Le président américain a laissé entendre vendredi que son homologue égyptien devrait quitter le pouvoir, sans l’appeler explicitement à la démission. L’Union européenne a quant à elle insisté pour que l’Egypte engage une transition « maintenant ».
La Maison Blanche serait-elle en train de perdre patience face à Hosni Moubarak? Au soir d’une nouvelle journée de mobilisation massive en Egypte, Barack Obama a en tout cas indiqué clairement que son homologue égyptien devait quitter le pouvoir, sans toutefois l’appeler explicitement à la démission, l’exhortant à prendre la « bonne décision ».
« Ayant accompli cette rupture psychologique, ayant pris la décision de ne pas se représenter, je pense que la chose la plus importante qu’il doit à présent se demander, c’est comment rendre cette transition efficace, durable et légitime », a souligné Obama à l’adresse de son homologue égyptien, lors d’une conférence de presse commune avec le Premier ministre canadien, Stephen Harper.
« La question principale qu’il devrait se poser, c’est ‘comment puis-je laisser un héritage qui permette à l’Egypte de réussir cette période de transformation ? » Barack Obama a confié qu’il avait souligné lors de ses conversations téléphoniques avec lui que ce ne sont pas les Etats-Unis qui détermineraient l’avenir de son pays. Mais il a noté aussi que si le pouvoir égyptien optait pour un simulacre de réforme, l’entreprise échouerait.
« En revenir aux anciennes méthodes ne fonctionnera pas. La répression ne fonctionnera pas. Le recours à la violence ne fonctionnera pas. Les tentatives de blocage des flux de l’information ne fonctionneront pas », a insisté le chef de l’Etat américain. « La seule chose qui fonctionnera, c’est faire progresser une transition ordonnée qui commence tout de suite, qui engage tous les partis, qui mène à des pratiques démocratiques, des élections libres et équitables, un gouvernement représentatif qui réponde aux revendications du peuple égyptien. »
L’Europe exige des changements immédiats
De son côté, l’Union européenne a elle aussi insisté vendredi pour que l’Egypte engage sans délai des changements politiques. Au cours d’un sommet à Bruxelles, les dirigeants des 27 pays du bloc ont estimé que « le processus de transition devait démarrer maintenant », alors que la population continue de manifester massivement pour réclamer le départ du président Hosni Moubarak, qui refuse de démissionner.
Toutefois, aucun responsable européen n’entend franchir le Rubicon qui consisterait à demander explicitement le départ de M. Moubarak. « Ce qui compte, c’est que la transition démocratique se fasse sans tarder (…) mais nous laissons aux Egyptiens le soin de déterminer qui doit la conduire et comment », a souligné le président français Nicolas Sarkozy.
Plus détonant, le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi a lui plaidé en faveur d’ »une transition démocratique sans rupture avec un président comme Moubarak » qui est « un homme sage ». Exprimant de vive voix ce que plusieurs dirigeants de l’UE pensent tout bas, selon des diplomates.
Voix discordantes
L’UE a dans le même temps laissé planer la menace d’une remise en cause de son aide économique à l’Egypte, prévue pour atteindre 449 millions d’euros entre 2011 et 2013, si les « engagements » pris par Le Caire en matière de respect des libertés publiques ne sont pas tenus. « Beaucoup de ces engagements prévus par l’accord d’association (entre l’UE et l’Egypte) n’ont pas été respectés », a regretté le Premier ministre britannque, David Cameron. Il s’agit néanmoins du seul moyen de pression potentiel de l’Europe sur l’Egypte, où elle apparaît depuis le début à la traîne des Etats-Unis, seuls à même d’influer sur la position du raïs.
Pour ne rien arranger, des voix discordantes s’élèvent. Le Premier ministre belge, Yves Leterme, s’est ému vendredi de voir les grands pays de l’UE multiplier les déclarations sur l’Egypte en occultant la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, censée parler au nom de tous. Déjà peu visible, la Haute représentante essuie un feu roulant de critiques pour son manque de réactivité sur le dossier.