La tension monte en Egypte où les partisans du président islamiste, Mohamed Morsi, renforçaient, ce matin, leurs barricades sur deux places du Caire qu’ils occupent par milliers depuis un mois avec femmes et enfants et que la police menace de disperser à tout moment.
A l’expiration d’un ultimatum hier soir, la police a annoncé une opération imminente. Sur la place Rabaa al-Adawiya, le bastion des manifestants pro-Morsi transformé en camp retranché, des dizaines d’hommes casqués et munis de bâtons se sont massés juste après la prière de l’aube sur les barricades de briques et de sacs de sable qui barrent les entrées principales du véritable village de tentes installées autour de la mosquée. Sur une grande tribune sonorisée, leurs leaders se relaient inlassablement pour réclamer la restauration de M. Morsi et la fin du «coup d’Etat». Certains défilaient au pas et présentaient leurs bâtons à l’épaule, aux ordres d’un chef, avant d’entamer une série d’exercices physiques.
«La doctrine de l’islam nous enseigne qu’il n’y a rien de pire que de tourner le dos» à l’ennemi, lance l’un d’eux à l’AFP. «Le prix à payer sera élevé mais la victoire nous attend au bout du chemin», lâche un autre. En plein milieu de la nuit à Rabaa, Farid Ismaïl, un des cadres des Frères musulmans, a même tenu une conférence de presse pour appeler à occuper «toutes les places du pays lundi» et «délivrer un message aux leaders du coup d’Etat» : «le peuple égyptien poursuivra sa révolution». Puis les manifestants ont conspué le général Abdel Fatah al-Sissi, chef de l’armée. Ce dernier avec qui les Frères musulmans refusent tout dialogue et qui représente, selon eux, une autorité «illégitime». Le pouvoir intérimaire, relayé par la presse quasi unanime, les accuse pour sa part d’être des «terroristes», d’avoir stocké des armes automatiques sur les deux places et de se servir des innombrables femmes et enfants qui s’y trouvent comme «boucliers humains».
Ces appels et les menaces répétées des forces de l’ordre font redouter une escalade alors que plus de 250 personnes – essentiellement des manifestants pro-Morsi – ont déjà péri en un mois dans des heurts avec la police ou l’armée, ou bien avec des opposants aux islamistes. La communauté internationale, qui a récemment tenté en vain de multiples médiations, redoute une nouvelle effusion de sang et le gouvernement mis en place par les militaires semble paralysé alors qu’il a promis un processus de réconciliation devant déboucher sur des élections début 2014.
R. I. / Agences