Élection présidentielle, Partis islamistes : l’heure des révisions déchirantes

Élection présidentielle, Partis islamistes : l’heure des révisions déchirantes
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C’est probablement l’une des premières caractéristiques du prochain scrutin présidentiel prévu dans deux mois : les partis islamistes, pour la plupart, seront absents à ce rendez-vous électoral. Dernier en date à refuser à prendre part à l’élection, Abdallah Djaballah qui s’est pourtant porté candidat en 2004 et en 1999.

Raisons invoquées par le président du front pour la justice et le développement (FJD) : « absence de conditions garantissant un scrutin libre et transparent». Selon lui, le boycott est l’unique solution du moment que les autorités n’ont pas « montré de volonté pour assurer un scrutin transparent notamment après le rejet de la proposition de loi relative au régime électoral initiée par le parti ».



A quelques nuances près, ce sont les mêmes arguments avancés par Ennahda qui a annoncé une semaine plus tôt son rejet de l’élection au motif de ne pas cautionner des « pratiques antidémocratiques ». « Toutes les propositions de l’opposition concernant l’amendement du code électoral et la mise en place d’une commission indépendante de supervision des élections ont été rejetées », justifie son responsable, Mohamed Douibi.

Après avoir entretenu quelques semaines un faux suspense, le MSP, d’Abderazak Mokri a également décidé de ne pas participer à l’élection. Si l’on excepte quelques petites formations à connotation islamiste, mais sans réel ancrage populaire, on peut dire que dans une large mesure la mouvance islamiste, déjà éclatée et dispersée, sera absente du prochain scrutin qui s’annonce pourtant crucial pour l’avenir de la Nation.

LG Algérie

A l’évidence, l’incapacité de ces formations à présenter une candidature crédible, jouissant d’un large consensus, a contribué au retrait de ces partis de la course. Mais pas seulement : il ya aussi cette guerre de leadership à laquelle se livrent certains, les conséquences du «printemps arabe », sans compter la méfiance entre les uns et les autres, Djaballah ayant toujours accusé beaucoup de formations islamistes d’être la création du pouvoir.

Mais au-delà de cette absence de l’élection, la question vaut surtout pour le devenir de ces formations. Nés dans un contexte particulier, les partis islamistes, du moins les mobilisateurs d’entre eux ont pâti de la violence meurtrière du parti dissous, une stratégie qui contraint désormais, après les traumatismes et les dégâts en vies humaines occasionnés au pays, les électeurs à beaucoup de méfiance vis-à-vis de cette mouvance. A cela s’ajoute l’émergence d’une nouvelle génération, dans un contexte de relative aisance matérielle, qui n’est plus réceptive au discours extrémiste. Enfin, les erreurs des partis islamistes arrivés au pouvoir dans les pays arabes touchés par les révoltes confinent à des révisions stratégiques auxquelles les partis islamistes algériens ne semblent pas encore préparés. Signe de ce désarroi : on entend rarement, ces partis se référer à la Charia comme ils le faisaient jadis.

Dès lors, il faut s’attendre dans les prochains mois à des révisions déchirantes au sein de ces partis d’autant qu’une nouvelle constitution qui devrait renforcer le caractère républicain, conséquence directe des « dérapages » constatés chez certains pays arabes, verra le jour. Des révisions qui appellent des aménagements idéologiques, de nouvelles méthodologies de lutte et l’avènement d’une nouvelle génération de responsables capables de transcender les divergences et d’unifier les rangs, pour reprendre une terminologie chère au mouvement.

Sofiane Tiksilt