Ainsi que Liberté l’annonçait dans son édition de samedi et bien que l’ information ne soit pas encore officielle, des sources sûres confirment qu’après environ 18 mois de négociations avec les pouvoirs publics algériens, le numéro un mondial de l’assurance a finalement conclu au cours des dernières semaines un accord avec des partenaires algériens en vue de créer une filiale dont le capital sera détenu à 49% par l’assureur français et à 51% par des partenaires algériens qui sont d’une part la BEA, première banque algérienne et d’autre part le Fonds national d’investissement (FNI).
La position initiale de l’assureur français consistait depuis plus d’un an à réclamer sans succès l’agrément des deux filiales de droit algérien contrôlées à 100% créées en décembre 2008.
C’est cette position qui a été infléchie en ouvrant la voie à une solution négociée avec les pouvoirs publics algériens. Le numéro un mondial du secteur a donc conclu une association avec des partenaires algériens dans le cadre des nouvelles règles du jeu régissant l’investissement étranger. Plusieurs compagnies privées s’étaient montrées intéressées par une telle association.
Une option qui n’a pas retenu l’attention d’AXA et de la BEA qui reste son partenaire privilégié. La nature des compagnies à créer, limitée au seul domaine des assurances de personnes ou incluant également celui de l’assurance-dommages ainsi que le prévoyait la stratégie initiale du groupe n’est pas encore connue et devrait être précisée dès l’annonce officielle de la conclusion de ce partenariat qui devrait intervenir dans les prochains jours.
La mise en œuvre de cet accord semblait jusqu’à ces dernières semaines contrariée par des problèmes liés à la répartition du capital dans la société ou les filiales dont la création a été programmée. C’est seulement au cours des dernières semaines que des informations officieuses ont laissé entrevoir un déblocage de la situation.
Des partenaires de premier plan
La conclusion de cet accord constitue, sans aucun doute, en raison de la qualité des partenaires engagés et de leurs ambitions, une étape importante pour le développement du secteur des assurances en Algérie .
Poids lourd de l’assurance mondiale avec un chiffre d’affaires supérieur à 100 milliards de dollars, le groupe AXA confirme donc son intérêt pour le marché algérien en dépit de l’instauration d’un nouveau cadre de l’investissement qui a suscité à plusieurs reprises au cours de l’année écoulée des rumeurs sur son retrait que les représentants du groupe en Algérie se sont toujours refusés à commenter.
Dans l’une des rares interviews accordées à la presse, son principal représentant, M. Adlane Mecellem, livrait voici près d’une année quelques éléments sur la stratégie initiale de son groupe sur le marché algérien. L’objectif d’ AXA en Algérie est d’“être un assureur généraliste”. Dans le domaine de l’assurance-dommages, qui représente en Algérie l’essentiel du marché, AXA veut apporter de “l’innovation en matière d’offres de produits”, mais aussi et surtout “de la qualité de service dans des domaines tels que les délais de remboursement, par exemple”.
C’est aussi au développement de l’activité, quasiment vierge en Algérie, des assurances de personnes que le groupe souhaite s’atteler. Il souligne qu’au Maroc, le décollage du secteur des assurances a été porté par le développement des assurances de personnes ; la filiale locale du groupe y ayant contribué notablement.
AXA Algérie veut s’appuyer sur l’expertise d’un groupe international dont près des 2/3 du chiffre d’affaires sont réalisés dans les branches vie, épargne et retraite pour imprimer une nouvelle dynamique au marché algérien. Son offre doit inclure à la fois des produits de prévoyance, comme le capital-décès qui existe déjà en Algérie, mais aussi des “produits d’épargne, des retraites complémentaires ou des produits d’assurance-santé pour lesquels il existe une véritable demande aujourd’hui en Algérie”.
La qualité des partenaires se trouve aussi du côté algérien qui détiendra donc la majorité du capital dans la nouvelle entité. La BEA, première banque algérienne et qui vient d’annoncer des bénéfices record de plus de 33 milliards de dinars en 2009, confirme également son engagement dans le secteur des assurances.
Un premier “accord de principe” avait été conclu voici plus d’un an avec AXA dans le domaine de la bancassurance. Le nouvel accord, fortement appuyé par les autorités financières algériennes, est plus ambitieux et ne portera pas seulement sur la distribution des produits d’AXA. à travers la création d’une société commune détenue majoritairement, le niveau d’engagement de la BEA change manifestement d’échelle et s’apparente à une option stratégique de diversification des activités de la banque. La nature et la qualité du troisième partenaire du nouvel attelage sont également intéressantes à plus d’un titre.
La prise de participation du Fonds national d’investissement, si elle est prévue par les statuts de cette institution publique créée voici près de 18 mois, est tout d’abord une première dans une entreprise constituée en partenariat avec un investisseur étranger. L’intervention de ce bras financier de l’état algérien constitue, en outre, une indication sans ambiguïté sur le degré de soutien dont la création de la nouvelle entreprise bénéficie de la part des autorités financières algériennes.
Souhaitons enfin que cette prise de participation soit l’occasion de débloquer l’information sur une institution dont on attend beaucoup et sur les activités de laquelle le public algérien a dû se contenter jusqu’ici de communiqués annonçant sa création et de quelques indiscrétions.
Un nouveau paysage pour le secteur des assurances
L’arrivée d’AXA en Algérie ne constitue pas un évènement isolé. Rappelons qu’une première annonce a été déjà faite au mois de mai dernier de la bouche même du président de l’Association des assureurs algériens, M. Lamara Latrous, qui confirmait la création prochaine d’une société d’assurance de personnes avec pour associés principaux la SAA, la Badr et la BDL d’une part, et la Macif d’autre part.
Selon M. Latrous : “Avec 34% du capital, la compagnie française assurera le management de la nouvelle compagnie alors que les entreprises algériennes en assureront la présidence du conseil d’administration”. La Macif ouvrait ainsi la voie en étant la première compagnie d’assurance étrangère à s’accommoder de l’obligation de s’associer à un ou plusieurs actionnaires nationaux majoritaires.
Un accord avait en outre été signé par la Cnep et la Cardif, filiale spécialisée du groupe BNP Paribas, le 27 mars 2008, exploitant pour la première fois en Algérie les possibilités ouvertes par la loi sur la bancassurance. Il prévoit la distribution à travers le réseau de la Cnep, qui dispose d’environ 200 agences et compte près de 3 millions de clients, des produits d’assurance élaborés par Cardif El-Djazaïr pour le marché local.
Les produits concernés par cet accord sont essentiellement des produits de prévoyance : assurance-décès, assurance-vie ou des produits d’assurance-dommages liés aux crédits hypothécaires qui constituent l’essentiel de l’activité de la Cnep. Les premiers “packages” de produits ont été mis sur le marché au 2e semestre 2009.
C’est, avec le soutien actif des pouvoirs publics algériens, un nouveau décor qui est en train d’être planté dans le secteur des assurances. à terme, il devrait, grâce à l’intervention des banques nationales et des compagnies étrangères, booster le secteur en remodelant profondément les conditions de la concurrence