Au lendemain de la démission du gouvernement et après quatre jours d’affrontements qui ont fait jusqu’ici au moins 26 morts, les Frères musulmans d’Egypte ont annoncé qu’ils ne participeraient pas à la manifestation massive prévue mardi après midi sur la place Tahrir, au Caire, contre le pouvoir militaire. Le Conseil suprême des forces armées (CSFA) a, pour la première fois depuis le début des violences samedi, reconnu que le pays était en « crise ».
El Baradei pressenti comme Premier ministre
L’armée au pouvoir évoque la possibilité de nommer l’ancien responsable de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) Mohamed ElBaradei comme nouveau Premier ministre. Il remplacerait Essam Charaf, dont le gouvernement a présenté lundi sa démission au Conseil suprême des forces armées (CSFA). ce dernier ne l’a pas encore acceptée. La nomination d’ElBaradei a été évoqué dans une réunion mardi entre le CSFA et diverses forces politiques, dont l’influent mouvement des Frères musulmans, selon cette source anonyme citée par l’AFP mais présente à l’entretien.
« Ne pas entraîner le peuple vers de nouveaux affrontements sanglants »
Le Parti de la liberté et la justice, issu des Frères musulmans, explique sa décision de ne pas manifester par le « souci de ne pas entraîner le peuple vers de nouveaux affrontements sanglants avec des parties qui cherchent davantage de tensions », selon un communiqué posté lundi soir sur son site internet. La formation politique appelle par ailleurs le CSFA, au pouvoir depuis la chute d’Hosni Moubarak en février dernier, à poursuivre les auteurs « des horribles crimes » commis et à arrêter « l’effusion de sang ». Le Conseil a chargé le ministère de la Justice de mettre en place un comité chargé de faire la lumière sur les violences.
Démission du gouvernement
Des mouvements égyptiens à l’origine du soulèvement ont appelé à une nouvelle manifestation mardi afin de réclamer la fin du pouvoir militaire et la formation d’un « gouvernement de salut national », à moins d’une semaine des premières législatives tenues depuis février dernier. Lundi soir, le gouvernement égyptien d’Essam Charaf, nommé en mars par le CSFA pour gérer les affaires courantes, a présenté sa démission au Conseil à la suite des violences. Une démission qui n’a pour l’heure, pas été acceptée.
Au moins 26 morts
Selon le ministère de la Santé, 24 personnes – 23 au Caire, une à Alexandrie – ont été tuées et 1900 blessées depuis samedi, notamment sur la place Tahrir, au Caire, épicentre du soulèvement du début de l’année. Dans la nuit de lundi à mardi, deux personnes ont été tuées à Ismaïliya, selon des sources médicales dans cette ville sur la mer Rouge, portant à 26 le bilan des décès.
» Le peuple veut la chute de Hussein Tantaoui «
Lundi soir, sur la place Tahrir, les dizaines de milliers de manifestants scandaient toujours « le peuple veut la chute du maréchal » Hussein Tantaoui, à la tête du conseil militaire et premier dirigeant de facto de l’Egypte. « C’est bien. Maintenant c’est le CSFA qui doit démissionner et répondre de ses actes devant nous », a réagi Tarek Sabri, un enseignant de 35 ans, après l’annonce, lundi, de la démission du grouvenement. « Nous avons besoin d’un gouvernement qui a de véritables pouvoirs. Aucun gouvernement sous l’égide du CSFA n’a de valeur », a renchéri Mohammed al-Hita, militant de 24 ans.
La place Tahrir à feu et à sang
Dans la nuit de lundi à mardi, de violents affrontements se sont poursuivis dans des rues adjacentes à Tahrir menant au ministère de l’Intérieur, cible privilégiée des manifestants et sous forte garde des forces anti-émeutes. Le ministère de l’Intérieur a accusé dans un communiqué les manifestants d’avoir lancé des cocktails molotov et tiré avec des fusils de chasse sur les forces de l’ordre, en blessant 112. Le communiqué fait par ailleurs état de « 116 émeutiers arrêtés au Caire, 46 à Alexandrie et 29 à Suez ».
Le CSFA « a étouffé la révolution »
Le conseil militaire est accusé de vouloir se maintenir au pouvoir, de ne pas tenir ses promesses de réformes et de poursuivre la politique de répression de l’ère Moubarak. Selon Amnesty international, le CSFA « a étouffé la révolution » et certaines violations des droits de l’Homme commises depuis qu’il est au pouvoir sont pires que sous le régime Moubarak. L’armée s’était engagée à rendre le pouvoir aux civils après une élection présidentielle qui doit suivre les législatives mais dont la date n’est toujours pas connue. Avec AFP