Une redistribution des cartes a été opérée lors des dernières élections
Le pseudo «printemps arabe», de par ses implications à côté, en Tunisie et, un peu plus loin, en Libye et en Egypte, et de par ses menaces, rendit problématique la présence du MSP en haut lieu.
Le principe de la balance c’est, bien sûr, lorsqu’un côté descend, l’autre monte. Mais ce principe signifie aussi que chaque côté peut monter et chaque côté peut bien descendre. En politique aussi, surtout celle remplie de mystères, truffée de marionnettes et hantée par les ventriloques, lorsque quelqu’un montre le nez lors d’une élection, c’est que quelqu’un d’autre a dû descendre, une élection plus tôt. Cela, nous l’avons compris depuis longtemps et il n’est point besoin de se promener, un microscope sous l’aisselle, pour voir et comprendre que le parcours de certains partis se fait et se défait selon les besoins du moment. Malheur à celui qui, propulsé par la descente d’autrui, arrive en haut et se croit définitivement fort ou définitivement haut. C’est comme la balance, un jour en haut et un jour en bas!
La descente du MSP et de Bouguerra Soltani
Parmi ceux qui ont essayé – à leurs dépens, bien sûr – ce jeu du yo-yo, il suffit de rappeler le parti de Bouguerra Soltani qui, pendant un long moment a dû être utilisé pour répondre aux besoins de la période. Il fallait à l’époque un moyen efficace pour contenir les jeunes encore acquis à une certaine idéologie. Ce parti jouait même (ou plutôt croyait même jouer) les premiers rôles dans une Alliance présidentielle constituée justement, à un moment difficile, et juste pour pouvoir l’y inclure. Il avait des ministres au gouvernement, disposait de parlementaires, d’un groupe même au sein du Parlement et son leader, bénéficiant de poste de ministre sans portefeuille se comportait comme un chef, un zaïm, qui se croyait définitivement à l’abri de tout retournement de situation.
Le pseudo «printemps arabe», de par ses implications à côté, en Tunisie et, un peu plus loin, en Libye et en Egypte, et de par ses menaces, rendit problématique la présence du MSP en haut lieu. Ce parti devait donc être éjecté à la première occasion et cette occasion fut apportée par les élections législatives de mai 2012 dont les résultats assommèrent, non seulement Soltani, mais aussi ceux qui, cherchant comme lui à sauter dans un train qui n’était ni le leur ni dans leur direction, allèrent jusqu’à constituer une certaine «alliance verte» qui, encensée par des réalités qui ne devaient pas la charmer pourtant, se mit à danser et à se taper la poitrine en prévision d’une victoire qui, heureusement, n’a pas été sienne et qui ne risque certainement pas de l’être un jour.
Lorsque Soltani comprit qu’il était en train d’être maintenu au loin, il était déjà trop tard. Ghoul, repêché avec quelques cadres, était allé former un nouveau parti et, comme pour ne rien arranger, l’Alliance verte s’évapora. Les fauteuils libérés de l’APN furent occupés par de nouveaux arrivants comme le FFS, par exemple, et des indépendants, mais le signe fort qui fut envoyé était le raz-de-marée du FLN. Un raz-de-marée que Belkhadem voulut bien tenter de s’en approprier le mérite mais qui, au fond était dû à la nature du moment. Les islamistes, pour leur part, reçurent leur coup de grâce lors de la dernière élection du 29 novembre et à la lueur des résultats donnés par Ould Kablia, Soltani et le MSP comprirent qu’ils étaient définitivement éloignés du jeu.
Mais il n’y eut pas seulement Soltani…
La chute du PT et de Louisa Hanoune
Autant il fallait éloigner les islamistes, autant il fallait veiller à garder aussi au loin tous ceux qui, à un moment ou un autre, étaient mobilisés pour leur servir de contrepoids. Dans ce registre, l’exemple le plus frappant est celui de Louisa Hanoune et son Parti des travailleurs. Un parti trotskiste dont la présence sur la scène politique nationale nest rendue possible que par la présence du FIS à l’époque, car le PT servait parfois d’épouvantail, parfois de porte-étendard d’une certaine idée de la République et parfois de porte-parole, mais avec sa verve discursive et son argumentaire assez cohérent dans une certaine logique de gauche, Hanoune, avec son parti, avait le profil idoine, car elle cadrait bien avec la mission qui allait être, durant de longues années, la sienne et celle de son parti et qui consistait à crier au loup. Hanoune et le PT servaient à contrecarrer les projets jugés dangereux pour la République.
Bien sûr, tout comme le MSP, le PT trouva chemin vers les fauteuils de l’APN et parfois même en nombre un peu trop élevé.
Mais dès que le MSP fut éloigné, le PT n’avait plus de raison de continuer… et c’est pour cela que le PT accompagna le MSP dans sa chute un certain 10 mai 2012. Hanoune aura beau crier, comme Soltani, à la fraude, à la triche, au quota… rien n’y fit car le profil ne cadre plus avec les besoins du moment et il n’y avait plus aucune raison de ne pas l’éloigner.
La montée de TAJ et de Ghoul
Lorsque Ghoul quitta son parti avec quelques cadres, toute la presse se focalisa sur l’événement. Plusieurs jours de suite, tous les faits et gestes de ce ministre islamiste modéré comme certains aiment l’appeler, étaient rapportés dans les moindres détails au point où l’on sentit quelque chose qui se préparait pour cet homme.
Mais, apparemment, quelque chose a dû arriver pour chambouler les comptes et l’ascension de Ghoul s’arrêta. Une halte, en quelque sorte, car si le MSP est écarté, il faut bien un autre parti de la même tendance et de la même coloration soit à portée de main de la République, en plus crédible si possible et en moins turbulent de préférence. Amar Ghoul, parce qu’il a le profil qui cadre avec ce besoin, était sur le côté de la balance qui descendit Soltani… et il se trouva élevé…comme il fut un temps, Soltani.
La percée de Benyounès
Lorsque la balance, pour les besoins du jour, descend Hanoune, c’est pour faire monter quelqu’un d’autre. Quelqu’un qui puisse, tout en menant à bien la mission qui consiste à crier au loup en lieu et place de Hanoune, jouer au rassembleur. Benyounès fut choisi pour ce rôle et il commença aussitôt à vouloir apporter ses preuves. Ne se contentant point de crier, il se mit aussitôt à hurler au loup. La couleur est annoncée sans détour. Il s’en va même ajouter un certain «nous allons faire alliance avec les partis au gouvernement», cela rappelle un certain Soltani et une certaine Hanoune«les partis islamistes ont échoué, déclara-t-il à l’intention d’un certain Soltani. Les Algériens à travers ces élections sont sortis de la période islamiste. Nous sommes dans une période de post-islamisme». Quant à Hanoune qui lui a «cédé» sa place, il lui rappelle Sant’Egidio et lui «ordonne» de ne plus parler de l’Armée. C’est, somme toute, normal, car pour le moment, c’est Benyounès qui est sur le côté haut de la balance… Mais aller jusqu’à annoncer qu’il soutient un quatrième mandat de Bouteflika, cela fait un peu trop d’enchère ou alors on a affaire à un message qu’un ventriloque invisible a bien voulu nous délivrer par la bouche de Benyounès… A suivre!