Des émeutes qui ont failli mener le pays vers la catastrophe
Dans leur rapport d’enquête sur les émeutes de janvier 2011, les députés n’ont pas été tendres avec Cevital.
Les conclusions du rapport de la Commission d’enquête sur la pénurie et la hausse des prix de certains produits alimentaires de large consommation (huile et sucre) sur le marché national sont connues. Toutsurlalgérie a eu accès au rapport et rend publiques certaines de ses conclusions. Il y est fait mention du fait que «le recours de l’opérateur Cevital à des mesures décidées unilatéralement et sans concertation, faisant notamment obligation aux grossistes de prouver le dépôt légal des comptes sociaux et exigeant la présence du détenteur du registre du commerce ainsi que l’obligation de paiement par chèque, a instauré un climat de méfiance chez les grossistes, lesquels se sont abstenus de s’approvisionner en produits alimentaires comme le sucre et l’huile».
Le même rapport s’est voulu impartial en écoutant également la version d’Issâd Rebrab, patron de Cevital.
L’analyse des enquêteurs est contestée par Issâd Rebrab. Il leur a déclaré que les seuls documents exigés aux grossistes pour leur vendre les produits alimentaires sont la carte fiscale et le registre du commerce comme l’exige la loi.
Il rejette toute rupture des stocks qui étaient de 3 mois. Pour tout le monde, il est clair maintenant que Rebrab se contredit et tente de faire endosser la responsabilité des émeutes du 5 janvier à d’autres parties.
Même les ministres qui se sont succédé devant la commission n’ont pas été unanimes à ce sujet. Karim Djoudi, ministre des Finances, livre son verdict. Selon lui, l’obligation de paiement par chèque prévue par le gouvernement n’a pas contribué d’une manière ou d’une autre à la pénurie des produits alimentaires de base. Selon lui, «ce n’est pas la première fois qu’on impose cette règle».
Il rappelle aussi que la hausse des prix du pétrole a eu des retombées directes sur les frais de production et de transport.
L’analyse n’est pas partagée par tout le monde.
Selon Mustapha Benbada, ministre du Commerce, la décision du gouvernement d’instaurer le chèque a provoqué cette crise. Selon lui, les grossistes ont acheté les produits en question en grande quantité avant l’entrée en vigueur de cette mesure et cela a perturbé le marché.
La question reste toujours posée: si les grossistes ont acheté en grande quantité, d’où vient la pénurie?
D’ailleurs, les responsables du secteur financier resteront-ils silencieux devant ces critiques? Mohamed Laksaci, gouverneur de la Banque d’Algérie, écarte tout lien entre l’augmentation des prix et la pénurie avec le recours au paiement par chèque. Il y voit d’autres causes: marché déstructuré, limites de la politique de subvention et absence de contrôle.
La commission d’enquête sur la pénurie et la hausse des prix de certains produits alimentaires de large consommation sur le marché national, a soumis dimanche 13 novembre son rapport final au président de l’Assemblée populaire nationale, Abdelaziz Ziari.
C’est le président de la commission d’enquête parlementaire, Kamel Rezki, qui a remis le rapport. Il lui a également remis les enregistrements audiovisuels des rencontres tenues par la commission depuis sa création le 20 avril 2011 et les documents exploités pour l’enquête.
Ziari a annoncé qu’il remettrait une copie du rapport au président de la République, Abdelaziz Bouteflika, ainsi qu’au Premier ministre, ajoutant que le rapport sera distribué à tous les députés après une réunion du bureau de l’APN consacrée à ce sujet.
A propos de la publication de tout ou partie du rapport de l’enquête, Ziari a rappelé que conformément à l’article 86 de la loi organique n°02-99, la publication de tout ou partie du rapport peut être décidée par l’APN sur proposition du bureau et des présidents des groupes parlementaires, après avis du gouvernement.
Si un accord est dégagé sur la publication partielle ou intégrale du rapport, la question sera alors soumise à l’Assemblée qui tranchera à la majorité des membres présents sans débat, a ajouté Ziari.