Enseignement de Tamazight à Bouira: Toujours au stade du balbutiement

Enseignement de Tamazight à Bouira: Toujours au stade du balbutiement

Les années passent et se ressemblent pour tamazight à Bouira. Au moment où des wilayas du pays cherchent des licenciés en tamazight pour introduire son enseignement à leur niveau, à Bouira, l’on est plutôt à se poser la question si tel ou tel établissement continue à dispenser tamazight ou non. Oui, à Bouira, au fil des années, le sort de l’enseignement de tamazight périclite à vue d’œil.

Malgré les différentes circulaires pondues par le ministère de l’Education nationale, malgré toutes les directives, l’enseignement de tamazight reste encore au stade du balbutiement.

Cette année encore, alors que l’on pensait qu’avec les derniers rappels de la ministre concernant l’interdiction de donner le choix aux parents pour enseigner le tamazight à leurs enfants ou non, l’enseignement du tamazight allait s’épanouir davantage. Nous avons constaté les mêmes problèmes, rencontrés par les enseignants de cette langue sur le terrain.

En effet, et rien que pour le chef-lieu de la wilaya, sur les 14 collèges existants, seuls 7 d’entre eux dispensent le tamazight. Pire, même au niveau de ces collèges, il existe des directeurs d’établissements comme celui d’Ibn Khaldoun, où l’enseignement de tamazight est toujours perçu comme facultatif. Sinon comment expliquer ces choix concernant la suppression de cet enseignement chaque année pour les élèves de 4e AM, alors que son enseignement est régulièrement suivi durant les trois niveaux. Interrogé sur ce point précis, le directeur de l’éducation M. Mourad Bouziane, n’a pas trouvé mieux que de nous dire que le problème réside au niveau de cet établissement ; sans plus.

A propos de l’enseignement de tamazight en général à travers la wilaya de Bouira, le premier responsable du secteur au niveau de la wilaya dira que la priorité est donnée au cycle primaire pour essayer de généraliser son enseignement du moins dans la partie berbérophone de la wilaya, afin qu’une fois au collège le problème rencontré actuellement, à savoir des collèges qui se retrouvent avec une partie d’élèves qui a suivi le tamazight au primaire et une autre partie qui ne l’a pas suivi, ne sera plus posé. Pour lui, la première phase consistait à faire dans le qualitatif avec le recrutement d’enseignants licenciés ou en master en tamazight. Il s’agira de créer un noyau dur constitué d’enseignants de qualité pour aller sereinement vers d’autres régions de la wilaya afin que l’opération de généralisation de l’enseignement de tamazight soit réussie.

Cela étant, du côté des enseignants et de la société civile, c’est le flou total qui entoure l’enseignement du tamazight surtout avec la dernière sortie de la ministre de l’Education nationale. L’enseignement du tamazight continue à être perçu comme étant facultatif et non obligatoire et par voie de conséquence, tout directeur d’établissement peut demander des postes en s’appuyant sur la fameuse demande sociale, ou faire carrément l’impasse.

De là à parler de la généralisation de l’enseignement de tamazight, il faudra peut-être des siècles, surtout quand on se retrouve avec une surcharge des programmes et des matières obligeant même les parents berbérophones à éviter à leurs enfants l’enseignement de cette langue afin de soulager un tant soit peu leurs emplois du temps. D’ailleurs, à ce sujet, et plus particulièrement au niveau du chef-lieu de wilaya, certains collèges comme le CEM Mohamed-Khider où le tamazight n’est pas dispensé, la majorité des parents essaie d’y inscrire leurs enfants. Résultat : une surcharge avec parfois plus de 50 élèves dans une classe. Un problème auquel s’est attaqué le DE dès le début de l’année non pas en introduisant l’enseignement de tamazight dans ce collège mais en invitant le directeur à transférer certains élèves vers d’autres établissements scolaires.

C’est pour dire que tant que le caractère facultatif de l’enseignement du tamazight prévaut, la généralisation de son enseignement ne pourra jamais se faire. Et tant que cette généralisation n’est pas appliquée — d’une manière graduelle bien sûr — le fossé ou la cassure existante entre ceux qui pensent que leur langue maternelle est le tamazight et que, rien que pour cela, il faille que son enseignement soit rendu obligatoire par l’Etat, et ceux qui pensent que la langue arabe qui est la langue du Coran, est largement suffisante pour unifier le peuple algérien musulman dans sa totalité continuera à s’élargir. Espérons que les responsables politiques trouveront une solution à ce problème afin que tout algérien se sente épanoui dans son propre pays avec sa propre langue, sa culture et ses traditions, c’est-à-dire dans la diversité.

Cela étant, et pour revenir à la rentrée scolaire 2018-2019, le DE, Mourad Bouziane la juge satisfaisante dans l’ensemble puisque, contrairement aux années précédentes où le secteur ne retrouve une certaine stabilité qu’après plusieurs semaines, cette année, la rentrée scolaire a eu lieu normalement à travers les quatre coins de la wilaya.

Aussi, et concernant certaines écoles primaires qui ont eu des problèmes d’insalubrité, d’étanchéité ou encore de surcharge ou de manque d’encadrement, le DE dira que, même si l’entretien de ces écoles relève des communes, la DE a pris ses devants et a réussi en moins de deux semaines à sensibiliser l’ensemble des APC quant à la prise en charge des ces problèmes soulevés, comme l’entretien des classes, des cours de récréation, des sanitaires, et même des travaux d’étanchéité et de chauffage pour certains établissements scolaires.

Au sujet des surcharges, le DE dira qu’une fois que tous les élèves inscrits au sein d’une école, comme c’est le cas pour l’école Bouraï, nouvellement ouverte au niveau du nouveau pôle urbain de Bouira, des nouvelles divisions ont été créées avec un système de double vacation afin que les classe ne dépassent pas les 40 élèves. Présentement, au niveau de cette école, et avec le système de double vacation, les divisions pour les 5 niveaux se situent entre 29 et 36 élèves. C’est dire …

Le problème de l’introduction de tamazight soulevé chaque année, les rappels de la ministre et le tapage fait autour de nombre de wilayas qui ont introduit le tamazight dans le système éducatif (et qui ont atteint les 41 wilayas), ne règlent en rien le problème fondamental : celui du caractère facultatif de son enseignement.

Selon beaucoup d’enseignants de tamazight, l’enseignement de tamazight est facultatif et rien n’oblige un directeur d’établissement ou une région, à enseigner cette langue, et en même temps, il est interdit aux chefs d’établissements de faire signer aux parents le formulaire pour choisir ou non l’enseignement de tamazight pour son fils ; rien n’est clair dans cette démarche. Que celui ou celle qui a compris quelque chose dans ce micmac nous fasse signe.

Y. Y.