Ex-soutien de Kadhafi, les tribus touaregs en Libye continuent le combat pour le contrôle d’un territoire aux frontières de l’Algérie.
Les derniers accrochages, passés relativement inaperçus, ont eu lieu le week-end dernier, assure l’ex-diplomate français Patrick Haimzadeh, spécialiste de la Libye. Les combats, qui ont fait une douzaine de morts, se sont déroulés autour de la ville de Ghât, toute proche de l’Algérie. Ils opposaient des Touaregs à des unités de la puissante tribu Zintane, qui tient le haut du pavé dans la Libye nouvelle et n’entend pas limiter son influence à sa région d’origine, le Nord-Ouest.
Les Zintanes avaient déjà tenté, en vain, de forcer les Touaregs à déposer les armes dès la chute de Tripoli, en août dernier. Les «hommes bleus» étaient vus par les Zintanes comme des «collabos», dit Haimzadeh, et, de fait, nombre d’entre eux avaient combattu jusqu’au bout dans les rangs des troupes kadhafistes, tout comme des centaines de Touaregs maliens.
Les Zintanes n’ont pas baissé les bras. Beaucoup d’entre eux se sont depuis implantés dans la région. Les combats du week-end ont été déclenchés par la prise en otage d’un Touareg par les Zintanes. Depuis, le feu couve sous la cendre, comme dans la plus grande partie du pays. «Il n’y a pas un endroit du territoire libyen où les milices ne se soient pas affrontées depuis la libération», dit Patrick Haimzadeh.
Une anarchie rampante
Le gouvernement du Conseil national de transition (CNT), incapable d’asseoir son autorité, a admis pour la première fois mercredi que cette anarchie rampante pourrait l’obliger à reporter l’élection d’une Assemblée constituante, prévue en juin. Jeudi, un cessez-le-feu précaire a mis un terme à quatre jours de combats entre une milice berbère, le groupe ethnique majoritaire à Zuwara, près de la frontière tunisienne, et des miliciens arabes des villes voisines d’al-Djoumaïl et de Regdaline. Samedi, un autre cessez-le-feu était prononcé après de durs combats qui avaient fait 147 morts entre les Toubous, une ethnie noire implantée en Libye et au Tchad voisin, et des groupes d’anciens combattants antikadhafistes. Cette miniguerre avait semble-t-il était provoquée par un vol de voiture.
Le schéma est toujours le même, explique Haimzadeh. «Derrière la lutte pour le contrôle de sources de revenus, souvent dans des régions frontalières, on retrouve aussi des affrontements entre des groupes d’anti-Kadhafi et d’autres qui se sont battus jusqu’au bout du côté du dictateur.» La libération de la parole fait ressurgir de vieilles haines sur Facebook ou dans les commentaires des journaux sur Internet, où l’on peut lire des phrases comme: «Il faut rayer les Toubous de la carte de la Libye.»