La CPI est une organisation internationale indépendante
«Le mandat d’arrêt lancé contre le dirigeant libyen a peu de chance d’aboutir aux résultats escomptés tant par la CPI que par le CNT.»
Alors que les chefs d’Etat membres de la médiation de l’UA se sont réunis dimanche dernier, une deuxième fois, pour débattre d’un plan de paix pour la Libye, la Cour pénale internationale (CPI) n’a pas trouvé mieux que d’émettre un mandat d’arrêt contre le dirigeant libyen. Lundi, 27 juin 2011, la chambre préliminaire I de la Cour pénale internationale (CPI) a délivré trois mandats d’arrêt à l’encontre de Mouamar El Gueddafi, Seïf Al-Islam Gueddafi et Abdullah Al-Senoussi pour crimes contre l’humanité (meurtre et persécution).
N’est-ce pas que cela s’appelle faire avorter une tentative de règlement d’une crise par la diplomatie par les Africaine et entre les Africains? Ce n’est pas la première fois dailleurs que les Occidentaux sabordent une initiative africaine particulièrement dans cette crise libyenne. On se rappelle de l’autre initiative de l’UA en avril dernier quand le président sud-africain, Jacob Zuma avait rencontré le guide libyen et des membres du CNT. Les contacts allaient aboutir à un consensus entre les deux parties en conflit, le CNT a accepté le principe d’un règlement de la crise et au dernier moment, une autre réunion a été programmée à Doha pour court-circuiter tout ce qui a été fait par la commission Zuma. Le CNT a renié tout ce qui a été décidé par l’UA lors de cette autre réunion de Doha qui a été sponsorisée par la France, la Grande-Bretagne et le Qatar.
Cette rencontre a démontré, encore une fois, les objectifs des actions occidentales en Libye. Selon Maya Sahli, juriste et experte auprès du Comité de l’ONU pour les droits de l’homme (CDH) de Genève et professeur à l’Institut diplomatique et des relations internationales, la CPI est une organisation internationale indépendante, qui n’appartient pas au système des Nations unies.
Elle juge les personnes accusées des crimes les plus graves qui touchent la communauté internationale, à savoir les crimes de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. Donc, la CPI respecte, dans ses activités, les normes les plus strictes d’impartialité et d’équité. La compétence et le fonctionnement de la CPI sont régis par le Statut de Rome. Dans ce cas, il est à signaler que la Libye n’a pas ratifié le statut de Rome. S’agissant du présent mandat, l’experte auprès du Comité de l’ONU pour les droits de l’homme à Genève, juge que ce dernier a «peu de chance d’aboutir à un résultat escompté aussi bien par la CPI que par le Conseil national de transition CNT». Elle a soutenu que ce mandat d’arrêt connaîtra le même sort que celui lancé, il y a deux ans, contre le président soudanais Omar El-Béchir. Or, d’autres experts s’interrogent: «Comment peut-on donc expliquer la décision de la CPI au moment même où l’UA s’apprête à soumettre aux Libyens un plan de paix portant sur le règlement politique de leur crise?» Pour revenir au mandat d’arrêt international contre El Gueddafi, c’est en fait le deuxième mandat d’arrêt contre un président africain après celui lancé, début mars 2009, contre le président soudanais, Omar El Béchir. De nombreux observateurs s’interrogent surtout sur la partialité de cette organisation, censée indépendante.
Car, il est facile de constater que la CPI ferme les yeux sur des scènes de crimes, les plus abjectes. Les exemples ne manquent pas. La cavale du criminel, Ratco Mladic, est une preuve à charge quant à la passivité de la CPI, qui ne tire, soutiennent bon nombre d’experts, que sur des assassins délaissés par leurs alliés. Que dire alors des crimes commis par l’armée israélienne contre les populations à Ghaza? Le rapport Goldstone qui met explicitement et avec preuves à l’appui ces crimes est resté lettre morte quand il s’agit d’Israël! Qui jugera alors cette organisation internationale qu’est la CPI? C’est dire que cette institution est actionnée dans des situations bien précises qui arrange inévitablement les puissants et leurs alliés.
Notons également que la CPI est, pourtant, saisie en dernier recours. Elle n’intervient pas lorsqu’une affaire fait l’objet d’une enquête ou de poursuites dans un système judiciaire national, sauf si ces procédures ne sont pas menées de bonne foi. Calcul stratégique ou erreur tactique, la CPI vient de saper le plan de paix africain en charge du dossier libyen, fondé sur un cessez-le-feu et l’ouverture de négociations vers des élections libres. Car, le scénario soudanais s’est reproduit encore cette fois-ci à la suite du mandat d’arrêt lancé par la CPI contre Mouamar El Gueddafi, au lendemain de la rencontre du comité de médiation de l’Union africaine (UA), chargé du dossier libyen.