Même si les mesures prises depuis plus de cinq ans par le gouvernement pour sécuriser les frontières commencent à porter leurs fruits sur le terrain, les contrebandiers sévissent toujours et les chiffres enregistrés pour l’année 2015 montrent l’ampleur du phénomène comparé à l’année précédente.
En effet, les éléments de la Gendarmerie nationale ont enregistré, pendant l’année 2015, des saisies de biens d’une valeur de 73 milliards de centimes. Lors de ces opérations, 193 contrebandiers ont été arrêtés et déférés devant la justice. De leur côté, les services des douanes ont traité 2 299 affaires, soit 50% de plus par rapport à l’année 2014. Au chapitre des importations frauduleuses, 517 dossiers ont été traités, contre 1 782 affaires relatives à l’exportation vers la Tunisie notamment, pour une valeur de 47 milliards de centimes. Les voitures sans document et celles utilisées par les contrebandiers ont enregistré une augmentation considérable, ce qui explique certainement le nombre de véhicules saisis, à savoir 839 durant la même période.
Une lecture des chiffres montre l’ampleur des saisies des différents produits par rapport à l’année précédente, ce qui démontre l’efficacité des nouveaux dispositifs mis en place le long de la bande frontalière. Cependant, et malgré les gros moyens déployés par les autorités, le trafic est toujours présent dans cette région du pays.
Certes, le phénomène n’a plus la même dimension qu’il y a quelques années, surtout après la chute des régimes tunisien et libyen en 2011, mais il continue, toutefois, de causer des pertes considérables à l’économie nationale. C’est également le cas sur le plan sécuritaire, où les risques ont pris des proportions très dangereuses. L’on se rappelle que des quantités importantes d’armes, volées des stocks libyens après la chute de Kadhafi, sont passées entre les mains des islamistes qui continuent à sévir sur le territoire national, mais aussi en Tunisie et en Libye. Face à ce danger permanent, l’appareil sécuritaire algérien a déployé ses forces et a réussi à freiner l’avancée du trafic d’armes, et à faire face à toute tentative d’intrusion d’éléments terroristes sur le sol algérien. Une mission qui nécessitait beaucoup de moyens financiers et logistiques, surtout que côté tunisien, les services de sécurité sont sortis affaiblis de leur révolution.
Tout aussi répréhensible, le trafic de drogue, de carburants, d’électroménagers, de pneus, de tabacs, de friperie, de matériaux de construction, d’électronique est devenu monnaie courante à la frontière algéro-tunisienne. Les “trabendistes” spécialisés en carburant, notamment, ont donc profité de la situation sécuritaire délétère du pays voisin, pour faire fortune. L’argent a été blanchi essentiellement dans le foncier et l’immobilier, d’où la flambée des prix des appartements et maisons ces cinq dernières années. D’un autre côté, pour beaucoup de Tunisiens et de Libyens, l’antique Theveste demeure le paradis de la contrebande. C’est ce qui a d’ailleurs provoqué un déficit en carburants dans cette région du pays. Des chaînes interminables à longueur de journée sont observées quotidiennement dans toutes les stations-service.
Pour y faire face, les responsables des deux pays s’activent pour améliorer la collaboration sécuritaire dans un contexte régional instable par la création de points de contrôle communs et la mise en place de patrouilles mixtes le long des frontières. Il en est de même avec la Libye, à la suite de la réunion qui a regroupé les Premiers ministres algérien, tunisien et libyen, à Ghadamès dans le sud-est de la Libye. Trois nouveaux postes de gardes-frontières ont été inaugurés le 19 octobre dernier par le commandant de la gendarmerie lors de sa visite à Tébessa. Ces postes ont pour missions principalement la défense, le contrôle des mouvements, la lutte contre la contrebande, l’immigration clandestine et la protection de l’économie nationale. Deux autres postes de la Gendarmerie nationale ont été également inaugurés du côté Bouchebka et El-Houijbet, la semaine passée, par le général-major Nouba.
En conclusion, les hauts responsables du pays semblent déterminés à éradiquer le phénomène de la contrebande et à instaurer une sécurisation optimale tout au long de la frontalière algéro-tunisienne, notamment avec l’entrée en service d’une escadrille de trois hélicoptères basée à Tébessa.