Egypte : Démission du comité exécutif du PND

Egypte : Démission du comité exécutif du PND

Le rais qui a déclaré à la chaîne américaine ABC en «avoir assez d’être président» ne veut pas partir. De plus en plus fragilisé et lâché par ses alliés occidentaux les plus sûrs, Moubarak vit une fin de règne tourmentée.

Il reste cloîtré dans sa tour d’ivoire en étant insensible aux revendications populaires et aux exigences de changement prônées par la communauté internationale. Au 12e jour des manifestations massives, dédiées au départ et reconduites pour la semaine, le président égyptien entend toujours être de la partie. Et il le fait savoir de manière claire et explicite. Il a organisé la première rencontre du nouveau cabinet du Premier ministre, Ahmed Chafic, fraîchement désigné, pour examiner « les questions économiques », en présence du vice-président Omar Souleiman, le ministre du Pétrole, Samy Fahmy, le ministre des Finances, Samir Radwan, et le responsable de la Banque centrale, Farouk Okba.



En faisant bloc autour du chef, contesté et en rupture de légitimité, la nouvelle équipe dirigeante prend le risque d’exacerber les tensions déjà à leur paroxysme. Ainsi, pour le chef du mouvement d’opposition Kefaya, Georges Ishaq, cette réunion «est une preuve qu’il s’accroche à sa position et veut montrer au peuple qu’il est toujours là.» Il reste que l’option du départ est rejetée par le Premier ministre qui, tout en s’appuyant sur l’argument de la stabilité, considère qu’il «n’y a pas de raison que le président se désiste.» Impasse ? Pas sûr. C’est que, d’une part, les ambitions des «présidentiables» jusque-là tues, à l’image de Baradeï souhaitant discuter avec l’état-major pour favoriser «une transition sans effusion de sang» ou de Amr Moussa présent au Midan Tahrir, se déclinent ouvertement en alternatives à la vacance du pouvoir. D’autre part, le refus du «statu quo intenable» redouté par Hillary Clinton signe le temps de la transition «maintenant» d’Obama appelant Moubarak à «prêter attention» aux attentes de son peuple et de prendre «une décision ordonnée, constructive et sérieuse. »

En Egypte, le scénario de la transmission pacifique du pouvoir se met en route. L’idée d’un gouvernement à large représentation, avalisée par les Etats-Unis et les puissances européennes, se met doucement et sûrement en marche. Elle est à l’ordre du jour des négociations lancées entre le vice-président et le « conseil des sages » acquis à la « solution constitutionnelle » (Article 139 de la Constitution) permettant la formation du gouvernement intérimaire, présidé par Omar Souleiman, qui sera chargé de mettre en place les réformes démocratiques. Toute cette démarche est suspendue au desirata du raïs qui, selon le Washington Post, peut faire l’objet d’un départ en villégiature dans sa résidence de Charm-El-Cheikh, ou en cure de santé prolongée en Allemagne. La question démocratique en Egypte, loin d’être réductible à l’épouvantail islamiste, pose avec acuité le devenir de l’un des pays phares du Moyen-Orient soumis à l’épreuve décisive des réformes. Si, pour les Frères musulmans en « retrait » des manifestations, la déferlante populaire n’est pas le fait d’une « révolution islamique » rêvée par Téhéran, le train des changements dans le monde arabe inspire l’inquiétude de Washington, en raison des risques de «déstabilisation» et de «chaos» qui pèsent sur tout le Moyen-Orient. A la 47e conférence sur la sécurité, la Secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, a plaidé en faveur d’une transition «délibérée, concertée et transparente.»

Entre la terreur des « baltaguias », versés dans la répression des manifestants faisant corps pour empêcher l’armée de se retirer de Midan Tahrir, l’incendie de l’Eglise Mar Guirguiz à Rafah et l’attaque d’El Arrich, au Sinaï, dirigé contre le gazoduc approvisionnant la Jordanie et amenant l’interruption des livraisons de gaz à Israël (40% de ses importations), les incertitudes planent dangereusement sur l’Egypte piégée par l’intransigeance de son raïs maladivement accroché aux illusions du mandat légal historiquement et politiquement dépassé.

L’après-Moubarak a commencé et officialisé par la démission du bureau exécutif du Parti national démocrate (PND) chassant Gamal remplacé par Hossam Badrawi, désigné en qualité de secrétaire général et de président du comité politique. La mue du PND délivre le message de l’ouverture incarnée par le nouvel homme fort connu pour ses bons rapports avec l’opposition. L’Egypte politique a enfin décidé de se donner la main. Heureuse perspctive !