Comme ne suffisait pas l’extrême largesse que leur est déjà faite à travers la concorde civile puis la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, les terroristes islamistes goûteraient bientôt, à en croire des informations non démenties, à d’autres délices de la République. Le chef de l’Etat se préparerait, selon Hachemi Sahnouni, un des membres fondateurs du FIS dissous, à élargir entre 4 000 et 7 000 islamistes emprisonnés pour faits de terrorisme.
Sofiane Aït-Iflis – Alger (Le Soir) – Alors que la dégradation à nouveau de la situation sécuritaire recommande une évaluation lucide de la politique de réconciliation nationale, le chef de l’Etat choisit, a contrario, de redynamiser le processus qui fait la part belle aux terroristes. Pour insistante qu’elle soit, l’assertion de ce que Bouteflika ait retenu d’élargir des cohortes d’islamistes emprisonnés pour appartenance à groupes terroristes est fort indubitablement vraie. D’autant que les fondateurs du parti dissous qui alimentent ces jours-ci la chronique médiatique affirment détenir le «scoop» de sources hautement crédibles de la présidence de la République. Hachemi Sahnouni, qui prend à témoin Zeraoui et Hamadache, use du ton de la certitude pour ébruiter ce qu’il entend assurément comme une bonne nouvelle.
Pour lui, cette amnistie qui dit bien son nom sera prononcée à l’occasion de la célébration de la fête nationale de l’Indépendance, soit le 5 juillet prochain. Ce que confirme, par ailleurs, à demi-mot le président de la cellule de suivi de l’application de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, Merouane Azzi. Ce dernier rappelle, comme pour faire valoir qu’il est à l’origine de la décision présidentielle, que l’élargissement des islamistes emprisonnés figure au chapelet de revendications que son instance avait soumis au chef de l’Etat. L’initiative de Meroune Azzi n’est pas restée sans appuis, puisque le trio de «cheikhs», Sahnouni, Zeraoui et Hamadache, a, il y a deux mois de cela, rendu Bouteflika destinataire d’un courrier dans lequel il sollicitait des mesures de clémence en faveur des terroristes détenus. Le président de la République, réconciliateur attitré, n’est, semble-t-il, pas demeuré insensible à la doléance.
D’ailleurs, il a toujours affirmé qu’il ne se départirait pas de sa politique de la main tendue aux terroristes. Dans la loi portant charte pour la paix et la réconciliation nationale, il s’est offert la possibilité légale de prendre d’autres mesures qu’il jugerait à même de faire recouvrer la paix. C’est le fameux article 47 de la loi en question. Ceci même si d’aucuns savent que la politique de réconciliation nationale n’a pas toujours épousé les rigueurs de la loi. L’amnistie générale dont ont bénéficié les terroristes repentis est en la matière une illustration parfaite du contournement des dispositions de la loi. Et l’élargissement des terroristes emprisonnés projeté, dont seront exclus, dit-on, les auteurs d’attentats à l’explosif, de viols et de massacres collectifs, pourrait dans la réalité profiter à tous les terroristes sans discernement. Le risque de voir les maquis réinvestis par les islamistes élargis, comme c’était le cas pour les bénéficiaires de l’amnistie, est grand. Car l’Etat semble, pour cette nouvelle opération de charme à l’endroit des islamistes, se suffire d’une déclaration sur l’honneur dans laquelle le candidat à la libération s’engage à ne pas replonger dans l’action terroriste.
Le risque pris est d’autant plus grand que cet élargissement intervient à un moment où l’Aqmi a repris ses attentats visant les services de sécurité, notamment au centre et à l’est du pays. En témoignent les attentats commis dans la wilaya de Tizi-Ouzou et à Jijel. Des attentats qui attestent, si besoin était, de l’échec de la réconciliation nationale à laquelle Bouteflika tient comme à un sacerdoce.
S. A. I.