Entre les voix des candidats et leurs soutiens, qui appellent à une forte participation et celles appelant au boycott, sinon l’abstention, l’enjeu de la participation captera l’attention des observateurs qui, déjà, constatent une compétition déséquilibrée. Tellement déséquilibrée que, pour certains, le taux de participation représentera, en définitive, le score du président sortant.
Maintenant que le filtre des signatures à déposer au Conseil constitutionnel a fait son oeuvre, la masse de candidats, plus de 150, qui se sont annoncés, n’est plus qu’un groupe de 8 candidats qui attendent la validation de leurs dossiers. Abdelaziz Bouteflika, selon des sources proches de son comité de campagne, aurait réuni plus d’un million de signatures et celles de 16.000 élus, essentiellement collectés et en un temps rapide par les quatre partis qui le soutiennent, le FLN, le RND, TAJ et le MPA.
De ce côté-là, ça sent déjà l’effet «rouleau compresseur» dans une compétition où les rapports de force s’annoncent déséquilibrés. A tel point que cela semble expliquer, en grande partie, ceux qui rejettent le quatrième mandat et pour qui l’option Bouteflika ne semble avoir aucune alternative à l’issue de ce scrutin. Chez les soutiens au quatrième mandat, Abdelkader Bensalah, en tant que président du Conseil de la nation, a fait le souhait que la campagne électorale pour l’élection présidentielle 2014 ne sorte pas de son «cadre légal». Un message adressé aux partisans du boycott, bien évidemment.
«Des débordements sont enregistrés lors de toute campagne électorale, mais il est souhaitable que le débat électoral ne sorte pas de son cadre légal», a-t-il soutenu lors de la séance inaugurale de la session de printemps de la chambre haute du Parlement. Même son de cloche chez le son homologue de l’APN. Larbi Ould Khelifa, a considéré, au sujet du soutien controversé de certains députés à Bouteflika, qu’il y a «pluralité politique à l’APN, à travers la présence de plusieurs formations politiques dont les orientations et les positions peuvent converger ou diverger».
Le président de TAJ, Amar Ghoul, a appelé «à une participation massive pour barrer la route à ceux qui veulent attenter à la stabilité de l’Algérie et compromettre sa sécurité ». Louisa Hanoune a fait de même. Celle-ci ne s’empêche pas moins de contester les obstacles de l’administration, selon ses dernières déclarations adressées au chef de l’Etat. La secrétaire générale du PT a, quant à elle, fait savoir que la participation de sa formation à la prochaine élection présidentielle vise à contribuer à la préservation de la nation algérienne et à offrir le choix au peuple pour déterminer son avenir.
Le président du Front El-Moustakbel (FM), Abdelaziz Belaïd, a appelé, lui, à consolider «les principes de démocratie et rétablir la confiance des citoyens». Pour sa part, Moussa Touati a demandé au peuple algérien d’«exercer sa souveraineté et à la défendre» lors de la prochaine présidentielle. Il a également «déploré» les appels au boycott et a exhorté le peuple algérien à exprimer sa position «soit en élisant son candidat, soit en organisant des sit-in pacifiques devant les bureaux de vote, au lieu de boycotter les élections».
De son côté, le président du RA, Ali Zaghdoud, a affirmé que «la prochaine élection présidentielle était une échéance porteuse d’espoir pour le peuple algérien qui a le droit de choisir la personne qui dirigera le pays».En face, la cassure avec le processus électoral ne fait plus de doute. D’abord chez les islamistes. Le MSP, Ennahda et le Front de la justice et du développement voient dans ce scrutin «une affaire de famille au sein du pouvoir », pour paraphraser Abderrezak Mokri. Cette décision de boycott a été votée par tous les partis islamiques. Le résultat était sans appel, une grande majorité dans les majliss echoura de ces formations constatant, en effet, que Bouteflika n’aurait eu aucun mal à remporter celle-ci.
Ce boycott laisse donc la voie libre à l’actuel président Bouteflika et à son parti, le Front de libération national, pour remporter une quatrième élection consécutive.L’ex-président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Saïd Sadi, deux fois candidat à la magistrature suprême de son pays, a appelé, mardi dernier, les Algériens à se mobiliser pour «délégitimer» la présidentielle du 17 avril, à laquelle le président Abdelaziz Bouteflika, 76 ans, très malade et 15 ans de pouvoir, est candidat. «La seule riposte à ce funeste projet est politique.
Il faut délégitimer ce scrutin par une mobilisation citoyenne massive pour un boycott à même de raccourcir le terme de cette opération », a ajouté l’ancien président du RCD. M. Sadi a plaidé en faveur d’une «période de transition», citant l’exemple de la Tunisie voisine qui a été «capable de légiférer sur une nouvelle Constitution autour d’un consensus».
A ces voix, s’ajoutent plusieurs personnalités, dont certaines ont été candidates à la présidentielle. Le MDS, lui, est sorti de cette dualité en appelant à voter blanc. Malgré tout ce qui se dit et s’écrit, dans un contexte où la parole et on ne peut plus libérée avec les télévisions privées et les réseaux sociaux, c’est tout de même le président sortant qui recèle le plus de chance de remporter l’élection du 17 avril. Cela peut, et c’est logique, contribuer à faire baisser la participation, puisque pour nombre de ceux qui s’abstiendront d’aller aux urnes le 17 avril, Bouteflika va passer et même qu’il peut le faire du premier tour. A tel point que certains observateurs pensent d’ores et déjà que, vu comment les choses se présentent, le taux de la participation, ce sera plus ou moins le score de Bouteflika, c’est-à-dire à quelques points de pourcentage près.
D’où l’embarras des autres candidats qui doivent, en même temps, faire campagne pour amener les gens à voter tout en sachant qu’ils risquent de faire le jeu du candidat favori. La campagne électorale, qui sera lancée après que la liste des candidats à la candidature sera définitivement tamisée, nous donnera davantage d’éléments sur cette question, dont les termes ne risquent pas de trop changer.
N. B.