L’Etat serre la ceinture. En tout cas, tous les secteurs seront amenés à réduire leur train de vie à partir du 1er janvier 2013, date de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi de finances que le gouvernement commencera à examiner dès demain mercredi.
Une loi de finances qui, pour la première fois depuis 1999, sera frappée du sceau de l’austérité. Du moins, l’Etat sera plus regardant sur les dépenses publiques. Lors d’une précédente réunion du gouvernement, fin juin dernier, deux ministres, celui des Finances et celui de l’Energie et des Mines, avaient déjà commencé à préparer le terrain aux mesures d’austérité à venir. L’un et l’autre avaient en effet dressé un tableau sombre et «franchement inquiétant » pour reprendre un membre du gouvernement, sur l’état des lieux ainsi que les perspectives économiques mondiales, fortement influencées par la crise économique en Europe, la chute du prix du baril ainsi que la baisse progressive du taux de croissance de l’économie chinoise. «La crise qui secoue la zone euro, le comportement néfaste des monarchies du Golfe qui inondent le marché mondial du pétrole alors même que le prix du baril ne cesse de chuter et la stagnation des économies en Asie sont autant de facteurs qui incitent à la prudence un pays comme l’Algérie, dont l’économie reste tout de même fragile», nous confie une source proche du gouvernement. Des mesures préventives sont ainsi prévues dans la future loi de finances dont la première caractéristique cette année aura été la traque aux dépenses inutiles. Confectionnée sur la base d’un prix de référence du baril de pétrole à 37 dollars, la LFC 2013 prévoit, selon notre source, de grosses restrictions budgétaires aussi bien s’agissant de l’équipement que du fonctionnement. «A l’exception des dépenses dites obligatoires, comportant notamment celles inhérentes au paiement des salaires des fonctionnaires (l’administration, l’armée, la police, la Protection civile, l’éducation, l’enseignement supérieur, etc.) et toutes les obligations du genre, la tendance sera à l’austérité. Déjà, est-il décidé sur instruction du président de réduire de 10% le budget de fonctionnement de l’ensemble des secteurs, des plus stratégiques comme le ministère de la Défense nationale ou la présidence aux plus modestes d’entre eux. Ce même souci d’austérité guidera davantage encore la répartition du budget d’équipement ».
«Se rabattre sur les 20 000 milliards de dinars non encore consommés du plan quinquennal»
Plus aucun dinar ne sera dépensé dans l’équipement tant que ne seront pas épuisés les 20 000 milliards de dinars non encore consommés au titre des exercices 2011-2012 du fameux plan quinquennal 2009-20014 lancé par Bouteflika pour «meubler» son troisième mandat. «Cette mesure s’appliquera avec toute la rigueur requise. Chaque secteur se doit de justifier d’abord d’avoir consommé sa part de ces 20 000 milliards de dinars avant de prétendre à une rallonge budgétaire pour son budget d’équipement. Cette restriction exceptionnelle ne concernera toutefois pas les trois secteurs sensibles que sont l’éducation nationale, l’enseignement supérieur et la santé». Autrement dit, il n’y aura pas de nouveaux projets d’inscrits avant la finalisation de ceux déjà lancés. Mais comment explique-t-on le fait que l’on n’a pas pu consommer une somme aussi astronomique dans un pays où l’on a fini par s’habituer à ne pas être trop regardant sur les dépenses ? «C’est à cause, ou plus exactement grâce au nouveau code des marchés publics qui, depuis 2011, impose plus de rigueur en matière d’attribution, d’études et de réalisations de projets. Auparavant, les budgets étaient débloqués avant même que ne soient lancés les études préalables de faisabilité et réalisation des projets. Ce n’est plus le cas et le gouvernement, en plus, n’attribue aucun projet si, au préalable, l’assiette foncière appropriée n’a pas été dégagée et dûment présentée». Autant de freins donc aux gaspillages mais aussi aux opportunités de corruption qui a gangrené le pays ces dernières années.
«Pas de nouvelles taxes, ni de crédits à la consommation»
Ce retour aux fondamentaux dans la gestion de l’économie nationale avait été, rappelons-nous, «insinué» pour ainsi dire, en termes assez clairs, par Ahmed Ouyahia lors de sa dernière conférence de presse, le 1er juin dernier. Et si d’aucuns avaient conclu, hâtivement, en une sorte de «fronde » de l’actuel Premier ministre contre le pouvoir, force est de constater qu’il ne s’agit en réalité que d’un changement significatif dans la politique économique nationale. Un changement de politique économique que l’exécutif compte mener tout en gardant l’œil sur le front social qu’il ne veut en aucun cas s’aligner, en ces temps de grands troubles sur la scène internationale. C’est pourquoi est-il décidé pour 2013 encore de ne prévoir aucune nouvelle taxe, d’aucune nature, et à même de rogner sur le pouvoir d’achat des ménages. De même que sera maintenu le gel qui frappe les crédits à la consommation depuis 2009. Cela, tandis que, sur proposition du ministre des Finances, l’on prévoit de réintroduire cette formule d’octroi de crédits à la consommation mais pour les seuls produits nationaux. «Cela se fera probablement lors de la prochaine loi de finances complémentaire, dans l’objectif d’encourager la production nationale. La proposition est à l’étude pour le moment», nous confirme la même source.
K. A.