A Alger, comme partout dans les autres wilayas du pays, des centaines de jeunes ont violemment manifesté leur colère en cassant tout sur leur passage, face à la récente flambée des prix des produits alimentaires, mais aussi pour revendiquer une vie meilleure. Des tirs ont déchiré le silence de ces deux dernières nuits de la capitale algéroise ainsi que des bombes lacrymogènes.
Des milliers de policiers ont été appelés en renfort pour venir à bout des milliers de jeunes en colère. Des émeutes ont eu lieu partout dans les quartiers d’Alger, comme dans des dizaines d’autres wilayas. A Oran, Blida, Tipaza, Djelfa, Aïn Defla, Béjaïa, Bordj Bou Arréridj, Boumerdès et Alger, de violentes émeutes ont éclaté. A Alger, les quartiers populaires comme les les plus huppés ont enregistré de violentes émeutes. Les manifestants, généralement des jeunes entre 16 et 35 ans, ont occupé les places publiques et les quartiers de la capitale. A Bab El oued, Staouéli, Aïn Bénian, Zéralda, Bachdjarah, Salembier (El Madania), Diar El Afia, El Biar, Bab Ezzouar, Sidi Yahia, Belouizdad, Réghaia, la Madrague, et la liste est encore très longue, les jeunes émeutiers ont tout saccagé sur leur passage. Ces deux derniers jours, à Alger l’atmosphère est très électrique. Un climat de peur s’est installé, les gens se précipitent pour rentrer chez eux, évitant ainsi les mouvements de foule. D’autre part, un dispositif policier très impressionnant a été mis en place par la DGSN au niveau des quartiers sensibles d’Alger. De son côté, la Gendarmerie nationale a mobilisé ses troupes à travers certains points. Il s’agit des complexes touristiques et autres importants édifices. Plus de 5 000 gendarmes et 24 000 policiers ont été mobilisés pour contenir la «révolte» des jeunes.
20 émeutiers arrêtés, 18 policiers et 82 jeunes blessés
Selon un dernier bilan de la Protection civile datant d’hier, les dernières émeutes enregistrées à travers le pays ont fait plusieurs blessés des deux côtés (policiers et manifestants). Ainsi, 82 émeutiers et 18 policiers ont été blessés au cours de ces trois derniers jours, et 20 manifestants ont été interpellés. Ce bilan risque de s’aggraver dans les prochaines heures, car d’autres émeutes ne sont pas écartées, selon la police. Par ailleurs, une cellule de crise a été installée hier par le chef de sûreté de la wilaya d’Alger. Une réunion avec des cadres de la DGSN a eu lieu afin de faire un premier bilan de la situation, mais surtout d’installer un plan sécuritaire, voire un dispositif spécial pour les prochains jours.
Les jeunes manifestants se sont organisés via Facebook
Les dernières émeutes enregistrées un peu partout dans le pays, et plus particulièrement dans la capitale, ont été organisées à partir de la Toile, via le fameux réseau social Facebook.
Des milliers de jeunes se sont donnés rendez-vous afin de déclencher des émeutes dans les quartiers de la ville. Des milliers de messages ont été envoyés par les internautes de Facebook appelant à sortir dans la rue afin de dénoncer la cherté de la vie et les dernières augmentations des principaux produits de base, à savoir le sucre et l’huile. On peut lire à travers ces messages la grande colère de la jeunesse algérienne. «Il faut que tout le monde sorte ce soir», «Basta, où va-t-on avec ces prix qui flambent à chaque tournant», «Mes amis il faut se mobiliser pour arrêter cette hémorragie des flambées», telle est la teneur des messages envoyés par les internautes algériens.
Les stations-service de la capitale fermées
Devant l’ampleur des dégâts enregistrés durant les émeutes, la quasi-totalité des stations-service de la capitale ont fermé. Une décision prise par ces dernières suite aux actes de vandalismes enregistrés un peu partout dans les quartiers d’Alger et autres wilayas du pays. D’autre part, plusieurs automobilistes ont préféré garer leurs véhicules devant la «pénurie» de carburant. En effet, une nette baisse du trafic routier a été observée durant ces deux derniers jours à Alger. Cette situation risque de perdurer, d’autant que la plupart des propriétaires des stations-service persistent dans cette voie, craignant ainsi d’être la cible de certains manifestants qui, faut-il le signaler, profitent de cette occasion pour voler des biens.
5 bijoutiers et plusieurs magasins attaqués par des gangs
Les actes de vandalisme ont touché également les magasins de la ville d’Alger. En effet, cinq bijoutiers de la capitale ont été la cible de certains émeutiers qui se sont formés en gangs. Le premier bijoutier dévalisé a été celui d’El-Biar. Près d’une dizaine de jeunes cagoulés ont attaqué avant-hier soir une bijouterie située en plein centre de cette commune.
Des bijoux de valeur ont été dérobés par les assaillants. Le second bijoutier ciblé se trouve à Ben Aknoun, à proximité du marché communal de la commune. Les attaquants ont tout dérobé. Une autre bijouterie à Bachjarrah a été vandalisée par un gang profitant de la situation qui sévit dans la capitale. Les bijoux volés s’élèvent à plusieurs dizaines de millions de centimes. Deux autres bijouteries ont été entièrement pillées par les assaillants à Draria et Baraki. D’autre part, plusieurs magasins de vêtements, de téléphonie mobile, d’électroménager, d’alimentation générale et d’autres, ont été la cible des émeutiers. La célèbre maison «Adidas» d’El-Biar a été visitée par des dizaines de jeunes émeutiers où plusieurs centaines de baskets ainsi que des vêtements ont été volés. A El Madania, des magasins d’alimentation générale ont été saccagés et vandalisés par les jeunes manifestants.
Le Centre commercial de Bab Ezzouar également ciblé
Inauguré récemment, le nouveau centre commercial de prestige, le Centre commercial de Bab Ezzouar, a été attaqué durant la soirée d’avant-hier par des dizaines de jeunes manifestants qui ont volé des marchandises de valeur, telles que des téléviseurs plasma, des vêtements de marque ainsi que de l’électroménager. Pourtant, hautement sécurisé, ce lieu de commerce de référence a été la cible de ces assaillants qui n’hésitent devant rien.
Des jeunes manifestants armés de haches et scandant «Etat Islamique»
Parmi les jeunes manifestants, beaucoup étaient armés de grands couteaux, de haches et d’épées. Ils scandaient les anciens slogans propres aux salafistes djihadistes des années 90. A Bab El Oued, ancien fief des salafistes, des dizaines de jeunes munis d’armes blanches ont occupé, durant la soirée d’avant-hier, les rues de ce quartier populaire. Du côté de la rue de la Lyre, scandant «Allah est grand», «Dawla Islamya» (Etat Islamique), des manifestants ont tenté d’assaillir le commissariat. Fort heureusement, les policiers ont repoussé l’attaque.
Par Sofiane Abi