En pillant le sable, ils nous ont fait perdre 35 km de plage depuis 2000,Les brigands des temps modernes

En pillant le sable, ils nous ont fait perdre 35 km de plage depuis 2000,Les brigands des temps modernes

Avec un camion et un bon pactole financier on peut faire de bonnes affaires en Algérie. Il suffit d’extraire le sable de mer et de le revendre à bon prix comme matériau de construction.

L’extraction frauduleuse du sable de mer a pris une ampleur inquiétante en Algérie au cours de ces cinq dernières années. Si l’Etat ne réagit pas fermement et rapidement, les conséquences risquent d’être dramatiques et irrémédiables. La sonnette d’alarme a été d’abord tirée par le président du Comité national des marins pêcheurs (Cnmp), affilié à l’Union générale des commerçants et artisans algériens (Ugcaa), lors d’une conférence de presse. «Si on ne prend pas les mesures nécessaires pour arrêter cette mascarade, on ira droit vers la catastrophe marine», a-t-il averti. Il a évoqué le phénomène qui détruit l’écosystème et, par ricochet, porte préjudice à l’économie nationale, en l’occurrence l’extraction de sable des plages. «Depuis l’année 2000, on a perdu 35 km de plage à cause du vol de sable de littoral», affirme-t-il. En un mot, la situation est de nature à provoquer un désastre écologique. Selon des associations de défense de la nature, cette activité, à la limite de la légalité, a englouti chaque année plus de 370 000 mètres cubes de sable. «Les plages du littoral algérien sont condamnées à mourir de dessèchement», estiment les défenseurs de l’environnement.

Pour leur malheur, les plus belles d’entre elles sont à proximité des plus grandes villes comme Alger, Oran ou Annaba où la crise du logement est si grave. Les autorités prévoient d’y construire quelque 100 000 logements collectifs. Les besoins en matériaux de construction, et donc en sable, sont énormes. La loi autorise, bien sûr, l’exploitation des sables alluvionnaires tout comme l’octroi par les communes d’autorisations d’extraction de sable de mer à des particuliers mais sous certaines conditions.

En théorie, ces prélèvements sont strictement réglementés, avec pesée et bons de livraison dûment signés par les revendeurs de matériaux de construction ou les entrepreneurs. Mais une association, qui milite pour la protection des sites côtiers, dénonce le laxisme sinon la complicité des autorités locales dans ce pillage organisé, particulièrement dans la wilaya de Tipaza. Ce trafic rapporte beaucoup à la mafia du sable. Sous le couvert de projets d’investissements fictifs dans de petites entreprises locales (fabriques de parpaings, hourdis, briques), elles arrivent à obtenir la concession de terrains près des zones côtières. Au passage, elles paient 50 000,00 DA, vite remboursés puisqu’elles revendent le sable qui coûte plus de 10 000,00 DA le camion de trois tonnes. Ces concessionnaires empochent jusqu’à 1 million de dinars par mois. Une association pour l’information et la défense d’un environnement sain, a mis en place des réseaux d’alerte régionaux pour traquer les fraudeurs, ou comme elle les appelle les «grossistes» du sable. Une autre association baptisée Les éboueurs de la mer tente, elle aussi, de lutter contre ce pillage.

R.K