La place Tahrir a repris avec les manifestations. Plus de 10 000 salafistes y ont scandé, vendredi, baptisée « vendredi de l’application de la charia », « Le peuple réclame l’application de la loi de Dieu », « La charia est notre Constitution », « Pain, liberté, charia islamique ».
Ils demandent aux cent membres, dont huit femmes et huit chrétiens, de la commission constituante, dirigée par les Frères musulmans, d’inscrire la charia dans la nouvelle loi fondamentale du pays qu’ils envisagent de soumettre à un référendum populaire d’ici la fin de l’année.
Le président Mohamed Morsi, invité par la Gamaa islamiya, un groupe proche d’al-Qaïda, à résister à ceux qui y sont hostiles, cédera-t-il ?Depuis l’arrivée des Frères musulmans au pouvoir, la rédaction de la nouvelle Constitution, qui doit être terminée d’ici le 12 décembre prochain, faute de quoi le chef de l’Etat devra exercer ses prérogatives législatives pour trouver une porte de sortie, fait l’objet de vifs débats. Islamistes, libéraux et laïcs s’affrontent sur l’étendue des libertés. Notamment celles dont jouiront les femmes, les coptes et les autres minorités.
L’article 2 de l’ancienne Constitution stipulait que « l’islam est la religion de l’Etat, l’arabe est sa langue officielle et les principes de la charia islamique sont la source principale de la législation ». Cette formulation est soutenue par les libéraux qui estiment qu’il s’agit d’une définition large de l’islam.
Les salafistes, y compris une partie des Frères musulmans et des militants d’Al Nour, dont les « structures » ont annoncé qu’elles ne participeront pas à la manifestation, veulent plus. Ils font pression pour remplacer le terme « principes » par « préceptes » de la loi islamique, ce qui impliquerait que la loi égyptienne soit soumise à une interprétation religieuse. Déchiré entre le souci de plaire aux islamistes radicaux qui ont permis son élection en juin dernier et celui de renforcer sa légitimité à l’intérieur des frontières et sur la scène internationale, le président Morsi, qui s’est engagé à être « le président de tous les Egyptiens », doit trancher.Le nouveau patriarche copte d’Egypte, Tawadros II, dont la communauté représente 10% de la population égyptienne, est inquiet devant cette montée en puissance des islamistes radicaux. « Une Constitution qui suggère l’imposition d’un Etat religieux en Egypte est absolument rejetée », dit-il, appelant les chrétiens qui envisagent de s’exiler après les attaques qui visent leur communauté depuis 2011, à ne pas quitter le pays.
Surtout que le président Morsi les a, pendant sa campagne, assurés qu’ils sont « des partenaires nationaux » et avec « des droits complets, comme les musulmans ». En attendant, les salafistes d’Egypte, comme ceux de Libye, de Tunisie, du Yémen, braquent le « Printemps égyptien » et empêchent ces pays de répondre aux questions urgentes, notamment le redressement de l’économie.
Djamel B.