Deux manifestants sont morts en Egypte au cours de violents affrontements entre police et manifestants, à moins de dix jours du premier scrutin législatif.
Plusieurs centaines d’Egyptiens occupaient ce dimanche matin la place Tahrir au Caire, tandis que des heurts sporadiques opposaient la police à des manifestants aux abords du ministère de l’Intérieur situé à proximité de l’emblématique place Tahrir. La police anti-émeutes tirait régulièrement des gaz lacrymogènes tandis que des dizaines de protestataires dressaient des barricades aux abords du bâtiment ministériel.
Dans la nuit de samedi à dimanche, des médecins ont successivement annoncé la mort d’Ahmed Mahmoud, 23 ans, qui a reçu une balle dans la poitrine au Caire, puis celle de Baha Eddin Mohamed Hussein, 25 ans, touché par une balle en caoutchouc à Alexandrie au nord du pays.
Les affrontements, qui ont éclaté dans la matinée au Caire sur l’emblématique place Tahrir, ont fait 750 blessés dans la capitale, selon le ministère de la Santé, avant de gagner d’autres villes du pays, notamment Alexandrie, Assouan (sud) et Suez, sur la mer Rouge. Au cours des rassemblements, les protestataires ont scandé des slogans hostiles au maréchal Hussein Tantaoui, chef du Conseil suprême des forces armées (Csfa) et dirigeant de fait de l’Egypte. «Tout ce qui arrive est la preuve que les militaires veulent garder le pouvoir», a estimé Ahmed Abou el-Enein, militant de 30 ans, sur la place Tahrir, foyer de la révolte populaire qui a conduit à la chute de Moubarak en février dernier.
Des médecins ont, par ailleurs, indiqué avoir prodigué des soins à plusieurs personnes touchées aux yeux par des tirs de balles en caoutchouc, précisant que certaines avaient été transportées dans des hôpitaux.
Dans un communiqué publié sur sa page Facebook, le ministère de l’Intérieur a toutefois assuré que «la police n’avait pas fait usage d’armes à feu, de fusils de chasse ou de balles en caoutchouc», affirmant que les forces de l’ordre avaient eu recours à des «moyens légaux», n’utilisant «que des gaz lacrymogènes pour disperser les émeutiers».
Dans la nuit, des dispensaires de fortune installés à même la chaussée accueillaient de nombreux manifestants en proie à des malaises ou suffocant en raison des tirs intensifs de grenades lacrymogènes par la police anti-émeutes. En outre, de nombreuses ambulances se trouvaient sur la place, où des milliers de manifestants s’apprêtaient à passer la nuit, certains enveloppés dans des couvertures. Des centaines de partisans de Hazem Abou Ismaïl, candidat salafiste déclaré à l’élection présidentielle dont la date n’est toujours pas fixée, avaient auparavant renforcé les rangs des manifestants.
Dans la nuit, le gouvernement égyptien a appelé «à la raison» dans un communiqué lu à la télévision, ajoutant que «ce qui se passe depuis ce matin est dangereux et a un impact direct sur la marche du pays». Plusieurs partis politiques ont réagi, l’un demandant la constitution d’un gouvernement de salut national, tandis qu’un autre a réclamé le report des élections.
Les affrontements sur la place Tahrir ont débuté après que la police eut tenté dans la matinée de disperser par la force un sit-in organisé depuis plusieurs jours par des personnes blessées lors de la révolte anti-régime du début de l’année. Elles réclamaient le jugement des policiers et dirigeants responsables des violences qui ont fait à l’époque officiellement 850 morts et des milliers de blessés.
R. I. / Agences