Election présidentielle, Appréhensions pour un scrutin sous haute surveillance

Election présidentielle, Appréhensions pour un scrutin sous haute surveillance

Pas moins de vingt-trois millions d’électeurs sont appelés à voter, aujourd’hui, dans un climat où la raison semble avoir cédé la place à la suspicion et à l’inquiétude. Jamais élection, dans l’Algérie post-indépendante, n’a susci té autant d’inquiétudes et d’appréhensions comme celle dont le scrutin s’ouvre, aujourd’hui, pour la collecte de plus de 23 millions de voix, aux fins d’élire un président de la République.

Après son ouverture pour la Communauté algérienne résidante à l’étranger ainsi qu’à travers les 167 bureaux itinérants pour les populations des régions du sud du pays, entre autres, les populations nomades, c’est le reste des wilayas qui attendent leurs électeurs pour exprimer leur vote au profit d’un des six candidats inscrits à la course pour occuper le siège du président, au palais d’El Mouradia. Il faut avouer que c’est un scrutin qui ne ressemble à aucun autre de ceux déjà organisés par le passé.

En effet, c’est pour la première fois que les Algériens en craignent plus les conséquences que les résultats. L’on se rappelle que la plus forte fièvre électorale que l’Algérie a vécue, a été celle dont le processus a été enclenché en 1991, où pour la première fois, elle vivait des élections municipales pluralistes.

Elections qui avaient donné comme vainqueur à la majorité, le Front islamique du salut, (FIS), le plus grand parti islamiste d’alors. Si les Algériens attendaient, à cette époque, les résultats avec impatience, ils n’avaient, par contre, jamais imaginé que leurs conséquences allaient faire basculer le pays dans le chaos. Aujourd’hui, l’histoire semble vouloir se répéter, non pas en enregistrant une impatience pour les résultats mais pour voir de quoi sera fait le 18 avril, ce jour d’après élection.

UNE CAMPAGNE AFFREUSE, SALE ET MÉCHANTE

« Prions Dieu pour qu’il nous accorde sa Miséricorde, le 18 avril prochain,» espèrent beaucoup d’Algériens. «Pensez-vous que le pays va rester le même au lendemain de l’élection du 17 avril ? », interrogent d’autres. Il est évident que quels que soient les résultats, les candidats malheureux vont crier à la fraude.

Mais, ce n’est pas tant la dénonciation de ce scandale qui dérange puisque c’est devenu une tradition. Ce qui angoisse les populations, ce sont, plutôt, les déclarations intempestives de certains milieux qui poussent à la déflagration du pays, si tel ou tel candidat ne l’emporterait pas. Déclarations et autres dérives qui ont été enregistrées, tout au long de la campagne électorale qui a duré 22 jours et a pris fin, dimanche dernier, à minuit. De la dénonciation, l’insulte et la diffamation, à la délation, l’accusation et l’inculpation, jusqu’à imprégner les discours électoraux, de rancune et de haine. De telles attitudes ne peuvent être motivées que par de seules impulsions subjectives d’individus, plutôt aigris, et ce, quelle que soit la partie qui les adoptent. Attitudes affreuses, sales et méchantes.

Elles n’avaient, en tout cas, rien de politique. Les pays qui se respectent et les Etats de droit les qualifient d’«incitations à violence» contre lesquelles la justice doit s’autosaisir. Ceci, parce qu’il y va de la préservation de l’unité nationale et de l’intégrité territoriale du pays qui, une fois menacées, seules les forces de l’Armée nationale sont, constitutionnellement, chargées de les protéger. C’est d’ailleurs, ce qui s’est passé dans la wilaya de Ghardaïa, après les violents troubles qui l’ont secouée, pendant plusieurs mois.

LA CONJONCTURE DE TOUS LES DANGERS

Le ministère de l’Intérieur a dû passer la main à celui de la Défense en raison de l’enlisement de la situation sécuritaire, dans la région. (Voir «Le Quotidien d’Oran» du lundi 14 avril, page 2). L’on avait appris que, même si après ce changement, les brigades anti-émeutes de la Sûreté nationale, en plus des brigades de la Gendarmerie (affiliées au MDN) restées déployées sur le terrain, ils avaient commencé à activer sur instructions, seules, du vice-ministre de la Défense nationale, chef d’état-major de l’ANP, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah. Le patron de la DGSN, le général major, Abdelghani El Hamel, a donc, depuis, «arrêté d’instruire ses troupes pour ne pas faire doublant.»

La visite, avant-hier, de Gaïd Salah, au Commandement général de la Gendarmerie nationale, a été, selon lui, pour rappeler «l’engagement de l’ANP, à réunir toutes les conditions de sécurité et de stabilité à la veille de ce rendez- vous électoral». Le général de corps d’armée a souligné en substance «l’importance que revêt le corps de la Gendarmerie nationale, en tant que partie indissociable de l’ANP et l’un des piliers indispensables à la sécurité et la stabilité du pays. »

Le scrutin d’aujourd’hui se tient sous haute surveillance tant la conjoncture actuelle est une des plus délétères. Il est important de noter que ces dernières années, l’Algérie est entourée par des pays en guerre. Elle a toutes ses frontières face au feu. C’est la conjoncture de tous les dangers. L’on apprend que toutes les forces de sécurité sont mises depuis, quelques jours, en alerte en prévision d’éventuelles perturbations du déroulement du scrutin d’aujourd’hui, mais aussi de l’après élection.

Ghania Oukazi