Le système de gestion et de gouvernance traditionnel, connu en Kabylie et dans quelques autres régions du Maghreb, sous le nom de «thadjmaït» est toujours en vigueur dans la quasi-totalité des villages kabyles.
thadjmaït est une forme d’organisation et de gestion des affaires courantes très ancienne en Kabylie. Ce terme, souvent traduit par «comité», «assemblée» ou «conseil», est une tradition ancienne et une autorité dont le rôle principal est de réguler les affaires courantes des villages.
Cette assemblée assure la prise en charge citoyenne des affaires de la cité en recourant au droit coutumier élaboré en tenant compte des spécificités sociales locales. Cette forme de gestion de la société existe toujours malgré les transformations qu’a connues la Kabylie.
En effet, les comités de villages continuent à y activer, entre autres la «Touisa» pour réaliser des projets d’utilité collective sans l’aide de l’Etat, à statuer dans les conflits qui opposent les villageois. Et ce, suivant «Lqanoun tadarth» (la loi du village), une sorte de Constitution non écrite, à laquelle sont soumis tous les villageois. L’assemblée du village est tellement souveraine que tout changement au niveau des lois ou du comité doit avoir son aval, elle est convoquée périodiquement, mais aussi en cas d’urgence. La convocation des citoyens pour y assister – généralement le week-end – se fait par affichage dans les cafétérias, sur les places publiques ou de bouche à oreille.
Le comité de village est reconnu par les autorités et représente dans certains cas l’interface entre les habitants et les pouvoirs publics. D’ailleurs, les membres de cette structure ancestrale jouissent de la confiance et de l’estime des habitants. Ses membres, tous bénévoles, ne perçoivent aucune prime ou indemnité. Certains d’entre eux sont désignés membres du bureau chargé de la gestion des affaires courantes pour mener à bon port les projets initiés et adoptés par le village. La continuité de cette organisation politico-administrative était assurée par des lois ancestrales, sorte de charte dont certaines dispositions fondamentales doivent remonter aux temps les plus reculés.
thadjmaït assure aux individus la protection de leurs biens et préserve leur dignité. En particulier les faibles, ceux qui n’ont pas d’enfants, de frères ou de cousins pour les défendre.
Ceux-là peuvent vivre en toute quiétude sous la bienveillance de thadjmaït, qui tire sa force de l’accumulation des forces, c’est-à-dire que les gens s’unissent pour rendre justice à ceux qui ont raison et rappeler à l’ordre les transgresseurs.