En poussant le groupe islamiste à reprendre les armes, le gouvernement malien ne fait là que saper les efforts accomplis par l’Algérie, notamment afin d’amener certains groupes occupant le nord du Mali à se démarquer des djihadistes.
La promesse de cessation des hostilités faite par le groupe islamiste Ansar Dine, présent au nord du Mali, grâce à la médiation de l’Algérie et du Burkina-Faso risque de voler en éclats en raison, apparemment, de l’entêtement du nouveau pouvoir à Bamako à ne pas considérer cette initiative visant pourtant à isoler les autres groupes extrémistes qui écument toute la région nord du pays.
Ansar dine a en effet annoncé jeudi, qu’il avait décidé de retirer “l’offre de cessation des hostilités”, faite en décembre à Alger. C’est le chef du groupe, Iyad Ag Ghaly, qui l’a annoncé dans un communiqué publié par l’agence privée mauritanienne Sahara Médias.
“Ansar Dine décide de retirer l’offre de cessation des hostilités concomitamment avec les négociations menées à Ouagadougou” autour du président burkinabé Blaise Compaoré, médiateur pour l’Afrique de l’Ouest dans la crise malienne, a déclaré Iyad Ag Ghaly dans ce texte.
Le 21 décembre à Alger, Ansar Dine et le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA, rébellion touareg) s’étaient dits prêts à cesser les hostilités au Mali et à négocier avec les autorités, au lendemain du feu vert du Conseil de sécurité de l’ONU pour l’envoi d’une force internationale pour chasser les djihadistes occupant le nord du pays.
Dans son communiqué, Iyad Ag Ghaly a accusé le gouvernement malien “de mépriser cette offre à laquelle il n’a jamais répondu positivement”, alors que cette proposition a été “arrachée” par des intermédiaires au terme de “rudes négociations”. Il s’est dit toutefois disponible pour “l’ouverture de nouvelles négociations même si (Ansar Dine) n’a jamais décelé une volonté réciproque chez l’autre partie”, en référence au gouvernement malien.
Selon lui, Bamako “mène une campagne sans précédent” et “recrute des mercenaires” pour écraser les populations du nord du Mali, dans une allusion à l’intervention militaire en préparation.
Le communiqué d’Iyad Ag Ghaly est publié deux jours après qu’une délégation d’Ansar Dine a remis au président burkinabé à Ouagadougou une “plateforme politique”, selon une source proche du médiateur burkinabé. Le contenu de ce document n’a pas été révélé, pas plus que la composition de la délégation, qui a quitté le jour même (mardi) le Burkina Faso. Ansar Dine est l’un des groupes islamistes armés dominant le nord du Mali depuis juin, avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), tous prônant l’application de la charia (loi islamique) au nom de laquelle ils commettent diverses exactions dans leurs zones d’influence.
Ces groupes islamistes et le MNLA avaient pris ensemble le contrôle de ces vastes régions désertiques fin mars-début avril, après deux mois et demi d’attaques contre l’armée malienne et quelques jours après un coup d’État militaire à Bamako le 22 mars. Les djihadistes ont ensuite évincé du Nord, fin juin, leurs ex-alliés rebelles touareg.
Sur le terrain, les exactions contre les populations se poursuivent, selon des témoins. Mercredi dernier à Tombouctou (Nord-Ouest), une femme accusée de concubinage a été battue en public puis transportée évanouie à l’hôpital.
Les islamistes obligent les femmes à se recouvrir la tête et tout le corps, et les hommes à porter des pantalons courts.
Des jihadistes ont été vus ces derniers jours procédant eux-mêmes à la coupe de bas de pantalons d’habitants en pleine rue, en usant de ciseaux ou de lames.
H. S./Agences