi messaoud, pendant à peu près 10 ans, a connu un blocage à plusieurs niveaux, suite à l’adoption de la loi 05/ 127 qui l’a classé « ville à haut risque », ce qui a eu pour effet de l’isoler par rapport aux autres villes du pays. Pour n’importe quelle construction ou activité, nous sommes obligés d’avoir l’accord de Sonatrach.
Le dernier mot revient donc à Sonatrach pour tout…
Pratiquement le dernier mot revient à Sonatrach pour tout. Elle n’est pas seule, il y a un conseil, il y a la daïra, la wilaya et le ministère de l’énergie. En outre, un conseil spécial a été installé pour la ville de Hassi messaoud. C’est un conseil ministériel dont le P/APC est membre. Il compte des représentants des services de sécurité et aussi ceux de Sonatrach qui doivent avoir leur mot à dire en ce qui concerne les projets de développement au niveau de cette ville.
Après la loi que j’ai mentionnée, les autorités ont décidé de créer une nouvelle ville. Je n’irai pas jusqu’à dire que ce projet est un obstacle pour nous mais rien n’a été dit au sujet des habitants de la ville actuelle de Hassi messaoud. En attendant la mise en place de la nouvelle ville qui demandera bien évidemment des années à être construite, les gens n’ont pas le droit de construire au niveau de la ville actuelle. Le fait que les gens soient incapables de se loger pendant cette période créera des problèmes sociaux. C’est une certitude. La question à laquelle nous n’avons pas de réponse aujourd’hui c’est celle qui concerne l’avenir des habitants de la ville de Hassi Messaoud. L’étude du projet de la nouvelle ville est à sa phase finale mais on ne sait pas avec certitude si tous les habitants de ce qui sera l’ancienne ville vont y trouver des logements.
Je tiens à signaler, d’autre part, que les choses ont connu une légère amélioration dernièrement puisque le décret 05/700 a été modifié par un autre, il s’agit du décret 411 qui a réduit la pression sur la ville en autorisant l’aménagement, des routes et autres travaux mais toujours après consultation du wali qui préside un comité spécial.
Pouvez-vous nous donner plus de détails au sujet de la nouvelle ville ?
La nouvelle ville devrait être installée à 75 km de l’ancienne ville, entre la localité de Touggourt et Hassi messaoud. Il devrait y avoir 18.000 logements pour une population de 80.000 habitants. Le projet est connu dans tous ses détails, mais ce que nous ne savons pas c’est ce qui est prévu pour les habitants de notre ville.
Pour nous, les projets les plus importants pour Hassi Messaoud concernent l’aménagement de la ville. Nous estimons que l’état dans lequel se trouve encore la ville ne reflète pas l’image quel devrait avoir. Nous avons presque honte vis-à-vis de nos visiteurs. C’est pour ça que nous avons décidé d’axer nos efforts sur l’aménagement. Les travaux que nous avons lancés concernent essentiellement l’éclairage public, la propreté de la ville l’aménagement des routes et la réalisation de centres de loisirs. A Hassi Messaoud, il n’y a aucune infrastructure de loisir.
Pouvez-vous nous donner une idée sur la population de Hassi Messaoud et celle des travailleurs des bases pétrolières?
D’après les statistiques de 2007, il y a 45.000 habitants, mais je pense qu’il y en a 60.000. Les bases et les compagnies comptent plus de 120.000 personnes. Les travailleurs qui sont ici, eux-aussi retirent des documents des services administratifs de la commune. Nous comptons aussi 165.000 personnes assurées localement.
L’APC de Hassi Messaoud a-t-elle moins de prérogatives que les autres communes du pays ?
A Hassi Messaoud, si la commune veut construire des logements, Sonatrach peut émettre des objections lorsqu’elle estime que le périmètre de sécurité autour des puits de pétrole n’est pas respecté. Le plus gros problème à Hassi Messaoud c’est le logement et donc la disponibilité des assiettes foncières.
Lors de la visite du wali d’Ouargla en mai dernier, il a parlé de la réalisation de 4000 logements. Peu de temps après cette visite, le premier ministre a dit qu’on ne peut pas réaliser 4000 logements dans une ville appelée à être déplacée. Le wali a déclaré, par la suite, que les 4000 logements seront réalisés dans la nouvelle ville. Après cette déclaration, nous avons été inondés par des lettres envoyées par les citoyens. D’un autre côté, lorsque vous décidez d’éradiquer les logements illicites qui pullulent dans la ville, vous êtes obligé d’offrir aux gens quelque chose en échange.
Qu’en est-il de l’emploi dans votre commune ?
La logique voudrait qu’il n’ait pas de chômage à Hassi Messaoud où il y a 700 entreprises algériennes étrangères. La réalité est pourtant tout autre. Beaucoup de compagnies ne respectent pas les procédures légales de recrutement. Certaines entreprises demandent à un candidat au poste d’agent de sécurité de maitriser l’anglais ou exigent d’un chauffeur de rédiger un rapport en français. Ce sont juste des prétextes pour ne pas recruter les locaux et pour recruter des personnes qui viennent d’autres régions du pays.
Si chacune des 700 entreprises recrutait seulement deux personnes nous parviendront à éradiquer le chômage de notre commune, car je sais que les chômeurs de Hassi Messaoud sont moins de 1400. Personnellement, je ne rate pas une opportunité pour attirer l’attention des entreprises sur cette question.
Vous savez, Hassi Messaoud est la commune la plus riche du pays. Son budget complémentaire pour 2013 est de 3330 milliards de centimes et son budget primitif est de 613 milliards de centimes. Chaque année, la commune de Hassi messaoud accorde des aides financières aux autres communes de la wilaya d’Ouargla, une vingtaine en tout. Dernièrement, nous avons donné 140 milliards de centimes à ces communes.
Beaucoup d’habitants mais aussi d’employés au niveau de la zone industrielle se plaignent des lenteurs administratives. Avez-vous pensé à une solution pour régler ce problème.
Nous avons des projets relatifs à l’informatisation de l’état civil. Nous allons aussi mettre en place des annexes administratives dans différents secteurs de la ville y compris au niveau de la zone industrielle.
Comment voyez-vous l’avenir ?
Il est impossible de construire de logements à Hassi Messaoud en raison de l’existence du projet de la nouvelle ville. Il se trouve justement que notre plus gros problème est celui du logement. La meilleure solution est de permettre aux habitants de s’installer dans des logements préfabriqués en attendant la réalisation de la nouvelle ville. De plus, à Hassi Messaoud il y a des sociétés étrangères qui sont justement spécialisées dans les logements préfabriqués. Il me semble qu’il s’agit de la meilleure solution actuellement.