Égypte, Moubarak : moi ou le chaos

Égypte, Moubarak : moi ou le chaos
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Tout le monde attendait sa chute, à la suite des manifestations monstres de mardi, réclamant son départ, mais Moubarak ne cède pas. Mais pas seulement, dans une réaction de bête blessée, il a violemment répliqué, hier, en actionnant des contre-manifestations qui risquent de mener l’Égypte vers le chaos.

Kamel Amarni – Alger (Le Soir) – On frôle dangereusement une guerre civile au pays des pharaons. Hier mercredi, au lendemain du discours de Moubarak annonçant ne pas avoir l’intention de se représenter à la prochaine présidentielle et donc qu’il compte demeurer au pouvoir jusqu’en octobre prochain, le régime égyptien jette ses troupes dans la rue.

Une manifestation pro- Moubarak fait son apparition depuis le début des événements au Caire. Les partisans de Moubarak foncent alors en direction de la place Atahrir, (la Libération) occupée depuis des jours par les anti-Moubarak. Et malgré la présence de l’armée, ce qui devait arriver arriva : de violents heurts entre les deux camps lorsque les pro-régime chargent, à dos de chevaux et de chameaux, leurs adversaires.

Ce qui donnera lieu à des bagarres violentes, occasionnant des centaines de blessés. Les violences n’épargneront pas non plus de nombreux journalistes de diverses nationalités qui s’y trouvaient. Des cocktails Molotov font leur apparition. Deux de ces engins explosifs ont ciblé le Musée central du Caire qui a failli partir en fumée n’était l’intervention de l’armée qui a réussi à éteindre l’incendie. Les heurts entre les deux camps se sont poursuivis durant toute la journée, et ce n’était qu’en début de soirée d’hier que la police commençait à charger les pro-Moubarak, particulièrement belliqueux. Face à cette escalade dangereuse, la communauté internationale a condamné, en chœur, «le recours à la violence». Washington, bien sûr, mais aussi l’Union européenne, l’Onu, l’Otan, Londres et bien d’autres. Mais, cette fois, le régime égyptien répond aux interpellations diplomatiques d’une manière pour le moins «musclée». Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères égyptien a fait cette fulgurante «sortie» en fin d’après-midi : «Ce que disent des parties étrangères sur “une période de transition c o m m e n ç a n t immédiatement” en Égypte est refusé». Hossam Zaki estime que «cela vise à enflammer la situation intérieure».

Il enchaîne, un cran plus virulent : «Il est très regrettable de voir des pays étrangers occidentaux comme les Etats-Unis, la Grande- Bretagne et la France, et même la Turquie qui se cherche un rôle en toute circonstance, fourrer leur nez dans les développements en Égypte.» Très sûr de lui, il assène encore : «Je les invite (tous ces pays, ndlr) à se mêler de leurs affaires. Ces pays se sont permis d’une manière osée et sans précédent de parler au nom du peuple égyptien et d’adopter les revendications de certaines parties.

C’est une chose totalement rejetée par l’Égypte, gouvernement et peuple.» Avec un tel discours, à l’évidence celui de quelqu’un qui n’a plus rien à perdre, il y a lieu de s’attendre au pire. Moubarak, c’est désormais une certitude, fera tout ce qui est du domaine du possible pour garder son règne jusqu’au bout. Une explosion générale est un risque réel et de tous les instants.

Et déjà, un risque majeur dès demain, vendredi. L’opposition qui ne recule pas, elle non plus, a en effet appelé à faire de ce vendredi «un vendredi du départ». Directement concerné par l’évolution de la situation en Égypte, le Premier ministre israélien a exprimé toute son inquiétude, hier : «Il est possible qu’aucune de ces deux forces ne l’emporte sur l’autre pendant longtemps, et que l’instabilité et l’incertitude continuent pendant de nombreuses années.» Pour lui, «il y a deux mondes, deux moitiés, deux visions.

Celle du monde libre et celle du monde radical. Laquelle l’emportera en Égypte ? La réponse est cruciale pour l’avenir de l’Égypte, de la région et pour nous, ici en Israël», dira Netanyahu devant le Parlement, ne manquant pas, au passage, de souligner le souhait «du régime iranien d’une Égypte qui retourne au moyen-âge». A n’en pas douter, c’en est, là aussi, la position de Washington. Juste exprimée autrement.

K. A.