Trois anciens premiers ministres, deux ministres, le président du Conseil de la nation (équivalent du Sénat) et le secrétaire général du premier parti, le Front de libération nationale (FLN)… Les hommes du président, au nombre de sept, vont sillonner l’Algérie pour représenter le chef de l’Etat Abdelaziz Bouteflika, élu depuis 1999 et candidat à sa succession pour l’élection présidentielle du 17 avril.
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Son principal rival, Ali Benflis, s’apprête de son côté à se lancer dans une ambitieuse tournée des régions. La campagne officielle commence dimanche 23 mars.
Dix ans après une première confrontation lors de la présidentielle de 2004 entre M. Bouteflika et M. Benflis – qui fut son directeur de campagne en 1999 avant de devenir ministre puis chef de gouvernement –, la compétition s’est aiguisée. Chacun des deux camps devrait inaugurer, dimanche, une télévision de campagne éphémère, bâtie sur mesure et financée par des bailleurs privés invisibles : Wiam TV (Concorde TV) pour le candidat Bouteflika, Espoir TV pour le candidat Benflis.

MEETING COMMUN DE CLÔTURE PRÉVU LE 13 AVRIL
Une première, négociée, comme ce fut le cas avec l’émergence de chaînes privées en Algérie, par le biais des opérateurs jordaniens spécialisés dans la vente de signaux sur des satellites arabes. Hélas pour M. Benflis, Atlas TV, qui semblait avoir pris son parti, a cessé d’émettre le 12 mars, après une perquisition de gendarmes et la saisie de caméras. Sa fréquence est, depuis, utilisée à « titre expérimental » par Wiam TV…
Tout est nouveau, en réalité, dans cette élection de 2014, à commencer par l’absence physique du président Bouteflika, 77 ans. Affaibli par un accident vasculaire cérébral qui l’avait contraint à se faire soigner à Paris pendant quatre-vingts jours en 2013, le président sortant ne figure pas autrement, du moins jusqu’ici, que sous forme de portraits projetés ou montés sur trépied dans ses meetings. Pour compenser cette absence, son équipe de campagne va se démultiplier. A partir de dimanche, l’ancien premier ministre Abdelmalek Sellal, devenu le directeur de campagne de M. Bouteflika, enchaînera vingt déplacements, en commençant par Tamanrasset, dans le Sud. Il sera notamment relayé par Ahmed Ouyahia et Abdelaziz Belkhadem, tous deux d’anciens premiers ministres, qui ont récemment rejoint la présidence, pour ratisser le territoire d’est en ouest.
La communauté algérienne en France n’est pas oubliée : Amar Saadani, le secrétaire général du FLN, devrait animer deux réunions à Lyon et Marseille, les 29 et 30 mars.
Puis un grand meeting commun de clôture est prévu le 13 avril à Alger. La « stabilité » et la réconciliation civile prônées par le président Bouteflika dès son arrivée au pouvoir – d’où, sans doute, le nom de Concorde choisi pour sa « télé-campagne » – seront au centre des discours. Le 18 mars, devant un parterre d’homme d’affaires, M. Sellal a également promis la disparition de la bureaucratie.
POSTE DE « SUPER-CHEF DE GOUVERNEMENT »
A bord d’un avion spécialement affrété, M. Benflis, 69 ans, devrait de son côté arpenter les villes algériennes les plus importantes pour vanter son « Pacte de renouveau national », un épais programme de 150 pages parvenu au Monde, dans lequel le candidat « indépendant » promet de revenir à la limitation de deux mandats présidentiels (abrogée par une révision de la Constitution en 2008). La refonte de la politique pénale, la révision, dans des secteurs d’activité non stratégiques, du taux de participation des investisseurs étrangers plafonné jusqu’ici à 49 %, ou bien encore la privatisation partielle, dès 2015, de banques et entreprises publiques font également partie des mesures phares proposées.
Cet ancien juriste issu du sérail – il a dirigé le FLN entre 2001 et 2003 – a reçu un soutien de poids, celui de l’ex-président Liamine Zeroual, qui avait pris les commandes de l’Etat algérien en 1994 avant d’être élu l’année suivante. Sortant de son silence, le général Zeroual a vanté les mérites de « l’alternance » dans une Lettre aux Algériens rendue publique le 19 mars. Le lendemain, plusieurs centaines de ses partisans sont venus brandir son portrait devant son domicile à Batna, ville dont il est originaire, tout comme M. Benflis.
Quelle que soit l’issue du scrutin du 17 avril, qui opposera quatre autres candidats moins en vue (Abdelaziz Belaïd, Louisa Hanoune, Ali Faouzi Rebaine et Moussa Touati), c’est aussi l’après qui se joue, chacun ayant en tête la santé fragile du chef de l’Etat. Le camp Bouteflika devrait ainsi mettre en avant la création d’un poste de « super-chef de gouvernement » destiné à seconder le président sortant, ce qui nécessitera une nouvelle révision de la Constitution.
Envisagée avant l’annonce de la candidature de M. Bouteflika, cette révision devait aboutir à la nomination d’un vice-président. Le projet a, semble-t-il, été amendé depuis.