Le 3 avril, le littoral algérien sera à l’honneur sur France 3 à l’occasion de la diffusion d’un documentaire intitulé Algérie: la mer retrouvée, et le 8 à la Cinémathèque en présence du réalisateur Guillaume Pitron.
«Imaginer une plage, avec toute ses nuances de bleu, ses ados qui pianotent et ce qu’il faut de bikini, de tatouage, et de frime, une plage d’été comme il y en a des milliers en Méditerranée, on dirait la France ou l’Italie et c’est l’Algérie» c’est ainsi que commence ce reportage. D’une durée de 110 minutes, le documentaire fait ressortir la beauté singulière de nos paysages côtiers en traversant l’Algérie de l’Est à l’Ouest. D’Oran à Tipasa, de Sidi Fredj à Béjaïa en passant par la Casbah et pour finir à Annaba, rien n’est laissé au hasard.
C’est via des guides que le film va nous introduire dans les mystères de notre beau pays tout en dénonçant ses anomalies. Les guides sont Samia la féministe, la première femme à avoir gagné ses galons de moniteur, Abdel le cuisinier aux recettes de poisson, Karim l’écolo, et enfin Mohamed Benchenet, auteur du fameux way way qui parlera de jeunes et de relations garçons-filles. Bref, un cuistot, une plongeuse sous-marine, un écolo et le chanteur raï du moment pour un embarquement immédiat dans un pays comme rarement nous l’avions vu. Les rencontres humaines seront ainsi décisives dans le déroulement de ce reportage qui ira aussi à la rencontre de «la jeunesse dorée de l’Algérie» comme se plaisent à dire les Occidentaux mais encore avec Fatima une femme capitaine de pêche, sans oublier les vacanciers et la chasse policière, pour sonder les avis divers sur la situation socio-culturelle du pays. Car si ce reportage se veut aborder l’aspect naturel du pays il n’en dévoile pas moins ses dessous politiques et socio-économiques qui le secouent. La beauté d’abord, avec la découverte de somptueuses grottes sous-marines et ses rares poissons et plein d’autres paysages extraordinaires. Un fabuleux voyage en somme sur 1 200 km de littoral. Des images belles, des plages vierges, vides sans humains. Un mystère élucidé avec Samia la plongeuse. Des témoignages d’hommes et de femmes généreux dont la mission est de préserver notre espace naturel sans tabou seront apportés, dans la joie et la bonne humeur. Un film qui donne du baume au coeur d’autant qu’il vous pousse à vous réconcilier un peu avec votre environnement immédiat et surtout avec l’Autre. Au titre résolument significatif, il renvoie assurément à la décennie noire où les femmes étaient interdites de plages et le bikini proscrit. Bien qu’encore aujourd’hui dans certaines plages… Mais, aujourd’hui, l’Algérie ne tourne plus son dos à la mer, explique ce doc, les plages sont à nouveau bondées de monde montre ce reportage du service de France Télévisions qui, pour le coup, n’a pas cherché à fouiller dans les bas-fonds scabreux de l’Algérie mais plutôt ce qu’elle a de meilleur en son sein, malgré tous les tracas rencontrés sur place pour la réalisation de ce film qui n’a pas été de tout repos. C’est une jeunesse assoiffée de vie et de loisirs qui est décrite dans ce reportage qui parle de cette «Algérie, ce géant africain et maritime». Géant d’une certaine façon. Mais il faudra attendre la suite pour bien lire entre les lignes. Le film haut en couleur suit des gens dans l’exercice de leurs fonctions. Notre nature est dénudée, dévoilant ses plus beaux atours, de ses poissons à ses sons qui bruissent sous l’eau ou dans le ciel, ses couleurs qui ravivent l’esprit et enchantent le moral. Des images sublimes sont ainsi singulièrement soulignées. Des îles Habibas, en face d’Oran et Sidi El Houari le quartier espagnol, Oran cette ville plus ouverte que les autres. Oran et sa rue de la Bastille et ses effluves de marchands de légumes. Un film qui donne de l’eau à la bouche, qui donne des ailes et vous pousse à aller à la plage indiscutablement. Et puis la sentence irrévocable. «L’Algérie, un géant méditerranéen mais un nain touristique», poursuit la voix off. Et de souligner: «La faute peut être due à la bureaucratie», le monopole de l’Etat sur la majorité des infrastructures hôtelières et l’anarchie dans les constructions urbaines, sans parler les années sombres du terrorisme sont les quelques facteurs du manque de tourisme en Algérie, estime-t-on. A Alger il y a la surpopulation. Notons que ce doc est marqué par ses nombreuses vues du ciel. Ce qui fait son originalité. Car sa façon de balayer les paysages est comme un voyage qu’il nous fait faire. Les images sont tantôt panoramiques, tantôt proches des visages, des portraits réalisés des individus. Alger est vue sous le prisme patrimonial. La Casbah. Nous sommes introduits par Samia la plongeuse, qui vient y chercher la maison de sa grand-mère. Le reportage s’introduit dans une qaâda chaâbie. Direction Béjaïa et son phare le plus haut du monde. Pas très propre sont ici les plages. Qu’à cela ne tienne, Les soldats de Karim sont là pour la rescousse, le nettoyage des plages. Après Béjaïa, place à Tichy avec ses deux pierres, deux mesures. D’un côté, les gens des villas et de l’autre, ceux qui bronzent sous les tentes. L’hypocrisie sociale et son pendant moralisateur sont bien soulignés ici. Les garants des bonnes moeurs, les policiers, sont épinglés.
Un paradoxe à l’image de l’Algérie est à peine suggéré mais là le message passe comme une lettre à la poste. S’il dévoile la beauté, ce doc, bien subtil, n’oubliera pas de montrer pour autant que tout ce qui brille n’est pas or.