Sans préjuger sur le destin de la démocratie tunisienne encore balbutiante, les nouvelles qui parviennent de ce pays sont plutôt mitigées. D’un côté, on enregistre la naissance de la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT) une centrale syndicale de gauche, qui avait été interdite sous Ben Ali, et de l’autre, des affrontements entre islamistes et laïques autour du port du voile à l’université.
Ce qui est sûr, c‘est que jamais le contexte international n‘a autant souri qu‘aujourd‘hui aux islamistes. Partout la déferlante verte donne le tournis aux laïcs ainsi qu‘aux pouvoirs en place. Dans le sillage de la Tunisie, le Maroc, et l‘Egypte, les islamistes algériens recommencent à espérer.
Mais voilà à la différence de ces pays où les islamistes avaient toujours maintenu une certaine distance à l‘égard de leurs gouvernements respectifs en s‘avisant de ne pas trop se mêler à la gestion des affaires publiques, chez nous désormais, une partie de ce courant politique fait partie intégrante du système depuis plus de 10 ans.
Forcément leur crédibilité ne peut être mise sur le même pied d‘égalité que leurs homologues tunisiens ou marocains, qui ont su réaliser un parcours vierge de toute compromission. On peut expliquer du reste les velléités d‘émancipation, ( ô combien tardives) par rapport à la coalition présidentielle du Mouvement de la société pour la Paix (MSP) que préside Bouguerra Soltani, par cette recherche désespérée d‘une virginité politique d‘un parti qui a d‘islamiste que le nom.
Abdallah Djaballah qui s‘estime être logé à meilleure enseigne vient du reste de rejeter l‘offre d‘union que lui a faite Bouguerra Soltani.
Adoptant un air hautain, le fondateur du Front pour la justice et le développement (FJD), en attente d‘agrément, a répliqué par un « je ne suis pas intéressé » qui renseigne assez sur les ambitions d‘un Djaballah qui s‘estime le mieux placé pour fédérer les forces islamistes déçues par les formations politiques censées répercuter en haut lieu leurs préoccupations. Soltani qui voit le sol se dérober à ses pieds commence déjà à paniquer car il se susurre que son rival, Djaballah, lui a déjà pris nombre des cadres de son parti.
Devançant tout le monde Soltani veut réparer au plus vite les erreurs ou bien dénoncer tout ce qu‘il n‘avait pu faire par le passé. A Bordj Bou-Arréridj, il appelle à un « front national contre la fraude électorale » comme si, révolution tunisienne oblige, il pensait qu‘il n‘a jamais été aussi près du but et que le compagnonnage avec le pouvoir, est devenu de plus en plus pesant.
On en arrive donc à ce paradoxe qui fait de la scène politique algérienne, un champ de compétition très attractif pour les islamistes, mais morose pour les démocrates qui continuent, le moins que l‘on puisse dire, de se murer dans un désœuvrement préoccupant.
Larbi Graïne