Ce lourd bilan bat en brèche la propagande marocaine qui veut chloroformer la communauté internationale l Des centaines de maisons
et de boutiques de Sahraouis saccagées l Les forces marocaines ont imposé un couvre-feu dans toute la ville d’El Ayoun.
Loin de la propagande du makhzen qui victimise son bras armé à grand renfort médiatique, le constat au lendemain de la razzia d’El Ayoun se passe de tout commentaire. Dans un communiqué rendu public hier, le Front Polisario a soulevé un coin du voile sur un massacre à huis clos commis contre les Sahraouis dans la ville martyre d’El Ayoun. A l’heure où nous mettions sous presse, onze personnes, des enfants et des femmes notamment, ont péri sous les balles des unités de l’armée marocaine.
Or, officiellement, il n’y a eu que 3 victimes, toutes marocaines et qui ont ému – on s’en doutait –, les médias occidentaux largement acquis à la cause de sa majesté. Mais les Sahraouis qui ont allumé l’intifadha d’El Ayoun ne pouvaient pas cacher leurs morts qu’ils ont enterrés dignement hier.

Ils sont onze martyrs sahraouis à avoir été assassinés loin des feux des projecteurs et des manchettes des journaux en France et au Maroc. Pis encore, 723 blessés, dont la majorité gravement, sont recensés alors que le sort de 159 personnes est toujours inconnu. Il est loisible d’imaginer le sort d’un disparu au sens «royal» du terme.
C’est là le dramatique bilan encore provisoire d’une expédition punitive visiblement bien ficelée et sur lequel les médias occidentaux n’ont curieusement pas zoomé. Le Front Polisario a attiré hier l’attention de la communauté internationale sur la tragédie qui s’est abattue sur son peuple de l’autre côté du mur via un communiqué.
«L’héroïque population de la ville d’El Ayoun a enterré ses martyrs, dont le nombre s’élève jusqu’à présent à 11, et le nombre n’est pas exhaustif, tandis que celui des disparus ou les personnes recherchées par leurs parents et proches a atteint 159 personnes dont le sort laisse supposer qu’il y a parmi eux des morts», a-t-il souligné. Le Polisario n’a pas manqué de préciser que ce bilan provisoire déjà lourd, «risque de s’alourdir vu les dimensions de l’agression barbare».
Il se fait fort de révéler au monde les grands moyens mis à contribution par le royaume pour mâter les manifestants d’El Ayoun. «Les forces marocaines ont utilisé des balles réelles, des bombes lacrymogènes, des bâtons, des cailloux et des canons à eau», lit-on dans le communiqué rendu public hier. Au chapitre des dégâts matériels, le Polisario dresse un inventaire qui prend l’allure d’une dévastation : «…Les forces de l’occupant ont également saccagé des centaines de maisons et boutiques et détruit des voitures appartenant à des Sahraouis.»
C’est dire que les Sahraouis d’El Ayoun ont eu droit à un lundi noir qui sera marqué d’une pierre blanche pour la suite de leur lutte pour l’autodétermination. Loin des caméras et de la curiosité des médias. Le Maroc a tôt fait, en effet, de faire le ménage autour de la ville en expulsant manu militari journalistes, animateurs d’ONG, et même des députés européens avant de faire feu…
Couvre-feu
«Les forces marocaines ont procédé à l’expulsion des journalistes étrangers du campement Gdim Izik pour ne pas avoir de témoins du massacre», souligne le Polisario, écorchant au passage l’Union européenne d’avoir accordé un statut avancé à sa «majesté». Et d’ajouter ironiquement : «Un statut qui doit être renforcé maintenant d’une médaille, notamment après ses ‘’performances’’ dans ce domaine suite au massacre d’El Ayoun occupée». Le Front Polisario avait annoncé lundi la mort d’un jeune Sahraoui et des «centaines» de blessés civils dans l’assaut donné contre le camp.
Face à un tel état des lieux, le Conseil des ministres de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) réuni en session d’urgence, a appelé l’Organisation des Nations unies à «assumer ses responsabilités» dans la protection des civils sans défense dans les territoires sahraouis occupés.
Dans un communiqué sanctionnant une réunion extraordinaire lundi soir du Conseil des ministres, les autorités sahraouies ont tenu le gouvernement marocain pour responsable de «ce nouveau crime perpétré, lundi matin, à El Ayoun». A l’heure où nous mettions sous presse, la ville d’El Ayoun était encore en état d’alerte. Les forces marocaines ont imposé un couvre-feu dans toute la ville.
Hassan Moali