Les différents candidats annoncés sont déjà en pré-campagne et leurs activités semblent déjà s’inspirer de la récente actualité, sans encore s’attaquer aux grands défis et débats de l’avenir.
Pendant que leurs troupes s’affairent à remplir la première condition, à savoir, faire valider la candidature à travers les signatures, les candidats, eux, sondent déjà le terrain et mettent les dernières retouches à leurs plans de campagnes. Mis à part les nombreuses candidatures que l’opinion qualifie de fantaisiste, telle que celle d’un chômeur issu d’un quartier populaire d’Alger, celles des poids lourds comme on dit, doivent, en effet, être appuyées par le volume exigé de signatures à déposer auprès du Conseil constitutionnel.
C’est là une difficulté non négligeable, car il faut bien se dire que depuis que les résultats des élections locales de 2012 sont connues, on savait que le FLN et son allié le RND allaient réserver leur position dominante en termes de nombre d’élus au président qu’ils allaient soutenir en 2014, Abdelaziz Bouteflika en l’occurrence. Les autres partis politiques à s’être illustrés, à savoir les islamistes de l’Alliance verte et le PT, vont donc chacun recourir aux élus locaux pour des causes différentes.
Le MSP, El Islah et Ennahda ont donc pris option pour le boycott et il faut s’attendre à ce que leurs élus locaux soient instruits pour aller dans la même direction. Leur campagne à eux, c’est justement, appeler à la non campagne et de tout faire pour aggraver l’abstention que les islamistes ne manqueront pas de revendiquer plus tard.
Quant à la candidate Louisa Hanoune, elle dispose du nombre d’élus suffisant et des troupes et des soutiens qui devraient lui faire passer l’écueil administratif sans soucis. Les autres, entendre par là les candidats sans machines électorale avérées, tels que Ali Benflis, c’est du côté des signatures des électeurs de base, celles des masses en quelque sorte, qu’il faudra travailler et il faut constater que pour lui comme pour les autres, tels que Jilali Soufiane, et davantage Rachid Nekkaz ou Yasmina Khadra et même l’énigmatique général Yala, la bataille sera rude même si elle peut être abordable. En tous cas, on sait d’avance que la collecte des signatures n’a pas le même sens pour tout le monde. Les candidats ont un délai de 45 jours pour déposer leurs dossiers auprès du Conseil constitutionnel qui statuera sur leur validité ou pas, dans un délai de dix jours.
La loi électorale exige des candidats indépendants de récolter au moins 60 000 signatures d’électeurs. Ces signatures doivent être recueillies à travers au moins 25 wilayas (préfectures), et 1500 signatures sont exigées, au minimum, dans chacune des wilayas. Sinon, les candidats indépendants peuvent présenter une liste comportant au moins 600 signatures individuelles de membres élus d’assemblées populaires communales (mairies), de wilayas (préfectures) ou parlementaires et réparties au moins à travers 25 wilayas. A côté de cette question de forme qui n’est pas sans importance, se pose aussi la question de savoir les thèmes de campagne principaux, que les candidats comptent aborder. On sait que le climat général, c’est que personne ne semble se poser frontalement contre le président sortant.
Ali Benflis, par exemple, au contraire de ce qui s’est passé en 2004, ne se met pas en opposition contre Bouteflika, mais ressemble plus à un athlète qui court dans son propre couloir sans se soucier de la vitesse des autres concurrents. Tout cela pour dire que l’on risque d’assister à une campagne pas aussi âpre que l’on pourrait le penser, dans la mesure où le bilan du président sortant et devant lequel les autres diront représenter l’alternative, ce bilan-là ne sera pas au coeur des débats.
Ou du moins pas de manière directe, dans la mesure, où le plus probable est que les autres candidats auront tendance à forcer le trait sombre sur la situation économique et social du pays, sans pour autant tout mettre sur le président sortant. Ce qui conforte la piste d’une campagne, qui ne viserait pas directement le bilan présidentiel, c’est justement le fait que les plus réticents à l’idée même d’organiser cette élection et qui sont, au fond, contre le principe que le président sortant puisse se représenter, ceux-là ne prendront tout bonnement pas part à l’élection et s’inscrivent tous dans l’option du boycott et de l’appel à l’abstention.
Ce sont donc les plus radicaux et même eux, qu’on n’entend pas trop s’attarder sur le bilan présidentiel. Pour sûr, cela dit, tout candidat inscrit son discours de campagne sur le changement et sur la continuité. Le changement de ce qui ne va pas, la continuité de ce qui marche. Le changement de ce dont ne veulent pas les Algériens et la continuité de ce qu’ils tiennent.
C’est ce qui pousse à dire que l’on retrouvera les candidats à verser dans les lieux communs, tels que le chômage, la corruption, mais aussi à réserver une place de choix sur une question à laquelle tout le monde les attend, les événements de Ghardaïa, si proches dans l’actualité. On peut même penser que les candidats feront de cette ville une étape très spéciale, d’autant qu’elle leur donnera l’occasion de montrer leur habilité à se montrer en hommes d’Etat et en garants de l’unité nationale.
De là, à évoquer ouvertement la question des menaces extérieures sur le pays, le printemps arabe et la sécurité régionale, voilà sans doute un pas qu’il ne franchiront pas facilement, vu qu’il profite surtout au président sortant, puisqu’on ne change pas de général au milieu d’une bataille.
N. B.