Le pays a failli sombrer dans la violence
Selon le rapport, le groupe de Issaad Rebrab détient à lui seul 74% des parts de marché dans l’huile et près de 68% pour le sucre.
La publication du rapport de la commission d’enquête parlementaire chargée de faire la lumière sur les évènements graves de janvier dernier, dus à la hausse brutale des prix de sucre et de l’huile ainsi que 2 autres produits alimentaires de large consommation sur le marché national, a été adoptée à l’unanimité par les députés présents hier à la séance plénière de l’APN. Encore une fois, la position de monopole du groupe Cevital est mise en exergue dans ce rapport dont le règlement intérieur de l’assemblée exclut tout débat sur le contenu. Il est fait état que l’envolée des prix sur le marché international et le monopole détenu par l’opérateur sont en gros à l’origine des émeutes qui ont secoué le pays. Selon le rapport, Cevital détient à lui seul 74% des parts de marché dans l’huile et près de 68% pour le sucre. Cela en évidence a contribué en partie à la flambée des prix et donc à l’éclatement des émeutes aux quatre coins du pays. «Le monopole exercé par cet opérateur sur le marché national, a engendré une faiblesse dans l’organisation du marché», a-t-on conclu.
Cependant, le rapport présenté hier, s’apparente à un simple constat, dans la mesure où les responsabilités n’ont été situées que vaguement. Interrogé sur l’étrange séparation entre la flambée des prix et les émeutes qui s’en sont suivies, le président de la commission d’enquête dira: «Notre objet d’enquête se limitait à chercher les raisons derrière la flambée subite des prix.» Le rapport vague dans ses conclusions dans la mesure où il n’a pas osé situer clairement les responsabilités, pèche par le fait qu’il n’envisage aucune suite à donner à ce prétendu travail de longue haleine. «On n’a pas vocation d’une commission judiciaire», dira à ce propos le président de la commission, le Dr Kamel Rezig, député du FLN. Cela contredit les déclarations du président de l’APN faites récemment. «L’enquête sera suivie d’effet. Il n’y a pas de doute», a-t-il promis, dans un entretien à l’APS. On attendait seulement que les conclusions identifient les causes pour qu’on puisse situer les mesures, réglementaires ou législatives, qui doivent être prises. «C’est donc essayer d’identifier avec le plus de précision possible les causes et les mécanismes qui ont abouti à cela (l’augmentation des prix) pour éviter que cela ne se reproduise et de prendre les mesures réglementaires ou législatives sur la base des conclusions de cette commission», a-t-il expliqué.
Selon lui, quelle que soit la nature de la faute, les responsables doivent rendre des comptes, qu’il s’agisse d’entreprises publiques ou privées. Le recul est justifié par le fait que le dossier des émeutes était déjà entre les mains de la justice. D’ailleurs, alors que tous les départements ont été entendus la commission n’a pas pu ou voulu entendre celui de l’Intérieur. Dans ce contexte, on est en droit de demander le rapport ou les conclusions des autorités judiciaires qui «ont saisi le dossier des événements troublants», selon le même député. Ce député a précisé qu’«il n’était pas du ressort de la commission d’en imputer la responsabilité à des personnes ou des institutions, mais plutôt de définir les causes et les circonstances ayant causé la pénurie de certains produits de large consommation». L’imposition de documents et du chèque, une mesure gouvernementale liée à l’usage des chèques pour les paiements au-dessus de 500.000 dinars (5000 euros), aux grossistes par cet opérateur à la veille des émeutes, a également contribué à envenimer les tensions avec le marché parallèle, selon le rapport.
Les émeutes de janvier étaient survenues dans un climat de tension régionale avec la révolte en Tunisie, et en pleine flambée des prix des produits de première nécessité en Algérie. En outre, les grossistes ayant refusé de répondre à la convocation de la commission ne seront nullement inquiétés si non que «cette affaire est remise entre les mains du département du commerce», selon le premier responsable de cette enquête. Il a indiqué également que parmi les dysfonctionnements enregistrés figuraient le manque de certains produits de large consommation importés ou produits au niveau national et le déséquilibre en matière de distribution.
Le gouvernement avait rapidement réagi en adoptant des mesures de baisse pour l’huile et le sucre. Il avait aussi promis de continuer à subventionner d’autres produits de première nécessité. En fin, la commission recommande de revoir la question des subventions et le renforcement des outils de contrôle telles la mise en oeuvre du Conseil national de concurrence gelé depuis des années et la création d’une cellule de veille économique qui sera rattachée à la présidence, etc.