Elle était brave, fière et rebelle : Fatma N’soumer une héroïne oubliée

Elle était brave, fière et rebelle : Fatma N’soumer une héroïne oubliée

2.jpgLe père de Fatma était le chef d’une école coranique qui était liée avec la zawyia Rahmaniya de Sidi Mohamed Ibn Abderrahmane Abu Qabrein.  Très jeune, Fatma a mémorisé le Coran, simplement en écoutant les disciples de son père psalmodier les différentes sourates.

Elle a été décrite comme très douée et possédant une mémoire stupéfiante. A la mort de son père, Lalla Fatma N’Soumer a dirigé l’école coranique avec son frère Si Mohand Tayeb. Elle s’occupait principalement des enfants et des pauvres. En plus de sa piété, sa sagesse et son intelligence remarquable, elle acquit une excellente réputation à travers les régions de Kabylie.

Bravoure n Lalla Fatma N’Soumer est une héroïne de la résistance à l’occupation de la Haute Kabylie par les armées du maréchal Randon, au cours des années 1850 à 1857.

Elle  est née dans un village proche de Aïn El Hammam en 1830, quand a commencé l’occupation française. Son vrai nom est Fatma Sid Ahmed. Le surnom «N’Soumer» lui a été donné pour sa piété et sa force et aussi parce qu’elle a vécu dans le village de Soumer.

A ce jour, aucune personne n’a jamais pu avoir une image précise du visage de Lalla Fatma N’soumer. Tous les tableaux représentant cette guerrière  ont été imaginés par les peintres après sa description par les soldats qui ont participé aux combats contre cette grande héroïne kabyle. Mais d’après la tradition orale, elle était d’une grande beauté. De souche maraboutique, sa liberté était restreinte.

A cette époque, le bigotisme ambiant ne favorisait certainement pas les expressions de la séduction et les enthousiasmes juvéniles. Très tôt, on a voulu la marier … Se présentent à elle plusieurs prétendants. Elle n’en accepte aucun.

Prise pour folle ou possédée, on l’enferme dans un réduit, certains disent, une semaine, d’autres plus ! A sa sortie du «placard», Lalla Fatma N’Soumer est métamorphosée, d’aucuns diront trauma !  En fait, Dieu lui a révélé sa foi, son esprit est ailleurs.

Sa famille ne se rend pas compte immédiatement du changement intervenu en elle et lui serine : «marie-toi, marie-toi !»  C’est sous la pression familiale que Lalla Fatma N’Soumer épouse son cousin.

Comme seule arme de défense, elle décide de ne pas consommer le mariage. Après 30 jours, la belle-famille et le mari, excédés, la ramènent à ses parents. Le village la met en quarantaine ainsi que sa famille.

C’est à cette époque qu’on assiste à une deuxième métamorphose perçue par certains comme une aggravation de son état. Prise pour folle, on la laisse tranquille.

La journée, Lalla Fatma N’Soumer décide d’arpenter la montagne et ne revient qu’au coucher du soleil. Elle découvre la «grotte du Macchabée», ainsi nommée par les Français, parce qu’on y a découvert un squelette momifié.  Après quelques temps, Lalla Fatma N’Soumer étonne tout le monde en annonçant sa décision de rejoindre son frère (marabout) exerçant ses talents de cheikh au village de Soumer.

Son frère accepte sa présence et elle reste dans son ombre, tout en se mettant à étudier le Coran et l’astrologie …L’ayant acceptée, les habitants du village s’habituent à ses «excentricités», lui vouant même un certain respect.

Ils apprécient son intelligence et remarquent le talent, équivalent à celui de son frère, en ce qui concerne les prédictions, la résolution des litiges et la capacité d’attirer de favorables augures. Mais la nuit, elle rêve, elle hallucine …Un jour, Lalla Fatma N’Soumer se confie à son frère et, peu de temps après, elle  convoque les villageois sur l’agora et leur annonce : «chaque nuit, je vois des hordes farouches qui viennent nous exterminer et nous asservir.

Nous devons nous préparer à la guerre !» Prenant ses dires très au sérieux, des émissaires parcourent alors toute la Kabylie pour mobiliser les hommes contre l’envahisseur français qui s’annonce.

Farid Houali