Encore un changement à la tête de sonatrach, Un mauvais signal pour l’étranger

Encore un changement à la tête de sonatrach, Un mauvais signal pour l’étranger

Le limogeage du président-directeur général de Sonatrach constitue un signal mauvais pour l’étranger. Un changement, au demeurant incompréhensible, qui soulève le problème du déficit managérial ainsi que le rôle effacé du Conseil national de l’énergie.

Depuis hier, le vice-président de l’activité Amont (exploration) de Sonatrach, Saïd Sahnoun, assure l’intérim à la tête de la compagnie pétrolière en remplacement de Abdelhamid Zerguine qui en était le P-dg depuis la fin 2011. Un changement incompréhensible, dans la mesure où ses motivations exactes n’ont pas été officiellement présentées.

Ce qui laisse toute latitude aux supputations et incertitudes. Certes, l’éviction de Abdelhamid Zerguine intervient dans le contexte de baisse des recettes d’exportations d’hydrocarbures. Durant les trois dernières années, la compagnie pétrolière a, en effet, enregistré une diminution de son chiffre d’affaires d’au moins 10 milliards de dollars, relève l’économiste et universitaire Abderrahmane Mebtoul, évoquant également la réduction drastique des volumes d’exportation. Une situation que l’on pourrait imputer à la responsabilité du dirigeant évincé même si l’Algérie ne peut agir sur la volatilité des cours.

Comme le départ de Zerguine pourrait s’expliquer aussi par l’existence d’un conflit d’ordre personnel ou lié à des divergences de vision entre le désormais ex-Pdg et le ministre de l’Energie, Youcef Yousfi. Incertain à ce propos, l’économiste Abderrahmane Mebtoul estime toutefois que le P-dg d’une compagnie énergétique ne doit pas s’immiscer dans la définition de la politique énergétique du pays qui relève des prérogatives du Conseil national de l’énergie (CNE).

Or, le CNE n’a jamais été activé durant les deux dernières décades, pourrait-on observer, et ses missions sont exercées de facto par le ministère de l’Energie. Voire, le limogeage survient dans un contexte de «malaise », d’«ambiguïté» sur le plan institutionnel et opérationnel pour l’entreprise, note un consultant et spécialiste des questions bancaires.

Constatant que l’entreprise assume un statut hybride, celui de maître d’ouvrage et maître d’oeuvre dans le domaine énergétique, ce consultant appellera ainsi à davantage de clarté en ce domaine et à lever cette ambiguïé. Ce faisant, le changement fréquent de P-dg du groupe durant les dernières années favorise l’instabilité de la compagnie et «n’est pas bon pour l’image» de celle-ci et du pays, considère le professeur des universités.

En termes d’impact, l’éviction constituerait un mauvais signal pour l’étranger, relèvent d’autres économistes qui font un lien avec l’attaque terroriste perpétrée en janvier 2013 contre le complexe gazier de Tiguentourine (Illizi), les atermoiements de la compagnie norvégienne Statoil à reprendre ses activités…

Selon ces analystes, le changement opéré, a contrario des principes de l’orthodoxie régissant le fonctionnement des grandes entreprises dans le monde, constitue un indice négatif pour la visibilité de Sonatrach. Soit une «catastrophe» pour l’attractivité du pays aux investissements extérieurs, la crédibilité des options économiques internes et pour le positionnement à l’international, met-on en avant.

De surcroît, l’économiste Abderrahmane Mebtoul relève que Sonatrach «souffre» d’un manque de management stratégique, de gestion optimale des coûts et des ressources, et en matière de transparence… Un déficit managérial dont l’économiste, professeur et expert en management Abdelhak Lamiri agréera également. Il ne suffit pas de changer de personnes s’il n’y a pas un changement, une évolution et une mutation de la gouvernance, considère le professeur Lamiri, hors tout «subjectivisme ».

Ce professeur relève ainsi l’opportunité de se doter d’un plan de développement stratégique et cohérent, concernant tant l’entreprise que l’économie nationale. En outre, le management efficient obéit à l’instauration de contrats de performance liant le manager, au choix d’outils managériaux conformes, à la fixation d’objectifs clairs et chiffrés, rappelle le P-dg de l’Institut international de management, qui évoque également la nécessité de valoriser les compétences bien formées, dotées d’une expérience avérée, savoir rajeunir l’encadrement dirigeant et opérationnel…

C. B.