Le sélectionneur national, Vahid Halilhodzic, en pleine réflexion sur sa liste des 23, avait décidé de faire de ce match un examen géant en conditions réelles.
Pour vraiment se faire une idée sur certains joueurs dits «sur la sellette», car en manque de temps de jeu, victimes de la concurrence et des choix du coach, ou encore de prestation en équipe nationale qui n’ont pas convaincu, ont été comme Djabou et Cadamuro, titularisés à la faveur des forfaits de Belkalem, Medjani et Feghouli. Yebda et Halliche, quant à eux, entrés en cours de match, avaient encore moins de temps pour convaincre que leurs deux autres coéquipiers dans cette «roulette russe» à la sauce bosniaque.
Quatre joueurs sur la sellette
La roulette russe, ce jeu mortel qui consiste à ne mettre qu’une seule balle dans le barillet d’un revolver, de la faire tourner, de mettre l’arme sur sa tempe et de tirer. Si le coup de feu part, le survivant est désigné vainqueur, si le barillet est vide au moment du tir, c’est l’adversaire qui doit faire la même chose. C’est un peu au même jeu, et en plus soft bien sûr, que Vahid Halilhodzic a imposé à ces quatre joueurs. Il a profité des absences de certains et a mis d’autres joueurs, comme Brahimi ou Kadir qu’il connaît sur le bout des doigts, sur le banc, pour tester ces quatre joueurs fortement sur la sellette en vue de la liste des 23, et qui disons-le, étaient avant ce match dans le «grupetto» du peloton, comme on dit dans le jargon cycliste, tour d’Algérie oblige. Liassine Cadamuro, même s’il a du temps de jeu avec le Real Majorque, n’avait jamais convaincu en sélection au poste d’arrière droit où il avait été testé. Hassan Yebda, qui faisait partie des cadres et des valeurs sûres en 2010, était devenu un joueur qui, lorsqu’il n’était pas blessé, était sur le banc. Abdelmoumène Djabou qui, malgré de bons matchs disputés sous l’ère Vahid, était pénalisé par son manque d’hygiène de vie et son manque de travail physique et, enfin, Rafik Halliche, revenu sur le tard après un enfer vécu à Fulham et une blessure, et qui a vu Belkalem et Medjani lui passer devant. Tous ces joueurs avaient reçu le même message de la part de Vahid Halilhodzic durant ce stage. Un message qui, en substance, disait : «Essayez de me convaincre, sinon, vous allez regarder le Mondial à la télévision.»
Saisissez votre chance, sinon…
Car c’est Vahid Halilhodzic qui a amené en sélection cette concurrence totale entre tous les joueurs qui composent la liste élargie. C’est aussi lui qui a voulu cette émulation qui existe aujourd’hui dans ce groupe. Il a imposé dès le stage de Marcoussis en août 2011 un règlement intérieur qu’il a voulu et qui contenait une forme de justice et d’égalité qui a même conduit à l’éviction de joueurs stars, comme Karim Ziani, qui ont tardé à se fondre dans ce moule. Aujourd’hui, au moment de faire son choix pour la liste des 23, bien qu’il ait une idée sur 85% de la liste finale, il a voulu aussi être juste en profitant du premier match amical post-qualification, non pas pour procéder à une revue d’effectifs, comme cela a été dit de manière très diplomatique du côté du service communication de l’équipe nationale, concocté par Kader Berdja et son service, mais plutôt un match de la dernière chance pour des joueurs qui allaient jouer leur place en Coupe du monde, ou plutôt le droit de continuer à y rêver jusqu’à la prochaine épreuve. Un peu comme une télé réalité du genre Koh Lanta. Car si Bentaleb, Feghouli ou encore Soudani ont gagné l’épreuve d’immunité depuis longtemps, pour ces quatre-là, le message était clair : saisissez votre chance, sinon votre parcours s’arrêtera là !»
Cadamuro réussit dans un nouveau rôle
On le savait ambidextre et polyvalent. On savait qu’en club, il était capable d’évoluer en tant qu’arrière gauche, arrière droit, mais aussi en défense centrale. Mais ce que l’on ne savait pas, c’est que Liassine Cadamuro, habituellement si timide en équipe nationale côté droit, allait faire de cet examen de la dernière chance son match référence avec les Verts, mais en tant que défenseur central. Le joueur du Real Majorque a été impérial et n’a commis aucune erreur face aux grands slovènes. Il a été bon dans le domaine aérien, dans ses interventions défensives et bien sûr dans la relance grâce à ses qualités de pied. On aurait dit qu’il avait joué avec Bougherra et Halliche, qu’il a remplacé son capitaine toute sa vie. Nous pouvons dire que Cadamuro est sorti renforcé par cette roulette bosniaque et a gagné le droit de prolonger son «rêve brésilien» jusqu’à la prochaine échéance.
Djabou, grand vainqueur du jeu
On dit souvent que les absents ont toujours tort. C’est ce qu’a dû penser Abdelmoumène Djabou en se voyant offrir la clé du jeu de l’équipe nationale sur un plateau d’argent en raison du forfait de Sofiane Feghouli qui devait se faire opérer pour un problème bucco-dentaire. Bien que le petit lutin du Club Africain de Tunis n’ait aucune dent contre Feghouli, comme il n’a pas raté l’occasion qui lui avait été offerte et a illuminé le stade Tchaker par son talent. Il avait déjà été convaincant en août dernier face à la Guinée, mais face à la Slovénie, il a été impérial. Sa vitesse, sa vision de jeu naturelle, son instinct, sa technique, ses dribbles chaloupés et sa frappe de balle ont donné le tournis aux pauvres défenseurs slovènes. Une passe décisive fulminante sur le but de Taïder et une quasi-passe décisive donnée à Soudani en première période ont fait passer Djabou du «grupetto» du Mondial à l’échappée gagnante en vue du Mondial, laissant pantois certains milieux de terrain du peloton. L’inquiétude semble avoir changé de camp.
Halliche, 45 minutes pour convaincre
De retour en sélection à la faveur, certes, des blessés, mais aussi de son retour en force au Portugal, Rafik Halliche, un cadre de l’équipe, dont le sort l’avait débarrassé de Medjani et Belkalem blessé, s’est vu offrir que 45 minutes pour convaincre. Un peu comme «Jack Bower» dans la série 24 heures chrono. Halliche n’avait que 45 minutes pour impressionner son coach. Et au moment de son entrée, à la 49e minute, en lieu et place de Bougherra, il avait une pression supplémentaire consécutive à l’apparition d’un concurrent supplémentaire, Liassine Cadamuro, qui venait de faire 45 bonnes premières minutes. Mais même si Rafik Halliche n’est plus aussi véloce qu’en 2010, il a gagné en expérience et en lecture des trajectoires et semble avoir réussi sa mission. Car, contrairement à un milieu de terrain ou à un attaquant qui doit se faire remarquer en brillant grâce à un but ou une passe décisive, pour un défenseur central, c’est l’inverse. Il faut passer inaperçu et maintenir le chiffre zéro but encaissé sur le tableau d’affichage. On ne se souvient pas d’une bourde de Halliche ou d’un raté, il s’est adapté parfaitement à Liassine Cadamuro et l’Algérie n’a pas encaissé de but. On peut dire «good job» pour l’ancien Nahdiste.
Yebda, mission accomplie en un quart d’heure
Le pauvre Hassan Yebda, qui avait joué le barrage face au Burkina Faso, avait ensuite été placardisé par Grenade. Il avait ensuite été transféré à l’Udinese pour obtenir plus de temps de jeu, mais on ne peut pas dire que son ratio de minutes jouées ait décollé, même en Serie A, où son nom est extrêmement respecté. Yebda a dû repartir à zéro lors de ce stage et se battre dans cette «roulette bosniaque» pour continuer l’aventure, comme si le chanteur Cheb Khaled devait repasser par la télé crochet «Alhan wa chabab». Et lui a joué sa survie en «vert» en seulement quinze minutes. Mais ce n’est pas au vieux singe qu’on apprend à faire la grimace. Yebda est un vétéran, un vieux de la vieille. Il a connu le Cairo Stadium et Oumdourmane, et la pression, il connaît et sait la gérer. Durant ce quart d’heure, le joueur d’Udinese a été au four et au moulin et a eu ni plus ni moins que deux occasions de but. Des prestations de ces quatre joueurs qui ont compliqué la tâche à Vahid.
Halilhodzic est encore plus dans l’indécision qu’avant le match
Alors qu’il comptait ou espérait des faux pas de joueurs pour commencer à raboter la liste élargie en vue de commencer sa liste des 23, les bonnes performances de ces quatre footballeurs, qui ont tous remporté cette roulette bosniaque, ont compliqué les choses à Vahid Halilhodzic. Il a trop de défenseurs centraux et de milieux de terrain de talent et il va devoir faire un choix cruel, au moment où arrivera la date butoir où il faudra renvoyer la liste finale à la FIFA. Le système de Vahid Halilhodzic a trop bien marché, tous les joueurs se battent et se rendent coup pour coup. Personne ne veut rendre les âmes, et bien malin celui qui pourra prédire au jour d’aujourd’hui quels sont les joueurs qui composeront la liste des 23.
M. B.