Des rumeurs s’étaient propagées dans la nuit de dimanche sur les réseaux sociaux et dans des médias sur un départ imminent vers l’étranger de M.El Gueddafi, mais ce dernier a encore défié les rebelles et l’Otan dans un message sonore
Les rebelles libyens ont pris hier le contrôle de trois villes clés sur la route de Tripoli, l’une de leurs plus importantes percées depuis le début du conflit il y a six mois, après une apparition (sonore) du colonel Mouamar El Gueddafi, toujours inflexible. Des rumeurs s’étaient propagées dans la nuit sur les réseaux sociaux et dans des médias sur un départ imminent vers l’étranger de M.El Gueddafi, mais ce dernier a encore défié les rebelles et l’Otan dans un message sonore diffusé au même moment et qui était «en direct» selon la télévision libyenne.
Sur le terrain, les insurgés ont affirmé contrôler la «majeure partie» de Zawiyah, à une quarantaine de km à l’ouest de la capitale libyenne ainsi que les villes de Gharyane et Sorman, situées respectivement à 50 km au sud de Tripoli et à une soixantaine de km à l’ouest. Ils resserrent ainsi l’étau autour de Tripoli, bastion du régime de Mouamar El Gueddafi, au pouvoir depuis 42 ans et qui fait face depuis le 15 février à une révolte qui s’est transformée en conflit armé. «En gros, la majeure partie de la ville (de Zawiyah) est sous le contrôle des combattants rebelles», a déclaré le commandant rebelle Abdoul Hamid Ismaïl. Selon lui, la bataille, qui a fait rage durant la nuit, a permis aux rebelles de repousser les forces loyalistes à la périphérie est de la ville. Cinq insurgés ont été tués. Un correspondant de l’AFP a pu se rendre jusqu’au secteur d’Awlat Jarbo, situé à deux kilomètres de la porte est de Zawiyah. Il pouvait entendre des bombardements de temps à autre.
A l’issue d’intenses combats dimanche, les insurgés ont également pris le contrôle de Sorman et de Gharyane, qui, avec leurs garnisons, servaient de rempart à Tripoli.
La rébellion a aussi «le contrôle total» des 15 km de route entre les villes côtières de Zawiyah et de Sorman, ce qui prive Tripoli de sa voie habituelle d’approvisionnement depuis la Tunisie, a déclaré un porte-parole des rebelles. A Tripoli, le porte-parole du régime Moussa Ibrahim a admis dimanche que les rebelles étaient entrés dans Gharyane, toute en se disant confiant que le régime en reprendrait le «contrôle total». Il a également reconnu des «affrontements» à Sorman, en évoquant l’implication de «centaines de volontaires appuyées par les moudjahidine pour mater les rebelles».
Concernant le secteur autour de l’enclave rebelle côtière de Misrata (200 km à l’est de Tripoli), M. Ibrahim a affirmé que les troupes du régime avaient «repris le contrôle de Touarga» plus au sud. Samedi, les rebelles avaient indiqué avoir consolidé leurs positions à Touarga dont ils avaient pris le contrôle la veille. Sur le front Est, les rebelles contrôlent désormais tout l’est de la cité pétrolière de Brega, selon un journaliste de l’AFP sur place. Les combats se déroulaient hier dans la partie ouest, où le journaliste entendait des échanges de tirs d’artillerie du côté des installations pétrolières. Mais malgré la percée des rebelles, M. El Gueddafi reste inflexible. «La fin du colonisateur est proche et la fin des rats est proche. Ils (les rebelles) fuient d’une maison à l’autre devant les masses qui les chassent», a-t-il dit sans son message sonore.
«Ils n’ont plus qu’à recourir au mensonge et à la guerre psychologique après l’échec de toutes les guerres».
Le dirigeant libyen, qui tient toujours malgré la campagne militaire de l’Otan, l’isolement et les sanctions internationales, a appelé ses partisans à garder le moral haut, à résister et à se «préparer pour la bataille pour libérer» les villes tenues par les rebelles.
Un émissaire de Ban Ki-moon aux pourparlers sur la Libye
L’ex-ministre jordanien des Affaires étrangères Abdul Ilah al-Khatib, envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, est arrivé hier à Tunis pour se joindre aux pourparlers sur l’avenir de la Libye, qui se tiennent en Tunisie, a constaté un journaliste de l’AFP. Abdul Ilah al-Khatib a déclaré être venu en Tunisie pour «se joindre aux pourparlers» engagés entre des responsables du régime de Mouamar El Gueddafi et de la rébellion. Ces négociations se dérouleront «à Tunis», a précisé le responsable. Selon son entourage, un hôtel de la banlieue nord de la capitale pourrait les accueillir. L’émissaire de l’ONU a été reçu à son arrivée à l’aéroport de Tunis-Carthage par le secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères de Tunisie Radhouane Rouissi et devait rencontrer aussitôt le Premier ministre de transition tunisien Béji Caïd Essebsi. Des pourparlers ont par ailleurs, commencé dans la nuit de dimanche à lundi à Djerba (sud) entre responsables loyaux au colonel El Gueddafi et des représentants du Conseil national de transition (CNT) libyen. Un émissaire du président du Venezuela Hugo Chavez, dont le nom n’a pas été précisé, participe aux pourparlers de Djerba, selon une source tunisienne proche des négociations. Le secrétaire général de l’ONU avait affirmé jeudi «sa ferme conviction qu’il ne peut y avoir de solution militaire à la crise libyenne» et exhorté le régime Kadhafi et les rebelles et leur gouvernement de transition, à «engager immédiatement» le dialogue avec l’envoyé spécial des Nations unies. Il invitait les protagonistes du conflit à «répondre concrètement et positivement aux idées qui leur sont proposées, afin de mettre fin au bain de sang dans le pays».