Les avocats devaient arrêter des mesures face à la détérioration des droits de la défense, qui se résument, selon Me Sellini, en “l’absence de procès équitable, humiliations quotidiennes des avocats, interdiction d’accès à certains services et documents…”
Le conflit magistrats-avocats n’est pas près de connaître son épilogue. Hier, l’assemblée générale extraordinaire qui devait se tenir à la Maison du peuple, à l’appel du barreau d’Alger, a été empêchée, sous prétexte qu’elle n’a pas été autorisée par la wilaya. “Nous n’avons pas l’habitude de demander des autorisations pour des réunions professionnelles. Par de telles pratiques, on veut réduire l’exercice de la défense à un faire-valoir”, rétorque, dépité, le bâtonnier d’Alger, Me Sellini. Pourtant, la veille, la Centrale syndicale avait donné son accord pour la mise de la salle à la disposition des avocats. À son arrivée, le premier groupe des avocats a dû forcer le cordon de sécurité pour accéder à l’esplanade de la Maison du peuple, pour ensuite se retrouver devant des portes closes. Un rassemblement a eu lieu, sous la pluie, le temps de se concerter sur les suites à donner à cet affront. Cette réunion a été, finalement, reportée au 11 mai prochain. Elle devait arrêter des mesures face à la détérioration des droits de la défense, qui se résument, selon Me Sellini, en “l’absence de procès équitable, humiliations quotidiennes des avocats, interdiction d’accès à certains services et documents, refus d’accorder un délai supplémentaire…”. Tout a commencé jeudi, à la suite d’un incident qui s’est produit entre le président du tribunal criminel, le magistrat Hillali, et le bâtonnier Me Sellini lors d’un procès tenu à la cour d’Alger. Inutile de rentrer dans les détails des échanges de propos entre les deux protagonistes, la version des deux parties étant très différentes. L’essentiel à retenir est que cet incident a été la goutte qui a fait déborder le vase. Depuis quelque temps déjà, le Conseil de l’Ordre des avocats d’Alger ne cesse de dénoncer “les dérives des procédures judiciaires” qui fragilisent, selon lui, la défense. Le bâtonnat d’Alger a été l’un des rares à se prononcer pour le rejet pur et simple du projet de loi portant profession d’avocat assimilé à une mise à mort de cette corporation que finalement l’Union nationale des barreaux d’Algérie a avalisé après avoir introduit quelques amendements.
Le Conseil de l’Ordre des avocats du barreau d’Alger a boycotté dimanche dernier les séances de la cour d’Alger, toutes chambres confondues, pour protester contre ce qu’a nommé, hier, Me Sidi-Saïd “de terrorisme judiciaire”. Cet avocat spécialisé dans les affaires de corruption ajoute : “Nous ne ferons pas marche arrière. La justice se comporte ainsi maintenant. Qu’est-ce que cela va être après le passage du projet de loi portant profession d’avocat que nous dénonçons à l’Assemblée nationale. Sellini dérange, c’est évident, mais à travers lui, c’est toute la corporation qu’on cible.” À rappeler que le Syndicat national des magistrats s’est, lui aussi, mobilisé pour défendre le juge Hillali et a d’ores et déjà annoncé son intention de poursuivre en justice Me Sellini.
N H